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TRIBECA 2021

Levan Koguashvili • Réalisateur de Brighton 4th

“Je crois fermement dans les visages”

par 

- Le réalisateur géorgien montre dans son film que quand on vit à Brighton Beach, on ne vit pas vraiment en Amérique : on y va seulement parfois

Levan Koguashvili  • Réalisateur de Brighton 4th
(© Eliso Sulakauri)

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bande-annonce
interview : Levan Koguashvili
fiche film
]
, qui a fait sa première mondiale dans la section Compétition internationale fictions du Festival de Tribeca, a pour personnage central un ancien champion de lutte (incarné par la légende olympique Levan Tediashvili) qui va à Brooklyn, dans le quartier Little Odessa, pour prendre des nouvelles de son fils. Ce dernier croule sous les dettes de jeu et vit entassé dans une pension avec d’autres immigrés, qui essaient tous de joindre les deux bouts. Nous avons discuté du film avec son réalisateur, Levan Koguashvili.

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Cineuropa : On remarque vraiment les visages des gens dans le film. Comment les avez-vous trouvés, en particulier Levan ?
Levan Koguashvili :
Je crois fermement dans les visages. Si vous avez les bons faciès, vous avez le bon film, plus ou moins. Ils sont porteurs de davantage que juste des informations sur le caractère de la personne. Il faut adapter son style de mise en scène à eux parce que le visage, c’est la vérité. Habituellement, les visages que je trouve appartiennent à des acteurs non-professionnels, même si dans Brighton 4th, on a une combinaison des deux.

Pour le rôle principal, j’ai essayé de caster des hommes qui ressemblaient à des lutteurs, et ensuite je suis allé voir directement chez les lutteurs [rires]. Levan est une légende en Géorgie. Il a été nommé meilleur athlète du XXe siècle. Cependant, nous avions entendu dire qu’il avait des problèmes de santé et d’audition, donc c'était le dernier sur la liste. Une fois, en Iran, le Shah a été tellement impressionné par lui qu'il lui a demandé ce qu’il voulait. Il y avait un autre lutteur en prison, condamné à mort. Alors Levan a dit : "Je veux que vous libériez cet homme !". Il lui a regagné sa liberté grâce à la lutte ! Il est ce champion imbattable, mais il a aussi perdu un fils à la guerre – ils y sont allés ensemble, et son fils est mort dans ses bras. On peut voir tout cela sur son visage. Pas étonnant qu’il soit si unique.

Son âge et ses problèmes de santé ont en fait contribué à son personnage, en le rendant plus fragile. Après, tout le monde autour de lui l'est, fragile ! Toute la communauté que vous montrez est assez âgée.
Je n’ai pas pensé tant que ça à leur âge. Mais j’ai fait mes premiers films sur des immigrés clandestins, à l'époque où j’étudiais encore le cinéma à New York. J’ai juste senti une connexion émotionnelle à ce sujet. À l’époque, les Géorgiens allaient aux États-Unis avec des visas touristiques et ils restaient après. Je connaissais assez bien ce monde. Si j’avais tourné ce film en 2008, eh bien, ç'aurait été une toute autre histoire. Maintenant, 12 années ont passé, donc j’ai eu l’impression de revenir à mes racines, mais quant à leur âge... En pensant au personnage qui chante tout le temps, je voulais travailler de nouveau avec lui. Quand nous avons écrit le scénario, j’ai dit : "Nous devrions créer des scènes pour Kakhi Kavsadze !”. C’était un choix déterminé par l’acteur.

Leur vie dans cette pension a vraiment l'air étouffante. Même les couloirs semblent devenir de plus en plus étroits à mesure que l’histoire avance.
Une des raisons pour lesquelles je voulais faire ce film, c’était cet endroit. Nous avons tourné dans une vraie pension à Brighton Beach. J’ai déménagé là-bas pour vivre avec ces hommes. Ce monde me paraissait vraiment intéressant : il est tragique, il est cocasse. Je voulais simplement montrer cette communauté, c’était une des prescriptions cinématographiques que je m’étais données.

Quand on décide de quitter son pays pour chercher un futur meilleur, on est un rêveur. On pourrait formuler quelque chose de similaire par rapport aux jeux de hasard, un problème auquel tout le monde ici semble confronté.
Dans notre film, le motif de l'addiction aux jeux de hasard a été introduit pour une raison différente. L’histoire originale, celle qui s’est vraiment passée, était liée aux drogues. À l’époque, beaucoup d’immigrés mouraient d'overdose (leurs cercueils étaient ensuite renvoyés chez eux). Une fois, quelqu'un a vu un toxicomane dans la rue et il a appelé son père en Géorgie, et le père est venu, et il l'a sauvé. C’était ça, la vraie histoire. Mais comme mon premier long-métrage [Street Days] parlait déjà de toxicomanes, je ne voulais pas me répéter.

Il a toujours une bataille entre deux pôles, quand on veut construire une nouvelle vie tout en restant proche de son identité nationale, sauf qu'il n’y a pas beaucoup d’interactions avec le monde extérieur dans le film.
À propos de Brighton Beach, il y a une blague sur le fait que les gens qui y habitent ne vivent pas vraiment en Amérique : ils y vont seulement, parfois. C’était très caractéristique de la première vague d’immigration. Ces gens ne connaissaient pas l'anglais, et c’est pour ça qu’ils allaient là-bas, et là soudain, ils étaient entourés par des Géorgiens et des Russes. On avait l’impression d’être encore en Union soviétique ! Plus tard, les plus courageux se sont mis s'aventurer un peu à l’extérieur, et ça servait d'exemple aux autres. Bien sûr, du temps est passé, et à présent, beaucoup sont américanisés, mais quand j’étais encore à New York, les gens se dirigeaient immédiatementIl vers ces endroits qui leur paraissaient familiers. Ils se sentaient plus en sécurité là-bas.

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(Traduit de l'anglais)

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