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VENISE 2022 Compétition

Gianni Amelio • Réalisateur de Il signore delle formiche

“Il y a des échos d’aujourd’hui, dans mon film sur le procès mené contre un poète homosexuel en 1968”

par 

- VENISE 2022 : Pour le réalisateur italien, raconter le procès d'Aldo Braibanti, survenu il y a cinquante ans, est une occasion de dénoncer l’homophobie hier comme aujourd’hui

Gianni Amelio • Réalisateur de Il signore delle formiche

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fiche film
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de Gianni Amelio, en lice pour le Lion d'or, retrace le cas Aldo Braibanti, poète, écrivain et dramaturge originaire d'Émilie-Romagne qui étant homosexuel, a été accusé d’avoir "manipulé" un étudiant majeur. Ce dernier, selon la volonté de sa famille, a subi des électrochocs et un internement en hôpital psychiatrique. Nous en avons discuté avec le réalisateur.

Cineuropa : Le procès Braibanti et votre film peuvent-ils nous dire quelque chose sur l’Italie d’aujourd’hui ?
Gianni Amelio:
Le film trouve des échos aujourd’hui, mais pas sous la même forme. L’Histoire se répète, mais jamais de la même manière. Aujourd’hui, le mot de "plagio" (chef d'accusation utilisé dans le procès, qui se référait à l'époque non seulement au plagiat, mais à un délit de manipulation, ndlt.) n'est utilisé que dans le champ musical, quand quelqu’un vole les notes d’une chanson, mais il y a d’autres formes de "plagio", qui sont souvent invisibles. Aujourd’hui, nous avons les unions civiles (même si certains ont dit "vous devrez vous en contenter") et en même temps, on apprend qu'hier, une dame a appelé la police parce qu’elle a vu deux personnes du même sexe s'embrasser. Voilà où se situe le danger. Voilà où se situe notre manque d’amour et d’empathie. Le progrès n’a pas été réalisé jusqu’au bout. Mais attention, il ne s'agit pas de se méfier du futur. Avec ce film, j’aimerais aider tel enseignant ou enseignante en école maternelle qui voudrait avoir la possibilité d’exprimer son amour pour un autre homme ou une autre femme sans que les parents d’élèves n'accourent pour retirer leurs enfants de l’école.

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Le film s’inspire de faits réels, et vous avez gardé le nom d'Aldo Braibanti, mais vous avez changé les noms des membres de la famille du jeune homme supposément victime de manipulation. Pourquoi ?
C’est un film centré sur Aldo Braibanti et sur les personnes qui, au fil du temps, sont entrées en contact avec lui, surtout pendant le procès. J’ai changé les noms des membres de la vraie famille qui accusait Braibanti parce que je ne voulais pas en faire une histoire personnelle. Si j’avais montré comment les choses se sont passées, en reconstituant tout jusqu’au moindre détail, on aurait pu penser que si cette famille s’était, elle, comportée ainsi, d’autres familles se seraient comportées différemment dans les mêmes circonstances. Je voulais élargir le propos. J’ai voulu rendre cette famille symbolique de la mentalité de la famille provinciale italienne typique à ce moment précis de l’Histoire.

Dans le film, il y a plusieurs figures féminines différentes. Braibanti semble avoir un excellent rapport avec sa mère, mais aussi faire montre d'une certaine misogynie.
Il y a une scène où Braibanti fait de durs reproches à un autre personnage qui est un jeune homme. Ce pourrait être teinté de misogynie, je n’ai pas cherché à sanctifier Braibanti. Il est clair que dans le film, il manque d’empathie ; pendant le procès, il se montre arrogant et ne se met à répondre aux juges qu'à partir du moment où le journaliste le convainc de se défendre.

Je décris ici quatre figures de femmes qui représentent autant d’aspects de la conscience féminine. Il y a une mère qui pense que l'homosexualité est une maladie et cherche à "guérir" son fils homosexuel. On ne peut pas justifier ce qu'elle fait, mais on peut la comprendre, l’insérer dans son époque. On a ensuite une mère affectueuse au point de se sacrifier elle-même, la mère de Braibanti. Dans le film, je n’ai pas pu raconter que quand Braibanti, partisan pendant la Seconde Guerre mondiale, a été capturé par les nazifascistes, elle est allée en personne demander sa libération. Ensuite, il y a une jeune fille qui représente la femme moderne, qui s’ouvre aux nouveautés de la société, participe aux mouvements de 1968 et se met au centre d’une manifestation contre ce procès indigne. C'est une petite manifestation de protestation parce qu’à l'époque, les gens avaient honte de manifester devant un tribunal pour le procès d’un "inverti", comme on disait alors. Enfin, il y a une toute jeune fille de 16 ans qui est pour moi un personnage touchant, très beau, qui est peut-être secrètement amoureuse d'Ettore et continue de s'occuper de lui après que le jeune homme se soit installé avec Braibanti, quand leur relation est désormais impossible. Elle va faire le ménage chez Ettore au moment où le jeune homme est enfermé dans une clinique psychiatrique. C’est une femme qui aime au-delà du sexe.

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(Traduit de l'italien)

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