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Jacques Audiard • Réalisateur

"Maintenant il se bat pour ceux qu'il aime"

par 

- CANNES 2015 : Jacques Audiard décrypte son nouveau film Dheepan, Palme d'Or au Festival de Cannes 2015

Jacques Audiard  • Réalisateur

Entouré notamment par ses comédiens Antonythasan Jesuthasan, Kalieaswari Srinivasan et Vincent Rottiers, d'un de ses co-scénaristes (Noé Debré) et de son producteur Pascal Caucheteux, Jacques Audiard a expliqué à la presse internationales les nuances qu'il a apporté à son approche cinématographique avec son nouvel opus, Dheepan [+lire aussi :
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, présenté en compétition au 68ème Festival de Cannes

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Quel a été le point de départ de Dheepan ?
Jacques Audiard : c'est un projet que j'avais mis en route il y a longtemps, à la fin de Un prophète [+lire aussi :
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. Il a voyagé un peu souterrainement jusqu'à ce que mes coscénaristes Noé Debré et Thomas Bidegain le fassent émerger. Au départ, il y avait même l'idée d'un remake des Chiens de paille, même si cela ne ressemble plus du tout à ça maintenant. C'était plus de ma part le désir d'une histoire d'amour. Au début, il y avait l'idée de considérer le genre comme un cheval de Troie, et cela y ressemble, mais avec un coeur un peu sombre. Mais avec le genre, cela donné un film de "vigilante", un genre un peu stupide et réactionnaire. Donc très vite, nous avons recentré le scénario sur le couple et l'amour. Ensuite, il y a cette idée des Lettres persannes de Montesquieu : qu'est-ce qu'un Persan ? Faire un film français, en France, et qui parle tamoul, c'était un projet à priori insensé. J'ai juste pris des acteurs étrangers et j'ai poussé les choses assez loin. Avec ce projet, j'avais pressenti une liberté de création et de fabrication. Et le scénario a beaucoup évolué pendant le tournage. Je fais cela régulièrement, mais un film comme De rouille et d'os [+lire aussi :
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par exemple n'acceptait pas bien ce genre d'écart d'improvisation. Là, 90% de ce que j'ai tourné hors du scénario est dans le film.

Le film traite d'un famille artificielle ayant quitté une situation de violence, la guerre, pour en retrouver une autre, plus urbaine. Pourtant, vous restez très allusif sur ces deux types de violence. Pourquoi ?
Cela a évolué. Dans les premiers travaux, Dheepan était plus un redresseur de torts, mais je n'avais pas envie de cela. Je ne voulais faire ni un documentaire sur la guerre civile au Sri Lanka, ni un documentaire sur une cité, mais considérer ces données comme une sorte de papier-peint qui ferait partie du décor sans qu'on ait besoin de les décrire. En réalité, je n'arrive pas vraiment à décrire. Donc je me suis dit que je serai très elliptique. Je me suis davantage intéressé à chercher comment investir cette histoire dans les personnages. 

Même si le film est centré sur l'histoire d'amour, la violence reste cependant un de vos sujets de prédilection.
Je ne comprends jamais cela. Est-ce qu'on trouve ça vraiment violent ? Je prends simplement au pied de la lettre la notion de conflit dramatique afin d'exacerber les sentiments. Qu'est-ce qu'une fausse famille avec un scénario totalement inventé et qui, à la fin, devient une vraie famille ? Auparavant, Dheepan se battait pour des raisons politiques, maintenant il se bat pour ceux qu'il aime. Il y a toujours le mot "se battre", c'est vrai. Mais parce que c'est à conquérir, ce n'est jamais donné.

Le héros en perdition au départ est aussi une de vos constantes.
Plus le chemin est long, plus c'est intéressant. Aller de A à B, de S à T, cela ne m'intéresse pas. La perdition va de A à Z et cela ouvre davantage de possibilités dramatiques et conflictuelles.

Le film ne fait pas de cadeau à la France.
Je ne parle pas de la France en général, mais d'un ou deux regards sur la France. Le film est toujours pris dans une vision subjective. Mais si le personnage de Brahim est joué par Vincent Rottiers, ce qui est à priori surprenant, ce n'est pas un hasard. Et la cité où nous avons tourné, c'est la France et c'est une chose qu'il faut voir.

Pourquoi le Sri Lanka ?
Honnêtement, je ne savais même pas exactement où était le Sri Lanka, à quoi ressemblait un Sri-lankais, ce qu'était un tamoul. Ces gens qui fuient un drame épouvantable, je ne voulais pas qu'ils appartiennent de près ou de loin à la culture francophone en lien avec le passé colonial. Il fallait qu'ils viennent de très loin. Mais ce n'est en rien une déclaration politique. Je me suis simplement saisi de la chose et je donne très peu d'informations sur le conflit. Mon intention était seulement de le faire entrer dans une fiction.

Quelles étaient vos intentions sur le plan formel ?
Au départ, je devais avoir des parti-pris d'image et de lumière, mais j'ai du m'adapter au tournage. Le film refusait certains effets formels. Tout ce qui avait été trop pensé ne s'appliquait pas au tournage, le steadycam, les efforts de cadrage en intérieurs... Donc le film est finalement assez modeste dans ce domaine, mais il y a le cinémascope car il fait donner une grande images à de petits héros. Par ailleurs, il fallait que je change à la direction de la photographie et à la musique car quand on est trop longtemps avec la même équipe, les gens savent trop bien ce que vous voulez.

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