email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

CANNES 2013 Compétition

Un château en Italie : l’arbre va tomber

par 

- Valeria Bruni-Tedeschi plonge avec sensibilité au cœur d’une famille riche, rattrapée par le temps et les désarrois de l’existence

Un château en Italie : l’arbre va tomber

"C’est une famille de dégénérés, des enfants gâtés-pourris. Le prince et la princesse de Castagneto !" De qui parle le jardinier d’Un château en Italie [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Valeria Bruni Tedeschi
fiche film
]
de Valeria Bruni-Tedeschi, dévoilé en compétition au 66ème Festival de Cannes ? De Louise et Ludovic, les héritiers de la famille Rossi Levi, un "empire" italien "vendu pour une bouchée de pain" après la mort de leur industriel de père. Mais les restes assurent néanmoins à la sœur et au frère (deux quadragénaires), ainsi qu’à leur mère, une vie très aisée entre leur château près de Turin et leurs confortables appartements dans les beaux quartiers de Paris. Mais les riches n’en sont pas moins humains et pleurent aussi…

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Creusant de nouveau l’inspiration autobiographique qui irriguait ses deux premiers longs (Il est plus facile pour un chameau... [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film
]
et Actrices [+lire aussi :
critique
bande-annonce
fiche film
]
, apprécié au Certain Regard cannois en 2007), la réalisatrice et protagoniste évoque en trois saison (printemps, automne, hiver) la fin d’un monde, celui de la vie de château, de la jeunesse et de ses jeux arrogants. Une page qui se tourne sous le signe de la perte et d’une quête existentialiste un peu désespérée, mais traitée sans aucun pathos et filmée comme une valse-hésitation nostalgique entre l’arrachement douloureux à un passé heureux et la difficulté à trouver une issue vers le futur. Dans cet entre-deux qui se dépouille, stérile et morbide, parcouru de secousses frénétiques pour faire renaître quelque chose ou ruer dans les brancards de l’inévitable, les liens familiaux se concentrent sur l’essentiel, tout comme la réalisatrice qui ne cherche pas à densifier artificiellement son intrigue et qui s’efforce de s’approcher au plus près du réalisme souvent décousu de l’existence.

Un peu perdue et toujours en bordure d’hystérie, Louise (Valeria Bruni-Tedeschi) n’a pas d’homme et pas de travail depuis qu’elle a abandonné sa carrière d’actrice. Elle clame vouloir "donner de la place à la vie dans sa vie", rongée par l’angoisse de ne pas avoir d’enfant, et tente de trouver une solution dans une pratique complètement désordonnée de la religion dont elle n’a jamais vraiment appliqué les stricts principes. Elle est riche, mais le magnifique château de son enfance coûte trop cher à entretenir (10 000 euros par mois, plus les salaires – payés en francs suisses – du personnel) et une enquête fiscale menace sur les revenus non déclarés de la famille qui ne collent pas avec leur train de vie fastueux. Surtout, son frère adoré, Ludovic (Filipo Timi) a le Sida. Il dépérit et se braque ("qu’on me regarde mourir ? ") à l’idée de transformer en musée le domaine qui rattache les Rossi Levi à leur racines italiennes, au contraire de sa mère (Marisa Borini), pleine de bons sens par rapport à ses grands enfants inconséquents ("vous êtes des idiots !"). Il faut dire que les ressources ne manquent pas totalement puisqu’ils vendront aux enchères un Bruegel à 2,6 millions d’euros. Mais comme le dit l’adage, l’argent ne fait pas le bonheur. Alors, Louise tente de conjurer ses peurs en se lançant dans un amour très romantique avec le jeune Nathan (Louis Garrel), de près de vingt ans son cadet, et en essayant à toutes forces de tomber enceinte. Mais, comme le châtaignier malade dans le jardin du château, l’arbre familial va tomber.

Filmé avec une belle maîtrise dans des décors magnifiés par la lumière de la photographie de Jeanne Lapoirie, Un château en Italie distille un charme mélancolique teintée d’éclats de comédie amenés par le personnage de Louise (en butte à de perpétuelles contradictions impulsives) et de messages sous-jacents (par exemple la chanson "quand le peuple est affamé, c’est la révolution"). Bien épaulée par les autres interprètes (notamment Xavier Beauvois et Céline Salette), Valeria Bruni-Tedeschi poursuit son exploration très affective des désarrois inhérents à l’humain, des addictions au passage du temps, en passant par les notions de faute et de pardon. Des questionnements philosophiques omniprésent à l’arrière-plan d’un film (qui fait un clin d’œil à la scène finale de Blow Up d’Antonioni) dont le véritable cœur est l’absent : le père.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Privacy Policy