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BLACK NIGHTS 2022 Critics' Picks

Mariana Čengel Solčanská et Hana Lasicová • Réalisatrice et scénariste de The Chambermaid

“Les faits historiques sont tous écrits par des hommes ; les femmes sont inexistantes dans ces livres”

par 

- Nous avons rencontré le duo slovaque après la première de leur première collaboration pour en savoir plus sur ce qui leur a inspiré cette histoire

Mariana Čengel Solčanská et Hana Lasicová • Réalisatrice et scénariste de The Chambermaid

Cette année, la section Critics' Pick du Tallinn Black Nights Film Festival a présenté The Chambermaid [+lire aussi :
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fiche film
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, réalisé par Mariana Čengel-Solčanská sur un scénario de Hana Lasicová. Nous avons interrogé la réalisatrice et la scénariste qui ont fait ce film avec une équipe majoritairement féminine sur leurs recherches sur cette période de l'Histoire et sur les messages que véhicule le film pour un public contemporain.

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Cineuropa : Comment avez-vous commencé à travailler sur cette histoire ?
Mariana Čengel Solčanská : Nous avons commencé il y a neuf ans, nous venions de nous rencontrer. J’ai lu le livre de Hana et je trouvais que c’était une très jolie histoire sur une jeune fille dans un monde étrange.

Vous êtes-vous inspirée de personnes existantes en l’écrivant ?
Hana Lasicová : Le récit est fondé sur l’histoire de la nounou de ma mère. Elle est née à la fin du XIXe siècle et elle a vécu 90 ans. Elle ne s’est jamais mariée, et s'est vraiment bien occupée de l’enfant de la famille de son maître. Compte-tenu de sa longévité, elle a aussi été témoin des changements historiques importants qu'a connus son pays.

Avez-vous eu accès à des documents historiques qui vous ont inspirée ?
H.L. : J’ai fait beaucoup de recherches pour le livre, sur la vie quotidienne des servants à l’époque. Les bonnes, enfin n’importe quelle femme en fait, mais surtout les bonnes, étaient dans une position de soumission très nette, mais je me suis rendu compte qu’en fait, toutes ces femmes au statut très bas dans la société avaient malgré tout beaucoup de force, même si elles vivaient beaucoup de choses difficiles. Un grand nombre d’entre elles ont subi des abus sexuels. Pour beaucoup d'entre elles, il était qui plus est impossible de satisfaire leurs besoins physiques avec des hommes comme elles l'entendaient, donc j’en suis venue à la conclusion qu'il était sans doute possible de fréquenter d’autres femmes.

Dans quelle mesure vous rapportez-vous au personnage d'Anka ?
H.L. : Anka est une enfant qui n'est pas aimée, une bâtarde, comme on disait, c'est-à-dire une enfant sans père. Mon histoire est pareille : ma mère était dans la même situation qu'Anka,  elle ne savait pas qui était mon père non plus. Ma grand-mère m’appelait bâtarde aussi. J’ai grandi en pensant que ma mère était une gourgandine, mais après être devenue mère moi-même, j’ai mesuré combien ma mère avait été courageuse de m’avoir toute seule.

Dans le film, vous ne parlez pas du milieu de la mère d’Anka. Vous ne dites pas pourquoi elle s'est retrouvée sans père.
M.Č.S. : Parce que ce n’était pas important pour elle, c’est juste un homme sans importance. De plus, les autres personnages du film traversent différentes expériences qui les mènent à la même situation. Ils représentent plusieurs exemples du même cas.

H.L. : Dans ce monde féminin, qui est le père n’est pas important. Dans le cas de la Petite Miss, nous savons qui sont ses parents, mais ça n'empêche que son vrai parent, c'est Anka, parce qu’elle l'aime. Ce n’est pas une question de sang, mais de sentiments.

Avez-vous opéré des changements, en adaptant le roman pour en faire un film ?
H.L. : Nous n'avons pas changé le message et nous avons conservé tous les personnages, mais il y avait un revirement dans le livre (Anka rencontre un homme et elle a une histoire d’amour avec lui) qu'on n'a pas gardé. Pour le film, nous avons décidé de rester concentrées sur les femmes. On ne voulait pas faire un film sur des sujets queer ou lesbiens, juste un film sur l'amour. Le sexe des personnages n’est pas important.

Pourquoi était-il important pour vous de situer votre histoire dans le passé ?
M.Č.S. : La monarchie austro-hongroise s’est brisée et la Tchécoslovaquie a vu le jour. Alors même que les relations se brisent dans ce foyer, la région se divise en différents pays. Il y a un effet de miroir entre les relations humaines et les événements historiques. En cela, il y a un message valable aujourd’hui : nous ne sommes pas unis en Europe, un État en attaque un autre. La monarchie était un exemple d’unité, on y parlait cinq langues. Il faut souligner aussi que les faits historiques sont tous écrits par des hommes ; les femmes sont inexistantes dans les livres d'Histoire. Leur vie est entièrement articulée autour de la maison et de la société. À vrai dire, c'est elles qui faisaient tout : des enfants, la cuisine. Elles assuraient la vie.

A-t-il été difficile de tourner un film historique à Prague ?
H.L. : Comme nous avions un très petit budget, parce qu'il était difficile de convaincre les organismes de financement, qui sont contrôlés par des hommes, nous avons improvisé de maintes façons. Nous avons eu de la chance de tourner pendant le Covid, car il n'y avait personne dans les rues. Quant aux scènes d'intérieur, nous les avons tournées dans un petit château qui avait déjà des vieux meubles, des quartiers réservés aux domestiques et l'allure authentique d'une demeure de l'époque.

Comment avez-vous trouvé votre actrice principale, qui joue le rôle d'Anka ?
M.Č.S. : Je connaissais Dana Droppová, ayant déjà travaillé avec elle sur un film, et j’étais certaine que c'était elle que je voulais pour The Chambermaid. Elle a le bon look pour ce rôle : toutes les filles d'aujourd’hui sont très minces, mais Anka devait être une fille solide.

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(Traduit de l'anglais)

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