email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

VENISE 2014 Orizzonti

Goodnight Mommy : accrochez-vous, les enfants !

par 

- VENISE 2014 : Le film autrichien de la section Orizzonti, d'abord étrange et superbement esthétique, s'avère une expérience terrifiante, à couper le souffle

Goodnight Mommy : accrochez-vous, les enfants !

Le film que Veronika Franz et Severin Fiala ont présenté hier à Venise dans la section Orizzonti est de ces films qui vous font vivre une véritable expérience. Hier soir, sur la Promenade Marconi, on pouvait dire, aux visages hallucinés ou pas des festivaliers, qui venait d'assister à la projection de Goodnight Mommy [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Severin Fiala et Veronika …
fiche film
]
(dont le titre original est Ich seh Ich seh, litt. "je vois je vois", un redoublement loin d'être innocent).

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Pendant les deux premiers tiers de ce long métrage autrichien (produit, il faut le signaler, par le cinéaste Ulrich Seidl), on assiste à un film bien fait, superbement photographié, calmement étrange, sans se douter qu'on va, en fin de séance, s'agripper à son siège et afficher toutes sortes de rictus à la perspective de ce qui reste encore à voir. Le film s'ouvre en effet sur des images paisibles, plutôt bucoliques : on suit deux petits garçons identiques tandis qu'ils jouent à cache-cache dans un décor idyllique fait de champs infinis, de forêts immenses, de lacs scintillants et de grottes mystérieuses. Ils habitent une grande maison au design impeccable, avec une mère fragile et effrayante au visage couvert de bandages qui ne s'adresse qu'à l'un d'entre eux, Elias, comme si Lukas n'était pas là. On soupçonne quelque tragédie, mais la dureté et l'égoïsme de la mère sème le doute, dans cette grande maison à l'esthétique trop nette qui n'est pas faite pour un enfant. Pour échapper à la cruauté de cette mère froidement monstrueuse, Elias, toujours seul, accompagné de son jumeau invisible, joue avec d'énormes cafards dignes d'un cauchemar kafkaïen et tente de recueillir un chat qu'il retrouve mort plus tard, ce qu'il décide de faire payer à la mère en exposant sa dépouille raidie dans un grand aquarium rempli d'alcool à brûler, sur la belle table basse, entre tous les murs blancs et lisses (sauf celui où sont accrochées de vieilles photos d'Elias et Lukas).

Les mauvais traitements qui s'ensuivent prennent une dimension presque irréelle. De sa chambre, où cette femme qui ne peut être sa mère l'a enfermé, Elias se met à l'espionner au moyen d'un écoute-bébé. À peine libéré, toujours flanqué de ce Lukas que personne d'autre que lui ne voit, il n'y tient plus et s'enfuit vers l'église la plus proche, mais le prêtre le ramène. C'est alors qu'en une seule phrase d'explication de la mère qu'il ne reconnaît plus, on comprend tout ce qu'Elias refuse de comprendre.

À ce moment précis, après plus d'une heure de film, la dynamique construite est complètement renversée, la cruauté change de camp, et le thriller psychologique se meut en un festival d'horreur à la limite du soutenable, avec flammes, tortures et enfant(s) démoniaque(s) à la clef. Le choc des images qui se succèdent pendant les vingt dernières minutes du film et difficile à décrire, mais il était évident dans la salle hier à Venise, aux cris d'effroi qui échappaient au public, qu'à l'instar de cette mère plongée littéralement en enfer par son propre enfant, personne n'a été épargné.

Dans ce premier long métrage de fiction, Franz et Fiala accomplissent un véritable tour de force. Ils déploient plusieurs motifs de manière stupéfiante, puis les font basculer dans leur contrepoint absolu, avec la même perfection. Par exemple, ils parviennent à nous faire observer pendant la majeure partie du film deux enfants comme s'il n'y en avait qu'un et, au moment même où l'on a la confirmation qu'Elias est tout seul, d'un coup, on ne peut plus ne pas voir le jumeau qui le pousse à la fureur. Tout se passe comme si Elias était manipulé par cette présence dont lui-même se sert, et comme s'il torturait sa mère par amour pour elle... Dans toute sa brutale simplicité, Goodnight Mommy est un film d'une élégance, d'une violence et d'une complexité diaboliques.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Privacy Policy