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Kristina Trapp et Sarah Calderon, d'EAVE et The Film Agency

« Un film n'a pas besoin de grosses dépenses [pour sa promotion], plutôt d'une idée créative »

- Entretien avec Sarah Calderón – fondatrice de l’agence de marketing The Film Agency – et Kristina Trapp - directrice générale d’EAVE - à l’occasion de la formation aux nouvelles méthodes de marketing et de distribution de films

Kristina Trapp et Sarah Calderon, d'EAVE et The Film Agency

Mercredi 16 octobre à Bruxelles, Cineuropa a rencontré Sarah Calderón – fondatrice de l’agence de marketing The Film Agency – et Kristina Trapp -  directrice générale d’EAVE - à l’occasion de la formation aux nouvelles méthodes de marketing et de distribution de films.

Cineuropa: C’est la première fois l’EAVE organise une formation en collaboration avec la Fédération Wallonie-Bruxelles ?

Kristina Trapp : En effet. Je trouve ça assez formidable qu’un fond de soutien prenne les devants pour faire quelque chose. Leur constat était que les films belges francophones font de bonnes performances dans les festivals, alors que le succès en salle et économique n’est pas toujours à la hauteur. Les producteurs avaient envie de changer cela, de travailler sur le marketing mais n’y arrivaient pas toujours avec succès et ne savaient pas non plus toujours comment faire. L’idée [de la formation] était de leur proposer des experts pour leurs expliquer comment optimiser le travail de marketing et de réseaux sociaux.

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Beaucoup de professionnels du cinéma belge semblent avoir répondu à l’appel de la formation.

Kristina Trapp : Oui, il y a avait environ 120 inscrits, ce qui est appréciable. La salle était remplie pour le premier jour.
Pour la seconde journée d’atelier, nous avons retenu sept projets. Il a fallu se limiter dans le nombre de projets sélectionnés parce l’objectif est d’aller vraiment en profondeur. Ce sont des projets à différent stades de développement. Trois projets sont déjà terminés, et d’autres sont en développement ou en production – ce qui est là aussi très intéressant.

Sarah Calderón : Les personnes sélectionnées nous ont présenté un dossier de projet, contenant synopsis, traitement, note du producteur, note du réalisateur, et une petite stratégie marketing. De notre côté, nous avons préparé une ébauche de stratégie : SWOT, benchmarking, positionnement, B2C et distribution, pour les conseiller sur ces points précis. Nous leur donnerons aussi conseils par rapport aux réseaux sociaux et marketing sur internet.

Vous avez l’impression qu’il manque aussi des experts en marketing de films ?

Sarah Calderon  : Oui, un peu. Le secteur manque surtout de professionnalisme.

Kristina Trapp : Pendant des années, nous avions du mal à trouver une personne qui possédait une expertise à la fois en termes de marketing mais aussi en cinéma indépendant européen, pas seulement local et international, et qui s’y connaisse en distribution alternative et tout ce qui vient avec. Ce n’est pas si évident que ça de trouver des gens qui s’y connaisse vraiment.

Pourquoi ne pas faire appel à des spécialistes du marketing ?

Sarah Calderón : Beaucoup de personnes font appel à de grosses agences disposant de structures très grandes, qui ne connaissent pas les spécificités du cinéma. Ils vont générer des outils très sophistiqués et chers, mais ne savent pas réfléchir pour les plus petits budgets. Ils peuvent aussi proposer une affiche très originale, mais qui ne rentre pas dans les canons de ce qu’attend le public : il faut aussi donner aux gens des suretés par rapport à ce qu’ils attendent. Quand on ne connaît pas les codes, c’est difficile.

Kristina Trapp : Et souvent c’est aussi une question de crédibilité envers les producteurs. Parce que quelqu’un qui ne connaît pas les situations en vente ou en distribution, n’aura aucune crédibilité.

Vous avez développé l’agence The Film Agency. En quoi cela correspondait-il a un besoin du secteur ? Vous aviez l’impression que les producteurs ne pensaient pas à ce qui se passerait après la production de leur film ?

Sarah Calderón : On peut dire cela comme ça. En général dans le cinéma indépendant le but du producteur est de finir le film, ce qui est déjà un challenge. De plus, depuis peu, les producteurs, pour vivre, doivent faire plusieurs films à la fois. L’ancien business model ne fonctionne plus. Avant, les agents de vente et distributeurs venaient préacheter les films. Lors du développement ou du tournage du film, les producteurs avaient déjà un agent de vente et un distributeur – ils n’avaient donc pas à se poser ces questions.

Mais aujourd’hui, très peu de films sont pré-achetés, les producteurs sont donc restés sans interlocuteurs. Ils doivent aussi faire face à l’arrivée des réseaux sociaux et nouvelles technologies. C’est pour ça que toute la manière de réfléchir a changé.

Le producteur doit y mettre du sien d’un bout à l’autre de la vie du film…

Sarah Calderón : Oui. Il ne faut pas simplement se poser les questions, mais aussi avoir une méthode de marketing qui reflète à la fois la complexité du marketing de cinéma, qui soit facile à mettre en place par une personne qui ne s’y connait pas du tout en marketing.

Kristina Trapp : Il faut une prise de conscience, que les producteurs comprennent qu’il doit y avoir un public et que chaque film à son public, que la sortie en salles n’est pas toujours adaptée pour chaque film, qu’il y a d’autres moyens de faire voir des films. À ce sujet, il commence à y avoir un changement : au début de nos formations, il y a quatre ans, les producteurs étaient encore assez réticents. Ils voient maintenant qu’il faut changer, et surtout aller avec les changements.

Que conseilleriez-vous aux producteurs indépendants pour réduire leurs coûts en termes de marketing ?

Sarah Calderón : Il est difficile de donner un conseil général : des films n’ont pas besoin de grosses dépenses mais plutôt d’avoir une idée créative, comme on l’a vu avec Mobil Home [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film
]
. Ils auraient pu peut-être dépenser le double en affichage extérieur, mais à la place ils ont fait quelque chose de très original qui permis une connexion avec le public. Il y a aussi des films qui ont besoin de dépenser en marketing, parce qu’il faut que ça fasse « grand film » et que ce soit présent dans la rue.

À un moment donné on ne peut pas cacher la question des budgets. Il faut prévoir et d’anticiper le plus possible, et rentabiliser tout ce qu’on fait au maximum. Par exemple, dans la tradition b2b et b2c, il ne faut pas dépenser trop d’argent dans le b2b au risque de ne plus rien avoir pour le b2c. Dans le cas du film palestinien Omar d’Hany Abu-Assad le marketing était fait à la fois pour le b2b et b2c, a demandé très peu d’investissement budgétaire mais a permis que le film existe pour le public, avec 15.000 likes pour communiquer tout ce qui se passe.

Mon conseil serait donc de savoir où dépenser, où ne pas dépenser et que ce soit en accord avec la cible.  Il faut aussi réfléchir à la façon de budgétiser la partie du développement : on peut payer une quantité de choses énormes, qui vont servir pendant toute la vie du film.

Un des messages de la formation semble aussi être de commencer son marketing tôt.

Sarah Calderón : Ce que l’on fait tôt est moins cher. On parlait aujourd’hui de faire des sacs pour le marchandising d’un film. Si on a cette idée et que le lancement est dans un mois, on va le faire en Belgique. Si on a l’idée quatre mois avant, on va le faire en Chine. Si l’on veut quelque chose tout de suite, on le paie plus cher. C’est logique, c’est clair. Et tout est comme ça. J’ai beaucoup aimé qu’aujourd’hui tout le monde ait lancé le même message. C’est vraiment la clé pour les producteurs : il faut s’organiser tôt. 

 

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