19/11/2012 - Quelle culture pour l’Europe ? Les associations culturelles s’interrogent

Alors que le nouveau Programme Europe Créative, qui remplacera les Programmes MEDIA et Culture, est en discussion au Parlement européen, des nombreuses associations culturelles se demandent quel rôle doit jouer la culture dans l’Europe de demain. L'intention de la Commission européenne est de trouver plus de passerelles entre culture et cinéma, mais l'heure est au questionnement comme le forum CAE l'a encore démontré dernièrement.

Culture Action Europe (CAE), forum pour les arts et le patrimoine, est le plus grand réseau issu de la société civile opérant dans les secteurs d’activité culturelle en Europe.

A l’occasion de leur assemblée annuelle, CAE a organisé, vendredi 9 et samedi 10 novembre à Bruxelles, un colloque portant sur les actions, les responsabilités, les perspectives et la contribution potentielle des opérateurs culturels européens, en vue d’un développement plus intégrateur et harmonieux du continent.

Regardez les interviews filmées avec :

Stojan Pelko, ancien Ministre à la Culture de Slovénie

Mary Ann DeVlieg, secrétaire général au IETM - international network for contemporary performing arts

Simone Dudt, secrétaire général au European Music Council

L’optimisation du potentiel de CAE en tant que plateforme de coordination et d’échange et la valorisation de son positionnement en tant qu’interlocuteur représentatif et informé, visent à renforcer la composante culturelle et artistique comme élément fondamental de la vie en société. Aussi, CAE contribue à faire entendre la voix de la culture dans les processus décisionnels en Europe.

La réunion a été l’occasion de réaffirmer et d’illustrer, avec des expériences menées par des associations sur le terrain, le levier de la culture comme moteur de changement et d’évolution sociale, ainsi que de l’activisme artistique comme diffuseur d’idées et mobilisateur de la société. La culture et les arts stimulent la réflexion et l’exploration collective de nouveaux espaces d’existence. Les opérateurs culturels européens, sa société civile, ses artistes, dans une démarche qui se veut collaborative, y prennent une part active.

Des initiatives d’activisme artistique ont permis, dans certains cas, de revitaliser l’esprit de citoyenneté et mobiliser la communauté autour d’objectifs communs. L’action culturelle comme moyen de remobilisation de l’action civile au niveau local est démontré dans des beaux exemples, tant de résistance citoyenne à des projets contraires au bien public, comme dans des initiatives communautaires d’amélioration de l’environnement culturel, social ou urbain.

Bien que la dimension économique et la contribution des secteurs d’activité culturelle à la croissance et à l’emploi soient de mieux en mieux jaugées en Europe, le potentiel de la culture et des arts en tant que vecteur de progrès social et son importance dans l’épanouissement individuel ne sont pas souvent reconnus dans le discours politique ni dans la prise de décisions. L’analyse des tendances actuelles dans l’action publique institutionnelle pour le développement montre que sa dimension culturelle tend à se diluer.

Les principales pistes ayant émergées pendant le colloque pour renforcer la position de la culture dans l’action publique et privée sont les suivantes :

1 - La dimension culturelle doit être comprise comme une des composantes du bienêtre et du progrès dans un écosystème social complexe, où les stratégies de développement sont appelées à intégrer des multiples variables : la culture au même titre que l’éducation, l’environnement, la santé, l’habitat, la vie communautaire, etc. L’activisme culturel y est appelée à adopter une vision holistique de la vie en société. Cette approche décloisonnée mène à rechercher une plus grande ouverture à et des nouvelles synergies avec des initiatives et des structures opérant dans d’autres domaines et secteurs d’activité.

Ce concept de développement intégrateur inspire les orientations définies par les institutions internationales, en particulier la Commission européenne, dans leur action en faveur du développement. Le monde de la culture est appelé à y répondre par un dialogue accru et un activisme mieux coordonné avec l’ensemble de la société, au niveau sectoriel, géographique et institutionnel.

2 - La crise actuelle parait avoir stimulé l’activité artistique et a fait augmenter les audiences et les publics dans pratiquement tous les secteurs d’activité culturelle. Cependant, la culture ne parait pas prendre pour autant une place plus significative dans la vie quotidienne des européens.

Le défi est de trouver des formes créatives et efficaces de rapprocher l’art et la culture des citoyens. Des voies sont à explorer pour faire en sorte que des stimuli artistiques soient plus présents dans leur vie quotidienne. Des nombreuses structures membres de CAE travaillent dans ce sens, amenant l’art dans la rue, faisant participer les publics dans la création artistique, mobilisant la communauté autour d’initiatives artistiques et sociales. Un meilleur partage de ces expériences et une recherche systématique de nouvelles formes d’action collective renforceront la capacité de la société civile à remplir ce rôle.

3 - La dimension internationale et transnationale de l’action des opérateurs culturels constitués en réseau est appelé à être renforcée. Une meilleure intégration européenne, y compris dans sa dimension de relations avec le reste du monde, doit s’appuyer sur la diversité et la richesse culturelle des peuples qui constitue ce continent. Une plus grande cohésion, efficacité et visibilité de l’action et du travail de la société civile du secteur culturel légitimera et renforcera le rôle représentatif du réseau auprès des pouvoirs publics et institutionnels.

Le grand défi pour CAE est de trouver les modalités les plus efficaces pour capitaliser son potentiel de catalyseur de progrès social et de mobilisation de citoyens en vue d’une meilleure prise en compte de la voix de la culture dans la construction d’une société meilleure.