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LES ARCS 2022

Floor van der Meulen • Réalisatrice de Pink Moon

"On ne sait plus si l’on doit en rire ou en pleurer. C’est cela la vie, non ?"

par 

- La cinéaste néerlandaise parle de son film primé à Tribeca et en compétition aux Arcs Film Festival

Floor van der Meulen • Réalisatrice de Pink Moon
(© Esteban Granelli/Les Arcs Film Festival)

La Néerlandaise Floor van der Meulen a remporté une mention spéciale à Tribeca avec son premier long métrage de fiction, Pink Moon [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Floor van der Meulen
fiche film
]
. Nous l’avons rencontrée à l’occasion du 14e Les Arcs Film Festival où son film est présenté en compétition.

Cineuropa : d’où est venue l’idée de Pink Moon qui est scénarisé par Bastiaan Kroeger ? Qu’est-ce qui vous a attiré vers ce sujet plutôt dramatique d’un père résolu à mourir alors qu’il est encore en bonne santé ?
Floor van der Meulen : Je voulais faire un film sur une relation père-fille et sur la peur de perdre son père sans vraiment avoir eu le temps de le connaître. Mon propre père appartient à cette génération de pères qui ressentent des émotions mais qui ne les expriment pas, donc il y a une sorte de mystère. À partir de là, j’ai trouvé Bastiaan, le scénariste, qui avait une relation du même genre avec son père. Nous nous sommes vraiment inspirés du quotidien de nos propres familles. J’ai été très impliqué dans le développement du scénario : nous avons énormément échangé et nous avons fait plusieurs ateliers ensemble comme la Script Station de la Berlinale. Par ailleurs, aux Pays-Bas, il y avait un très grand débat sur la question du suicide assisté, porté par un groupe de plus en plus important de personnes âgées qui réclamaient le droit de choisir leur propre façon de mourir, et ceci sans être malade, ce qui est différent de l’euthanasie. J’ai trouvé ce sujet socialement très intéressant à transposer en film de fiction avec une sorte de bombe à retardement autour de père qui n’est pas en train de mourir mais qui veut mourir. Comme c’est de sa vie qu’il s’agit, comment gère-t-on cela en tant que famille ?

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Le film traite de l’ensemble de la famille, mais le personnage moteur est Iris, la fille. Pourquoi ce choix ?
C’est sans doute lié à ma propre frustration de ne jamais pouvoir comprendre totalement l’autre, de ne pas pouvoir entrer dans son esprit. Le point de vue de la fille était là, dès l’origine du projet. Quand votre père vous annonce que sa vie a été bien remplie et qu’il se sent prêt à mourir, c’est si abstrait qu’il me semblait naturel de choisir l’angle de la jeune génération qui est vibrante et pleine de vie, et qui ne peut probablement pas comprendre à 100% le souhait de quelqu’un qui a 75 ans. Il y a une sorte de clash de générations aux Pays-Bas de ce point de vue.

C’est aussi un portrait de famille avec notamment un frère et une sœur qui réagissent très différemment.
J’ai démarré le casting très tôt parce qu’il me semblait très important d’investir du temps pour créer une famille qui soit crédible, que les interprètes puisse participent à la recherche de la juste tonalité des dialogues. La fille est très émotive, fonceuse et plus dans l’intime alors que son frère est beaucoup plus pragmatique, très néerlandais dans son sens de l’organisation et de la planification de la mort de son père.

Comment avez-vous trouvé le bon équilibre, sur cette frontière assez fine, entre le côté dramatique du sujet et un peu de légèreté, à la lisière parfois de la comédie ?
D’une certaine manière, quand on est confronté à la mort, cela amène de la vie, tout du moins on prend davantage conscience de la vie. Ce paradoxe, ce contraste, était très intéressant à intégrer au film lui-même. Et je ne sais pas si c’est le cas dans d’autres pays, mais aux Pays-Bas, quand les gens parlent de la mort, ils deviennent très maladroits. C’est quelque chose que je voulais explorer et utiliser pour des respirations "comiques". D’une certaine manière aussi, cette légèreté rend parfois le drame encore plus pesant car avec ces contrastes, on ne sait plus si l’on doit en rire ou en pleurer. C’est cela la vie, non ? En tout cas, c’est ainsi que je la perçois. Je ne voulais surtout pas d’un film qui soit lourd et choquant du début à la fin car le sujet est déjà très lourd et il fallait vraiment de la légèreté pour mener le film à son terme.

Quelles étaient vos intentions principales de mise en scène, notamment dans la maison du père qui est assez remarquable ?
Le père qui souhaite mourir appartient à cette génération du baby-boom qui a lutté pour sa liberté et ses droits avec une grande détermination de pensée. Je trouvais que cela s’ajustait très bien avec la manière de pensée des architectes, donc nous avons créé cette "back story" d’un père qui était architecte et nous avons cherché ce genre de maison où un architecte pourrait vivre. Nous avons trouvé cette maison Mondrian et comme je savais que la dernière scène serait une seule et longue séquence, il fallait un décor où l’on puisse créer quasiment une chorégraphie avec la caméra et à travers plusieurs pièces. En un sens, cette maison symbolise l’esprit de Jan. Tous les décors ont été choisis en fonction des personnalités des membres de la famille et la mise en scène s’est construite sur les contrastes. Ainsi, quand la fille kidnappe son père et l’emmène à la montagne, la nature entre en contraste avec la vie urbaine : la montagne vous fait sentir petit, l’isolement et la neige créent une sorte de vide où le père et la fille sont vraiment en tête à tête.

Quel sera votre prochain projet ?
Je travaille de nouveau avec la même société de production (KeplerFilm) et le même scénariste. Nous développons un récit autour de la question des burn out. Car s’ils affectent beaucoup les trentenaires très ambitieux, ils touchent aussi de plus en plus les personnes âgées, en particulier les grand-mères qui sont exploitées par leurs enfants pour baby-sitter, épauler, etc.

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