email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

SEMINCI 2015

L’artèria invisible : l'important, c'est d'aimer

par 

- Le 4ème film de Pere Vilà, en compétition à la 60ème Seminci de Valladolid, est un drame choral risqué, profondément inquiétant et perturbant

L’artèria invisible : l'important, c'est d'aimer
L’artèria invisible de Pere Vilà

Une femme, Carme (incarnée par Nora Navas, un des visages importants de la 60ème Seminci de Valladolid, puisqu'elle joue aussi le rôle principal dans l'autre film espagnol en compétition, La adopción [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Daniela Fejerman
fiche film
]
), se trouve en haut du grand escalier de la maison blanche, grande et moderne qu'elle partage avec son mari, Vicenç (Álex Brendemühl), qui fait de la politique et ne souhaite pas avoir d'enfant, contrairement à elle. Carme se tient là en silence, elle ne dit mot. La caméra la regarde fixement, et le spectateur avec elle. Derrière Carme, une fenêtre s'ouvre sur le vert éclatant d'une nature en éclosion, alors même qu'on sait qu'elle n'arrive pas à tomber enceinte de cet enfant qu'elle espère de toutes ses forces. Le seul son qui nous parvient est le murmure de la ville, parfois on perçoit les bruits de la maison. Carme parcourt des yeux cette grande cage dorée, se déplace et change de position. Cette séquence est un excellent exemple de la perfection du style narratif employé dans L’artèria invisible [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Pere Vilà
fiche film
]
, le quatrième long-métrage de Pere Vilà après Pas a nivell, La Lapidation de Saint-Étienne [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film
]
(Prix FIPRESCI à la Seminci il y a trois ans) et La fossa. Avec peu d'éléments, le cinéaste originaire de Girone parvient à rendre toute l'incommunication, la lassitude et l'insatisfaction d'un des quatre personnages principaux du film, qui sont tous connectés, qu'ils le veuillent ou non, par ce lien qu'évoque le titre du film.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Les autres personnages sont Vicenç et un couple incarné par Alex Monner et Joana Vilapuig : un jeune chômeur que sa petite amie entretient en se prostituant. Vilà nous montre leurs vies, et leurs pensées, à travers des séquences brèves et fragmentées, dans des chambres ou des couloirs où on ne voit pas toujours tout ce qui se passe. Comme la caméra reste figée, il arrive qu'un personnage sorte du champ et qu'on continue de l'entendre pendant qu'on observe l'effet de ses paroles ou de ses actions sur les personnages qui sont à l'image. Cette manière de raconter, qui rappelle Jaime Rosales, souligne le vide, la solitude et la misère des personnages de ce film. Parfois, on les observe de dos, comme chez les Dardenne, et ces plans renvoie à l'abandon et l'absence. S'il fallait trouver une troisième référence nette dans ce film inquiétant, très librement adapté du roman éponyme de Joaquim Vidal, tourné en quatorze jours à Girone et dépourvu de tout accompagnement musical, on pourrait penser au Grec Lanthimos, avec ses mises en scène crues.

Non seulement L’artèria invisible est-il un des films les plus audacieux de cette Seminci 2015, c'est un des titres espagnols les plus audacieux de la saison. C'est un film presque dérangeant car, comme les films précédents de Pere Vilà, il n'hésite pas à montrer la misère de personnages dans lesquels il est douloureux de constater qu'on se reconnaît. À cela contribuent tous les éléments de mise en scène précités, mais aussi le beau travail qu'ont fait, dans l'introversion, les quatre acteurs : ils nous offrent des réactions inattendues qui indiquent que leurs personnages sont meurtris, ou en crise, ou qu'ils ont tout simplement oublié qu'il faut aimer.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

(Traduit de l'espagnol)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Privacy Policy