27/09/2023 - Le Français Xavier Legrand signifie de nouveau, avec ce film à la fois brutal et élégant, que la fête des pères n'est pas précisément sa préférée

Dans le film espagnol En la ciudad sin límites [+lire aussi :
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fiche film], un Leonardo Sbaraglia découvrait, stupéfait, que son père vieux et malade lui avait jalousement caché un secret du passé surprenant et intense. Dans le film britannique We Need to Talk About Kevin [+lire aussi :
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fiche film], Tilda Swinton devait assumer le fait de partager des gènes avec un être capable d’accomplir des actes terribles, et ses douloureuses conséquences. Dans Le Successeur [+lire aussi :
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fiche film], le deuxième long-métrage du Français Xavier Legrand, sélectionné en compétition au 71e Festival de San Sebastian, on retrouve des éléments thématiques similaires, mais leurs effets sur le héros (auquel se réfère le titre) vont encore plus loin que dans les titres précités.

Dès la première scène (où l'on assiste à un éblouissant défilé de mode) du Successeur, le spectateur perçoit qu’il n’est pas devant un film conventionnel : la mise en scène, le rythme et la musique font sonner une alarme. On a l'intuition que quelque chose de louche, tragique et perturbant va suivre un tel étalage de beauté, d'éclat et de satisfaction. Et il en ira bel et bien ainsi.

À partir du roman L'Ascendant d'Alexandre Postel, Legrand présente Ellias Barnès (interprété par le Canadien Marc André Grondin), un talentueux créateur qui travaille pour une maison de couture parisienne et vient d’hériter de la direction de l'enseigne. Alors même qu'il pose pour la couverture d'une revue qui promet de le présenter comme un génie et un héros des temps modernes, il apprend que son père vient de mourir et doit retourner dans son Montréal natal (qu’il a quitté il y a très longtemps) pour l’enterrer et gérer ses biens (et son héritage empoisonné).

Ainsi, dans le temps qui sépare celui où il descend de voiture pour entrer dans un aéroport à celui où il monte dans une autre, sur un continent différent (un moment rendu par un plan simple et génial), Ellias va passer d'un monde de paillettes, de glamour et de fantasme, pour lequel il s’est battu et qu’il a construit grâce à ses qualités les plus brillantes, à l’enfer qu’il a abandonné à cause de sa mauvaise relation avec son père.

Legrand accompagne cet homme qu'on a rencontré au sommet de sa carrière jusque dans les abîmes de la déshumanisation la plus atroce. Si dans son premier film, le titre encensé Jusqu'à la garde [+lire aussi :
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fiche film], le réalisateur rendait déjà compte d'une sinistre toxicité au sein d'une famille, incarnée par un monstre violent, possessif et colérique, dans son nouveau film, il va encore plus loin, clouant le spectateur terrifié à son siège avec une des histoires les plus saisissantes et chargées de tension que le public puisse mettre devant ses yeux cette saison.

La panique du héros face à la probabilité élevée d’hériter du pire, la perpétuation du mal, d'un passé maudit qui revient avec force (bien qu'on veuille l’oublier), la méchanceté psychopathique qui transcende jusqu'à la mort elle-même et le fatalisme coupable injectent des doses élevées de malaise dans ce long-métrage à la mise en scène stylisée et froide et à l'atmosphère tendue (proche de celle d’un film d’horreur), qui emploie savamment le hors-champ et les sons. Un autre cauchemar de Xavier Legrand sur les ténèbres familiales les plus atroces.

Le Successeur a été produit par KG Productions (France), Metafilms (Canada) et Stenola (Belgique). Les ventes internationales du film sont gérées par la société française MK2 Films.

(Traduit de l'espagnol)

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