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FANTASIA 2021

Ruth Platt • Réalisatrice de Martyrs Lane

“Je trouve ça intéressant quand les gens disent qu’ils n’aiment pas les films d’horreur : pour moi, c’est un besoin !”

par 

- Dans ce troisième long-métrage pour la réalisatrice britannique, pas besoin de s’inquiéter de ce qui est tapi dans les bois : ce qui est dans votre maison est potentiellement bien pire

Ruth Platt • Réalisatrice de Martyrs Lane

Avec l’aide d’enfants très talentueux (Kiera Thompson et Sienna Sayer) et de quelques souvenirs d’enfance, la Britannique Ruth Platt livre son troisième long-métrage, Martyrs Lane [+lire aussi :
critique
interview : Ruth Platt
fiche film
]
, prouvant que ce ne sont pas les fantômes que les gens devraient craindre, mais l’intolérable douleur du deuil. Le film est aujourd’hui à l’affiche du Festival Fantasia.

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Cineuropa : Il y a quelque chose de désuet dans Martyrs Lane, au bon sens du terme. Cela nous rappelle les petits bruits qui nous font sursauter la nuit et tous ces chuchotements étranges que l’on entend enfant.
Ruth Platt : L’histoire n’est pas autobiographique, mais c’est de ma propre enfance qu’elle puise essentiellement son énergie. Les films qui m’ont inspirée sont L’Échine du diable, L’Orphelinat [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film
]
et Les Autres. Ces films ont un caractère légèrement rétro. Quand l’histoire est vue par le prisme d’un enfant, vous ne pouvez pas vous empêcher de puiser dans vos propres souvenirs. Et petite fille, je faisais de terribles cauchemars. Les fantômes sont un peu comme les enfants en réalité, ils veulent être vus et cherchent à attirer l’attention.

Ce qui les rend certainement plus effrayants, car on ne peut pas anticiper la manière dont ils vont se comporter.
Et vous ne pouvez pas les raisonner. Il y a quelque chose de primitif aussi dans les émotions que les adultes apprennent à réprimer ou à cacher. Les fantômes ne font pas ça, ils sont complètement différents. Tout comme les enfants, du moins au début. Ce "visiteur nocturne" est une sorte de projection du personnage principal, c’est l’imagination de la petite Leah. Je trouvais important de sous-entendre qu'il ne s'agissait pas d'un gentil petit ange après tout. Il se passe quelque chose de plus inquiétant sur le plan psychologique, quelque chose en phase de se résoudre.

Je suis moi aussi née dans un immense presbytère très fréquenté. Mes frères et sœurs étaient plus âgés, et mes parents étaient de vieux parents. Je me sentais très seule. Les gens venaient avec toute sorte de problèmes, et bien sûr, j’écoutais. Puis on m’envoyait dans ma chambre. Il y avait toujours des choses sur lesquelles je voulais en savoir plus. Les enfants ont une imagination débordante, alors on se met à compléter les informations qui manquent soi-même. La mémoire est étrange. En effet, vous oubliez certaines choses et d’autres sont évidentes, comme figées sur une photo. Le cinéma est un peu comme ça aussi. Vous pouvez utiliser ces images figées pour évoquer quelque chose, et créer une ambiance.

Votre film m’a fait sursauter à plusieurs reprises, ces jump scares (sursauts de frayeur) sont très prévisibles, il y a toujours un fichu chat qui sort de nulle part et vous fait tressaillir.
Il n’y a pas de chats dans Martyrs Lane ! Juste un énorme lapin (rires). C’était très dur en fait. Certains jump scares étaient là depuis le tout début et relevaient plus de cette dynamique entre la mère et la fille. C'est assez effrayant de ne pas se sentir en sécurité ou en confiance dans une relation aussi cruciale. D'autres ont dû être intégrés plus tard, ce qui me rendait un peu nerveuse. J'ai simplement essayé de les baser sur ces relations.

Ce que fait Kiera ici est très subtil. C’est sa mère (Denise Gough) qui est plus dans l’émotion.
Je voulais qu'elle se sente un peu invisible dans cette grande vieille maison, pleine de bruits étranges. C'est pourquoi elle porte des vêtements sombres contre des murs sombres, comme une tenue de camouflage, comme pour se fondre dans le décor. Si un enfant perçoit la tristesse d'un adulte, cela peut être intimidant. Elle a l’impression qu’elle ne peut rien provoquer. C'est la raison pour laquelle elle réagit sans faire de bruit, mais cela ressort, bien entendu, dans ses cauchemars et dans ces rencontres. C’est la nuit que tout ressort.

Le propre de l'horreur est de s'attaquer à nos plus grandes peurs. Je trouve ça intéressant quand les gens disent qu’ils n’aiment pas les films d’horreur : moi, j’en ai besoin. C’est comme une thérapie, une manière d’exorciser mes peurs, de les exposer au grand jour. Ma mère est née dans une famille frappée par le deuil, et je sais qu’elle a porté cette pression. Refouler les choses était un moyen de fonctionner, même si je ne pensais pas que c'était une bonne chose. Voir les choses par le prisme d’un enfant permet de les voir d'un œil nouveau. J’imagine que c'est ce dont parlaient tous les poètes romantiques. Lorsque vous faites ça, vous pouvez voir où vous vous êtes trompés, où vous avez refoulé quelque chose, voire où vous vous êtes menti.

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(Traduit de l'anglais par Karine Breysse)

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