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VENISE 2022 Hors compétition

Gianfranco Rosi • Réalisateur de In viaggio

“Le Pape ‘en voyage’ n’est pas le même Pape que celui du Vatican”

par 

- VENISE 2022 : À partir des images de 37 voyages accomplis sur neuf ans, Gianfranco Rosi dépeint un Pape François de plus en plus progressiste, face au monde d’aujourd’hui et ses problèmes

Gianfranco Rosi • Réalisateur de In viaggio
(© La Biennale di Venezia/Foto ASAC/Giorgio Zucchiatti)

À partir de 600 heures d'images montrant le pape François pendant ses différents déplacements autour du monde sur une période de neuf ans, le documentariste encensé Gianfranco Rosi a composé un travail qui contraste fortement avec ses méthodes habituelles. In viaggio [+lire aussi :
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a été projeté hors-compétition à la 79e Mostra de Venise.

Cineuropa : Dans votre nouveau film, on voit notamment Lampedusa, où vous avez tourné Fuocoammare, par-delà Lampedusa, et l'Irak, où vous avez tourné Notturno [+lire aussi :
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. In viaggio est-il né de ces travaux ?
Gianfranco Rosi : Un peu. Il y a un an, j’ai été contacté par le journal du Vatican L'Osservatore Romano, parce que le pape allait se rendre en Irak et qu’ils avaient vu Notturno et voulaient me parler. J’avais aussi été contacté avant Fuocoammare, par-delà Lampedusa [+lire aussi :
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. Le pape voulait me parler de migration, un thème très important pour lui. Neuf ans plus tard, il se rendait en Irak. J’ai demandé au journaliste combien de voyages le pape avait faits, et il a dit 37 sur les neuf dernières années. Waouh ! Je pensais cinq ou six, peut-être, et boum ! J’ai eu l’idée de faire un film sur les voyages du pape sur cette période, dans tous ces pays, c'est tellement énorme et immense. J’avais déjà le titre parfait pour ça : "De Lampedusa à Bagdad".

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Comment avez-vous obtenu le matériel que vous utilisez dans ce film, et la confiance du Vatican ? Ce dernier a-t-il maintenu une forme de contrôle sur le projet ?
J’ai travaillé complètement libre de tout contrôle. Ils connaissent mon travail, ils me font confiance, et ils m’ont donné les images. Elles sont en ligne, d'ailleurs, mais j’ai eu des des vidéos haute résolution sans filigrane, plus de 600 heures d'images.

Comment avez-vous monté tout ce matériel ?
C'est comme de la télévision, en fait, donc vraiment très différent de mon approche et de mon regard habituels, mais ça me fascinait de travailler avec quelque chose qui n’était pas "de moi". Mon monteur et moi-même avons regardé les images et passé des mois à choisir, et je me suis retrouvé avec un petit film parfait de 40 minutes qui commençait en Irak et se terminait à Lampedusa et qui était complètement fou et abstrait. Il allait d'endroit en endroit sans structure ni chronologie, et combinait les différents discours du pape en un seul monologue. C’était très efficace, j'étais très content de ce résultat. Et puis la guerre d’Ukraine est arrivée et le pape est allé à Malte. J’ai demandé au Vatican de venir aussi. Là, le pape a abordé le sujet de la guerre et il est devenu très politique. Il a fait la une des journaux et tout est devenu assez polémique. Donc j’étais là, avec mon film parfait, et voilà qu'entre en jeu cette matière nouvelle, qui était impossible à ajouter à la structure existante. Ainsi, d'un coup, mon film était hors jeu. Et puis (boum !), j’ai tout mis dans l'ordre chronologique, de Lampedusa à l'Irak à aujourd’hui et cet arc narratif, qui allait de 2013 à 2022, fonctionnait parfaitement. En mettant tout dans cet ordre, le film a soudain développé sa propre structure.

Et il a acquis un nouveau titre, semble-t-il.
In viaggio se réfère au fait que je ne montre ici que des images filmées pendant ses voyages, or le pape "en voyage" est un pape différent de celui du Vatican. On est en dehors des murs du Vatican, avec ses 2000 ans de politique et de procédure, et où le pape est le leader souverain. Au dehors, il est pastoral, et guide plus qu’il ne prêche. Il parle aux croyants et aux non-croyants, et devient presque une figure politique séculière.

Étant vous-même un séculier, comment l’avez-vous trouvé, en salle de montage comme dans la vraie vie ?
Je suis très séculier, et non-croyant, mais je l’ai suivi pendant ce travail qui a duré toute une année et il m’a ému. Il sait demander pardon, et pas seulement au nom de l’Église, mais également si lui-même, personnellement, a tiré de mauvaises conclusions. C’est un pape différent, que les gens adorent ou détestent, me suis-je rendu compte. Les conservateurs le trouvent trop progressiste. Il bénit l'union de deux hommes et leur amour, en disant "qui suis-je, pour vous juger ?". Ce n’est pas vraiment politiquement correct pour eux. Quant aux guerres, pour lui, il n'est jamais question d'une opposition du bien contre le mal : elles sont taboues en bloc pour lui. Il ne donnera jamais à l'armée qui défend sa bénédiction pour détruire la force qui attaque, ce qui a aussi causé des polémiques. D’une certaine manière, il est comme Gandhi, voyez-vous ? En tant que non-croyant, il m’a beaucoup ému. J’essaie de le dépeindre non pas comme un pape ou un homme d’église, mais comme un homme bon et de bonne volonté qui fait face aux problèmes de ce monde.

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(Traduit de l'anglais)

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