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INDUSTRIE France

Stratégies mondiales et tactiques locales à Dijon

par 

- Changement de cap en vue et multiples questionnements pour le sophistiqué modèle français de chronologie des médias et de préfinancement des films

Stratégies mondiales et tactiques locales à Dijon
La Ministre de la Culture Françoise Nyssen (© RCD / Matthieu Begel)

"On ne sauvegarde pas un système en le figeant". Tel est le message politique volontariste axé sur la force du possible et le refus de la fatalité sans néanmoins être passif ou naïf, adressé de vive voix par Françoise Nyssen, la ministre française de la Culture, aux professionnels du cinéma français réunis à Dijon, à l’occasion des 27es Rencontres Cinématographiques organisées par L'ARP. En donnant six mois (et un médiateur) aux différents acteurs de la filière pour réviser la chronologie des médias, les pouvoirs publics entérinent la nécessité cruciale d’intégrer les surpuissantes plateformes numériques (Netflix, Amazon et autres) au système de préfinancement du 7e art hexagonal.

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"La frontière entre services linéaires et non linéaires n’a plus beaucoup de sens et en aura de moins en moins" a surenchérit Frédérique Bredin, la présidente du CNC, "mais il faut de l’équité : des obligations de financement, d’investissement et d’exposition." Un objectif qui sera facilité dès l’an prochain par la transposition dans la loi française de la nouvelle mouture de la directive SMA qui va contraindre les plateformes à proposer 30% minimum d’oeuvres européennes (qu’il va falloir cependant bien définir et aussi savoir qui va contrôler) et par les taxes dites Netflix et YouTube (lire la news) pour la contribution au financement de la création.

Ces bonnes nouvelles sont pourtant loin d’être suffisantes pour apaiser les inquiétudes. En effet, comme l’a souligné le chercheur Thomas Paris, "des films très différents se retrouvent sur les mêmes canaux de diffusion avec un risque d’étouffement pour certains d’entre eux. Et les stratégies sont très différentes entre l’économie de la production qui repose sur des projets et celle des GAFA qui est fondée sur la rentabilisation d’énormes investissements en infrastructures avec les contenus qui sont considérés comme des moyens." Une situation qui induit aussi bien des tentations de repli que des occasions de volontarisme.

Si c’est à l’échelle de l’Europe que passe clairement la régulation des géants numériques, l’échiquier du cinéma français doit aussi démontrer ses capacités d’adaptation. Les prémisses de la négociation sur la révision de la chronologie des médias semblent aller en ce sens avec une volonté partagée par beaucoup d’aligner l’ouverture de la fenêtre de la vidéo par abonnement (SVàD) qui est actuellement à 36 mois après la sortie salle, au niveau de celle de la télévision payante (aujourd’hui à 10 mois après la salle, mais qui est susceptible d’être également anticipée) si les plateformes prennent les mêmes engagements d’investissement en faveur du cinéma français. Néanmoins la guérilla tactique entre les différents acteurs de la filière cinématographique en France en fonction de leurs intérêts particuliers (par exemple la levée de l’interdiction de la publicité pour le cinéma à la télévision désirée par Altice/SFR qui n’investit pour l’instant que 10M€ par an dans les films français alors Canal+ préachète 107 longs et engage 140 M€ dans le même laps de temps, ou encore le refus systématique des exploitants de toute expérimentation de géolocalisation pour les films dont la carrière battrait de l’aile en salles) dégage une impression de disputes de chiffonniers autour d’un flacon déjà brisé dont le parfum persiste encore et d’un modèle français de financement du cinéma dont la sophistication actuelle aura bien du mal à résister à terme au rouleau-compresseur de la modernité si chacun s’entête à défendre son pré carré sans prendre de hauteur.

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