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Dome Karukoski • Réalisateur de Tolkien

“Tolkien était son propre ennemi”

par 

- Cineuropa a rencontré le réalisateur finlandais Dome Karukoski pour parler de son premier film en anglais, Tolkien, avec Nicholas Hoult et Lily Collins

Dome Karukoski  • Réalisateur de Tolkien
Director Dome Karukoski on set with Nicholas Hoult and Lily Collins (© David Appleby)

Dans Tolkien, avec son monteur de longue date Harri Ylönen et les scénaristes David Gleeson et Stephen Beresford, le réalisateur finlandais Dome Karukoski raconte l’histoire de l’auteur du Hobbit et du Seigneur des Anneaux, ou plutôt la période d'avant qu’il ne devienne l'écrivain qu'on sait. Le film, interprété par Nicholas Hoult, produit par Fox Searchlight Pictures et Chernin Entertainment, va sortir le 3 mai au Royaume-Uni, aux États-Unis, en Irlande et en Finlande.

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Cineuropa : Tolkien s’est inspiré de la mythologie et des légendes, mais vous suggérez que ses travaux portent aussi des traces de sa vie privée. Quelle est la part que vous vouliez laisser ici à la dimension personnelle ?
Dome Karukoski :
La dimension personnelle, c’est que moi aussi, j’ai grandi sans père. Et puis bien sûr, je suis un fan. J'ai lu Le Seigneur des Anneaux quand j’avais 12 ans, puis Le Hobbit et Le Silmarillion, quand j’ai été assez grand pour vraiment en profiter. Son monde est celui d’une fable, inspiré par l’œuvre finlandaise de poésie épique Kalevala et de la mythologie nordique et islandaise. Voilà ses plus grandes influences, mais les émotions décrites là, il les a vraiment soit partagées, soit vécues. Il a vu comment la guerre transforme les gens, et comment l’innocence peut tourner au chaos, comme dans le cas de Frodo ou Bilbo – il disait d’ailleurs qu’il était un peu un hobbit lui-même. Il y a tellement de choses abordées ici que j’ai ressenties  ou que j’aurais pu ressentir en tant que jeune homme. Je n’ai pas eu l’impression de réaliser ce film à partir d’un angle extérieur du tout.

Vous mentionnez dans le film à quel point il a emprunté au langage finlandais. Cependant, vous avez renoncé à faire référence plus explicitement à Kalevala, comme vous le souhaitiez au début.
C’était trop spécifique et aussi, c’était simplement un peu too much. Les pires films biographiques comportent toujours des scènes qui n'aident pas l’histoire à avancer –qui ne font que vous raconter quelque chose que vous pouvez trouver sur Wikipédia. Les gens mettent de force ces informations dans leur scénario, convaincus que si on ne le fait pas, les fans seront déçus, mais c’est un récit de deux heures ! Qu'on parle des inspirations et des influences, ça fait partie du parcours, mais il ne faut pas que cela prenne le pas parce que sinon, on ne raconte plus l'histoire de cet homme : on raconte l'histoire de ses livres. 

Le problème des films biographiques qui montrent quelqu’un en train de devenir la personne qu’on connaît, c’est que quand ils ont certaines trouvailles, c’est trop littéral.
Nous ne montrons pas ici les inspirations directes, mais plutôt le cœur émotionnel de la manière dont une inspiration se développe. Quand vous regardez ces films biographiques, il est rare que les sources d'inspiration soient enchevêtrées intellectuellement avec l’expérience du personnage. C’est plutôt de l’ordre de : "Oh, il a entendu ce rythme, et ensuite il a créé cette chanson". Nous avons essayé d’être plus subtils, parce que ce n’est pas comme s'il avait vu la tour de Birmingham puis décidé d'écrire Les deux tours. L'idée est de parler de la manière dont il voyait le monde. Ce que j'ai toujours aimé à propos de Tolkien, c’est qu’il y’a quelque chose de poétique dans ses histoires. Elles parlent de la nature humaine et de la manière dont nous fonctionnons comme société, donc tout ce qui est montré ici vient d’un niveau plus profond. 

Est-ce pour cela qu'au lieu de mettre quelque chose d’instantanément reconnaissable, vous ne montrez que des ébauches en train de se former lentement dans son esprit ?
Au moment du film, il n’est qu’un jeune homme qui construit son propre univers. Sa vie est à vrai dire très cinématographique. Voilà un garçon qui devient un orphelin et ensuite un des écrivains les plus célèbres du monde. Il y a aussi une histoire d’amour qui donne l’impression qu’elle a été écrite pour un film. Bien sûr, ce n’est pas l’artiste torturé typique : les conflits, ici, ne viennent pas de la drogue, de la gloire ou d’un parent abusif. C'était d'ailleurs un problème, de définir qui est l'ennemi, dans la vie de Tolkien. La solution facile eût été d'avoir quelqu’un qui ne croyait pas en lui, mais c’est le summum de tous les clichés. Tolkien n’a jamais eu ça : il était son propre ennemi. 

Qu’il interagisse avec ses amis ou avec Edith, jouée par Lily Collins, je n’ai jamais jamais vu Nicholas Hoult si tendre auparavant. Comment vous est-il venu à l’esprit pour ce rôle ?
Quand j’ai commencé de développer le film, il était déjà en haut de ma liste, mais je ne voulais pas lui montrer le scénario tout de suite. Mon père, qui était acteur, m’a raconté son audition pour Costa-Gavras. Après avoir bu du café et parlé politique plutôt que de parler du film, on lui a dit : "Vous êtes un être humain merveilleux, mais vous ne convenez pas à ce rôle" (rires). Nous n’avons pas parlé du film non plus, et Nic a dit que c’était le rendez-vous le plus étrange qu’il ait jamais eu. Il y a beaucoup de chaleur et quelque chose de joueur en lui, qui ne transparaît pas dans ses films. C’est quelque chose que je voyais également chez Tolkien.

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(Traduit de l'anglais)

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