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CANNES 2023 Cannes Première

Martin Provost • Réalisateur de Bonnard, Pierre et Marthe

"J’ai été au plus simple, au cœur de leurs vies, sur plusieurs périodes"

par 

- CANNES 2023 : Le réalisateur explique pourquoi il s’est lancé dans un film d’amour au long cours dédié au couple composé du peintre Pierre Bonnard et de sa compagne Marthe

Martin Provost  • Réalisateur de Bonnard, Pierre et Marthe
(© Philippe Quaisse/Unifrance)

Bonnard, Pierre et Marthe [+lire aussi :
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interview : Martin Provost
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, le 8e long métrage de Martin Provost (bien connu notamment pour Séraphine [+lire aussi :
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ou encore Sage Femme [+lire aussi :
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interview : Martin Provost
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]
) a été présenté dans la section Cannes Première du 76e Festival de Cannes.

Cineuropa : D’où est venue l’idée initiale du film, du côté Pierre Bonnard ou du côté Marthe ?
Martin Provost : Par le côté Marthe. J’ai été contacté par sa petite-nièce qui avait vu Séraphine et qui voulait que je fasse un film qui rende justice à Marthe Bonnard car elle n’avait pas la bonne place auprès de Pierre Bonnard. Au départ, je n’étais pas emballé même s’il y avait quelque chose d’intéressant. Comme je venais de réaliser Séraphine, je n’avais pas envie d’un autre film sur la peinture. C’est devenu une évidence pendant le confinement car le hasard fait que j’habite à la campagne à côté de la "roulotte" où ont vécu Pierre et Marthe Bonnard, au bord de la Seine. La nature était tellement belle, tellement épargnée par les hommes, vraiment magique que je me suis replongé dans les livres que j’avais sur Bonnard, dans ses tableaux et surtout dans la vie de Pierre et Marthe. Et je me suis dit que je ne voulais pas faire un film sur Marthe, mais sur le couple.

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Qu’ont en commun Pierre et Marthe qui viennent de classes sociales très différentes ?
L’amour de la peinture, l’amour de la l’art, la sexualité, tout ce qui est très organique, qui nourrit la création et que l’on retrouve dans les tableaux de Bonnard : c’est étonnamment charnel et lumineux. C’est toute une partie de leur vie que j’ai essayé de reconstituer, dans la joie de vivre, le bonheur de vivre à la campagne, au bord de l’eau, avec les Monet à côté, la bonne chère, etc.

Comment avez-vous choisi les quatre périodes qui scandent une intrigue courant sur un demi-siècle ?
J’ai axé le film sur leur histoire personnelle en faisant avec les moyens que j’avais, donc en simplifiant énormément. Plutôt qu’une reconstitution historique très fournie, j’ai été au plus simple, au cœur de leurs vies, sur plusieurs périodes. D’abord avec la rencontre, la jeunesse, l’appétit de vivre et d’aimer, la découverte des corps, le sujet d’étude que Marthe a été pour Pierre qui l’observait, la dessinait et la transformait tout le temps dans ses tableaux. Ensuite, c’est le passage à l’âge adulte avec la passion qui disparaît, le désir aussi, Pierre qui commence à butiner à droite à gauche, elle qui n’est pas dupe mais qui l’aime, et la rencontre avec Renée, cette deuxième femme que Pierre va avoir dans sa vie, beaucoup plus jeune que lui, son étudiante au Beaux-Arts et dont il tombe fou amoureux. Il va d’ailleurs courir le risque pour elle de quitter Marthe et cela coûtera très cher à tout le monde. Mais en même temps, c’est l’accès pour Pierre Bonnard à une autre dimension dans sa peinture. C’est par le drame que cela arrive avec une ouverture très grande, intérieure, et l’exploration des zones d’ombre qui vont donner les célèbres tableaux de Marthe dans sa baignoire, jusqu’à la dernière partie du film qui est la vieillesse et la reconnaissance pour eux de l’estime qu’on peut avoir pour l’autre quand on vieillit et du besoin l’un de l’autre, au-delà de la sexualité et du désir : un amour qui se prépare peut-être à quelque chose de plus vaste après la mort.

C’est la force de caractère de Marthe qui lui permet de s’imposer dans le milieu qui entoure Pierre (les mécènes, les autres peintres, etc.).
C’est ce que l’on appelle aujourd’hui une transfuge de classe parce qu’elle vient d’un milieu très modeste. Elle ment sur ses origines, se faisant passer pour une princesse italienne désargentée. Est-ce que Pierre la croit ? On ne saura jamais. En tous cas, il fait comme si, il l’accepte parce qu’il l’aime et qu’il a envie qu’elle soit là. Évidemment, tout le milieu qui entourait Pierre (Misia Sert et tous les peintres, sauf Claude Monet), n’aime pas Marthe car elle porte son milieu modeste en elle. Mais elle va tenir bon, s’imposer et surtout accepter les conditions de Pierre, ne pas se marier et ne pas avoir d’enfants ce qui à l’époque était un énorme risque. Ils vont passer 35 ans ensemble et Pierre ne connaitra jamais la véritable identité de Marthe, qui s’appelait en fait Maria Boursin, venait du Berri et qu’elle avait en fait une descendance.

Quelles ont été vos partis-pris en termes de reconstitution ?
J’avais décidé de ne pas montrer la ville et de la rendre uniquement vivante avec du "matte painting". Ma référence dans ce domaine, c’était Hitchcock. Je ne voulais pas de réalisme comme quand on voit la sortie de la Gare de Lyon, Montmartre, les zones industrielles. Je voulais recréer comme une forme poétique, une vision que j’ai du cinéma qui n’est pas collée à la réalité. Et comme c’est une histoire assez romanesque, je pouvais me permettre ça.

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