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CINEMED 2022

Christophe Leparc • Directeur, Cinemed

"La première nécessité, c’est de faire revenir les spectateurs dans les salles"

par 

- Rencontre avec le directeur du Festival Cinéma Méditerranéen de Montpellier, dont la 44e édition se déroule du 21 au 29 octobre

Christophe Leparc • Directeur, Cinemed

Pilote depuis huit ans du Cinemed - Festival Cinéma Méditerranéen de Montpellier, Christophe Leparc (par ailleurs secrétaire général de la Quinzaine des Réalisateurs depuis 2008) évoque la 44e édition (lire l’article) qui débute aujourd'hui.

Cineuropa : Les deux années de pandémie ont-elles eu des conséquences sur les tournages autour du bassin méditerranéen et sur le volume de films qui vous ont été proposés ?
Christophe Leparc : C’est difficile de faire une analyse très précise, mais ce qui est sûr c’est que le système de coproduction avec la France ne s’est pas arrêté et a essaimé quelque chose de positif au niveau de la production et de la capacité à passer le cap, en tous cas en termes de financement. Cette année, nous avons notamment des films de Tunisie, du Liban, du Maroc, etc., et la qualité est là, mais ces films ont réussi à être réalisés parce qu’ils sont coproduits. On retrouve par exemple dans notre compétition de neuf longs métrages de fiction les films qu’on attendait, qui étaient dans les tuyaux, repérés dans les marchés de coproduction. Par ailleurs, nous avons reçu beaucoup plus de courts métrages que d’habitude, 800 contre 600. C’est pareil pour les documentaires et pour les projets qui ont candidaté pour la Bourse d’Aide au développement et pour les nouvelles rencontres professionnelles Cinemed & Aflamuna/Beirut DC : ils sont impressionnants en termes de foisonnement créatif. Il n’y a pas du tout de panne d’inspiration des auteurs. Mais les plateformes comme les Cinemed Meetings deviennent très importantes pour que les projets se concrétisent car dans bon nombre de pays, ces projets ne verraient pas le jour seuls.

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Avez-vous noté des évolutions sur le genre des films ?
Il y a une confirmation : les auteurs ont de plus en plus tendance à ne pas considérer le film de genre comme quelque chose de secondaire, mais au contraire à s’emparer des codes du film de genre pour faire passer leurs messages et raconter leurs histoires. La Dernière reine [+lire aussi :
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interview : Damien Ounouri
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d’Adila Bendimerad et Damien Ounouri en est une parfaite illustration : un film en costumes avec le pirate Barberousse, des combats. C’est pareil avec l’humour de Dirty, Difficult, Dangerous [+lire aussi :
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du Libanais Wissam Charaf ou encore avec le film tunisien Ashkal [+lire aussi :
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de Youssef Chebbi qui commence comme un polar (avec ce couple de policiers enquêtant sur une série d’immolations dans un quartier en construction de Tunis) pour évoquer un peu la situation dix ans après la révolution du printemps arabe. C’est très intéressant de voir cette appropriation des codes du film de genre pour raconter toutes sortes d’histoires dans le bassin méditerranéen.

Vous avez trois invités d’honneur cette années : Icíar Bollaín, Simone Bitton et Abdellatif Kechiche.
Ce sont d’abord des auteurs méditerranéens pur jus, ce qui constitue notre ADN. Icíar Bollaín est une pionnière, ses films portent toujours un regard profond sur la société espagnole et sur ses travers. Avec Ne dis rien [+lire aussi :
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(2003), elle a été l’une des premières à aborder le problème des violences conjugales et son dernier film, Les Repentis [+lire aussi :
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est encore une histoire très viscérale de la société espagnole avec une veuve de policier assassiné par l’ETA qui est contactée par le bourreau emprisonné de son mari qui voudrait renouer un dialogue.

Simone Bitton est une très grande documentariste dont la quarantaine d’années de carrière a balayé de nombreux sujets, de Oum Kalthoum à l’affaire Ben Barka, et qui a beaucoup interrogée sur le conflit israélo-palestinien, notamment avec Mur qui avait été un coup de tonnerre à Cannes en 2004. Son dernier film Ziyara qui parle des cimetières juifs au Maroc est malheureusement sorti en plein pic de Covid l’an dernier et nous voulions absolument le remettre en lumière à sa juste valeur.

Quant à Abdellatif Kechiche, c’est un ami du festival et de la région depuis des années. Il a tourné plusieurs films à Sète, nous avions fait l’avant-première de La graine et le mulet [+lire aussi :
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à l’époque, et son nom est revenu dans beaucoup de conversations avec nos invités précédents qui ont témoigné d’une grande admiration pour lui. Sa filmographie est impeccable avec aussi de multiples récompenses, mais ce qui est également formidable, c’est que pratiquement tous ces films ont révélé des talents incroyables : Adèle Exarchopoulous, Hafsia Herzi, Sara Forestier, Sabrina Ouazani, etc. Il faut dire clairement que c’est l’un des plus grands cinéastes français à l’heure actuelle.

Sur le volet professionnel du festival, les Cinemed Meetings, vous avez ajouté au programme habituel (Bourse d’aide au développement, Du Court au Long, Talents en court, les résidences, les ateliers, etc.) une nouvelle initiative : les rencontres Cinemed & Aflamuna / Beirut DC.
Aflamuna organise déjà le Beirut Cinema Platform et nous avons décidé de nous associer pour être dans une complémentarité de compétences. Ils ont un réseau beaucoup plus développé que le nôtre dans le cinéma arabe en général et une expertise en la matière. Nous, nous avons une capacité à mobiliser des professionnels, tout particulièrement des producteurs, autour des auteurs et des sept projets que Aflamuna a sélectionnés. C’est à l’évidence un cercle vertueux car nous avons reçu encore plus de demandes de venues de professionnels aux Cinemed Meetings cette année dès que ce nouveau programme a été annoncé, car cela étoffe notre offre. Cela nous permet aussi de nous ouvrir aux projets de documentaires.

Les festivals comme le vôtre connaissent actuellement de vrais succès populaires. Mais quid de leur impact sur le retour ensuite en salles des spectateurs pour des séances hors festivals ?
Je crois beaucoup en ce déclenchement d’un acte de retour dans une salle de cinéma parce qu’il y a un côté événementiel. La première nécessité, c’est de faire revenir les spectateurs dans les salles. Si c’est pour un festival, juste parce qu’ils veulent voir les présidents du jury Rachida Brakni et Éric Cantona, c’est bien aussi parce qu’ils se rendront compte ensuite qu’un film, c’est beaucoup mieux de le voir dans une salle de cinéma que devant un petit écran. C’est également important d’associer au festival les salles de cinéma de la ville pour des avant-premières un peu événementielles comme Les Miens [+lire aussi :
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de Roschy Zem par exemple, afin de les insérer dans ce mouvement de retour vers les salles. On peut même parler de Balle perdue 2 de Guillaume Pierret qui a été tourné dans la région, qui sera lancé sur Netflix en novembre et que nous allons projeter : c’est aussi une opportunité de faire venir dans une salle de cinéma des gens qui ne l’auraient pas eu autrement et qui constaterons par eux-mêmes que c’est incomparablement mieux de voir le film sur grand écran. Tout cela participera, j’espère, à ce retour dans les salles, au-delà du festival.

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