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NAMUR 2015

Préjudice : affaires de famille

par 

- Avec son premier long, Antoine Cuypers signe un thriller familial angoissant, qui pose la question de la possibilité d’accepter la différence dans la cellule familiale

Préjudice : affaires de famille
Thomas Blanchard dans Préjudice

C’est de plus en plus compliqué ces derniers temps, mais Cédric et toute sa famille doivent se réunir ce soir pour diner. Sa sœur Caroline arrive en avance avec son mari, elle ne tient pas en place, semble avoir du mal à se retenir de parler. Son frère, absorbé par son travail, est en retard. Comme d’habitude. Sa belle-sœur est là avec leur fils. Malgré la bienveillance de sa belle-famille, elle semble mal à l’aise. La mère s’affaire dans la cuisine : ce diner doit être parfait. Le père quant à lui scrute le ciel, relégué à l’intendance du barbecue. Cédric lui a pris une grande décision : il va le faire, ce voyage en Autriche dont il parle depuis des années. Alors qu’il s’apprête à l’annoncer, sa sœur lui grille la politesse : elle est enceinte, et elle compte bien en faire une affaire de famille. Alors qu’il s’était résolu à apprécier de ce dîner, Cédric sent monter en lui une frustration qui se mue peu à peu en une colère blanche, puis en une fureur noire. Alors que Cédric est au bord de l’explosion, le reste de la famille tente de rester unie pour maintenir le fragile équilibre de façade qui semble régir leurs liens.

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Dans son court métrage A New Old Story (où il dirigeait déjà Arno), Antoine Cuypers faisait montre d’une créativité et d’une exigence formelles impressionnantes, qui valurent au film de nombreux prix en festivals. Préjudice [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Antoine Cuypers
fiche film
]
, film d’ouverture du 30e Festival International du Film Francophone (FIFF) de Namur, a la vertu d’affirmer encore un peu plus cette exigence, faisant fi d’un format long pourtant plus difficile à décliner sous un mode tendant vers le formalisme. Les partis-pris esthétiques sont forts : couleurs désaturées,  sons étouffés, musique dissonante, maison-personnage. Le travail sur l’image, dans des tons délavés, presque irréels, confère une aura inquiétante à l’atmosphère déjà chargée par la tension sous-jacente qui semble gripper les liens qui unissent cette famille. Cette tendance assumée au formalisme en dit au final plus sur la psychologie des personnages que leurs faits et gestes.

Chaque membre de la famille semble entravé par des chaînes invisibles, même si chacun l’exprime (ou pas) à sa façon. Arno, père fantomatique à la chevelure blanc éclatant erre aux lisières du groupe. C’est d’ailleurs le seul qui semble accepter les excentricités de son fils. Le frère se caractérise pas son absence, le fils prodigue que l’on attend en vain, qui finit par arriver, endossant le costume du chef de famille autoritaire là où la valeur en souffrance est la complicité fraternelle.  A la faveur de l’une des rares respirations du repas et du film, la belle-fille parfaite et le gendre déconneur, les pièces rapportées – à l’instar du spectateur -, reviennent le malaise qui infuse ces diners de famille, leur tentatives échouées de trouver leur place dans ce microcosme familial. Caroline (Ariane Labed) semble revendiquer le droit d’être pour une fois au seul centre de l’attention, et la mère (magistrale Nathalie Baye), qui se rêve sans doute comme le point d’ancrage, le phare au milieu des tempêtes familiales, peine à dissimuler sous un sourire de plus en plus crispé la détresse et la violence qu’elle peine à combattre. Quant à Cédric (impecable Thomas Blanchard)… Si sa folie ne fait guère de doute, les réactions qu’elle engendre nous pousse à nous interroger : n’est-on pas toujours le fou d’un autre ? Sans trop en dévoiler de l’intrigue, la résolution des conflits remet en perspective tous les avis que le spectateur a pu se forger au cours de la vision. Et le titre du film soudain prend tout son (double) sens (en anglais, "prejudice" veut dire "préjugé").

Préjudice est produit par Benoît Roland dont c’est le premier long métrage pour Wrong Men (Belgique), en coproduction avec Lucil Film (Luxembourg) et CTM Pictures (Pays-Bas), et avec le soutien du Centre du Cinéma de la Fédération Wallonie-Bruxelles, du Film Fund Luxembourg et du Nederlands Film Fonds. Le film est vendu à l’international et distribué en France par Les Films du Losange (début janvier), et au Benelux (7 octobre) par Cinéart.

Titre de la sélection de la Sala Web IFFR Live!, Préjudice est aussi disponible en ligne du 30 janvier au 14 févrirer ici

 

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