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FILMS / CRITIQUES

Police, adjectif.

par 

- Distingué à Cannes par le Prix du Jury de la sélection Un Certain Regard, le second film de Corneliu Porumboiu confirme le talent original du jeune cinéaste roumain

Police, adjectif. [+lire aussi :
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est une nouvelle illustration de l'approche différente du récit et du style absurde et caustique dont avait fait preuve Corneliu Porumboiu dans 12h08 à l'Est de Bucarest [+lire aussi :
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, qui lui avait valu la Caméra d’Or à Cannes en 2006.

Il est manifeste, dans ce deuxième film, que le metteur en scène a grandi et compris que cette histoire requérait d'accentuer encore plus la "mornitude" et le vide de sa ville natale, Vaslui (qui était déjà le cadre de 12h08 à l'Est de Bucarest), et d'inclure de longues séquences où il ne se passe rien mais qui sont cruciales pour l'impact général du film.

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Les trente premières minutes du récit se fondent sur un jeu de miroirs assez subtil car le héros, Cristi (Dragos Bucur, Boogie [+lire aussi :
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), petit agent de police de Vaslui, file un jeune local qui n'a pas l'air de comploter grand chose (mais Cristi semble particulièrement intrigué par un mégot jeté par terre par le jeune homme). Or la caméra de Corneliu Poromboiu oblige de son côté le public à suivre le policier tandis qu'il cherche des indices et à se mettre en quête lui-même d'indices sur le sens du film et le sens des pistes que suit Cristi.

Au fil du film, il devient paradoxalement évident que cette quête de sens n'est pas le moyen d'une fin mais le vrai sujet du film. Un des grands moments du film à cet égard (sur le sens et la réception du sens) est un audacieux plan de dix minutes qui commence alors que Cristi est dans la cuisine pendant que sa femme écoute un ennuyeux "schlager" roumain sur YouTube. Cristi explique alors qu'il ne comprend pas ce que signifie la chanson et sa femme, qui semble obsédée par cette musique, en propose une explication aussi passionnée qu'illogique.

Corneliu Porumboiu amène son récit de petite enquête sur un petit délit de consommation voire de commerce de marijuana vers la conclusion absurde qui s'imposait en une autre longue séquence plutôt audacieuse. On y assiste à un jeu de cache-cache sémantique où l'inspecteur de police chargé de l'enquête doit affronter son chef (Vlad Ivanov, 4 mois, 3 semaines et 2 jours [+lire aussi :
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).

Le tout prend près de vingt minutes en deux longs plans interrompus par un bref plan de coupe. Ce film n'est pas uniquement un nouveau témoignage du talent de réalisateur de Corneliu Porumboiu, il atteste également le talent des acteurs (dont beaucoup viennent du théâtre et sont donc habitués à rester dans leurs rôles aussi longtemps) et surtout le regard et l'écoute infaillibles de Porumboiu pour ce qui est de la manière dont les gens manipulent le dialogue et le sens pour arriver à leurs fins.

Comme dans son premier film, la conversation dépend de la définition des concepts et de leurs implications, notamment politiques. Pour Cristi, en tant qu'agent de l'ordre de son métier, le sens et l'interprétation des mots sont d'autant plus importants. Est aussi explorée la nécessité de motiver précisément ses actes par la parole.

Une coda brève et étonnante parachève le film en montrant une application pratique par le protagoniste du principe de la réduction à l'absurde, ce qui ancre bel et bien Corneliu Porumboiu parmi les metteurs en scène de Roumanie et même d'Europe les plus brillants du moment.

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(Traduit de l'anglais)

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