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IFFR 2023 Compétition Tiger

Guido van der Werve • Réalisateur de The Breath of Life

“Le cinéma est une solution à ce que je veux faire : toucher les gens”

par 

- Nous avons interrogé le réalisateur hollandais sur cet autoportrait intime, où on le voit essayer de surmonter une tragédie de la vie

Guido van der Werve • Réalisateur de The Breath of Life

Le Néerlandais Guido van der Werve a présenté en avant-première son documentaire autobiographique The Breath of Life [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Guido van der Werve
fiche film
]
dans le cadre de la compétition Tiger de l'IFFR. Nous avons discuté avec lui de l’accident de vélo qui a changé sa vie, lui a permis d’absorber les traumatismes du passé, et en même temps d’envisager l’avenir. Le réalisateur s’est également livré sur sa manière d’adopter une approche plus universelle sur le sujet, une approche à laquelle le public pourrait s’identifier.

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Cineuropa : Pourriez-vous nous expliquer le titre néerlandais du film, Nummer achttien (soit "Numéro 18") ?
Guido van der Werve : L’explication est toute simple. C’est mon 18e film. Je me suis mis à numéroter mes travaux quand j’ai réalisé mon film de fin d’études. Les mathématiques m’ont toujours intéressé. Le titre n’est donc pas important. Ce sont les sous-titres qui le sont.

Pourquoi avoir voulu faire ce film ? Cela vous a-t-il aidé à accepter ce qui vous est arrivé ?
Mon travail est toujours très personnel, mes films reflètent souvent ce que je suis. Après l’accident, quand j’ai repris connaissance, je me suis demandé ce que j’allais pouvoir faire par la suite. Les gens qui me connaissaient, même professionnellement, ne cessaient de me demander les circonstances de l’accident. C’est ce qui m’a motivé à faire ce film, plutôt que de devoir constamment raconter la même histoire. Pendant ma rééducation, j’ai pris conscience de l’ampleur de ce qui venait de se passer. Les médecins m’ont dit que je devais me réjouir d’avoir survécu, car selon lui, 99 % des gens n’auraient pas eu cette chance dans de telles circonstances. Mon caméraman a commencé à venir me voir au centre de rééducation, fin 2016, et nous avons commencé à tout enregistrer. Alors que je réfléchissais à ce qu’était devenue ma vie, je me suis remémoré de nombreux moments de mon enfance. J’ai ensuite réalisé qu’à cause d’un complexe d’infériorité, j’avais surcompensé tout au long de ma vie. J’assimile les traumatismes de l’enfance dans le film.

Vous avez recours à différents types d’images : des images de documentaires, des scènes de reconstitution et des documents d’archives. Quels ont été les éléments les plus importants de votre concept ?
Il y a dix ans, lorsque mon père est mort, il a laissé de nombreuses images d’archive. Il a tourné de nombreuses vidéos. En les visionnant, je me suis rendu compte qu’il y avait de nombreux parallèles entre sa vie et la mienne. Il était peintre, mais ses toiles n’ont jamais été exposées. Il a donc travaillé toute sa vie comme professeur de dessin. Il a dû se sentir rejeté lui aussi. Intégrer ces archives m’a permis de montrer ces parallèles. Les vidéos en 8 mm de mon père sont ses yeux, les miens sont les nouvelles technologies. Avec les nouvelles images de moi-même et les nouvelles situations, je pouvais, qui plus est, établir un parallèle entre ma première vie, celle d’avant l’accident, et la deuxième, qui a commencé juste après.

N'a-t-il pas été difficile de vous plonger dans vos émotions pour ensuite décider de ce que vous souhaitiez montrer ?
En tant qu’artiste, je suis naturellement égocentrique. Et, la période de la rééducation, où vous êtes le centre d’attention de tout et de tout le monde, n’aide pas. De plus, c’est moi qui ai choisi les acteurs qui allaient nous incarner, ma famille et moi. Mais dès que nous avons obtenu une subvention des Pays-Bas, le point de vue des spectateurs est devenu très important pour moi, il fallait penser à ce à quoi ils allaient pouvoir s’identifier dans le film ? Travailler avec un producteur a été une grande aide. J’ai eu beaucoup de "darlings" à tuer, ces petites choses que je chérissais, mais qui étaient inutiles. Personnellement, je trouvais difficile d’accorder de l’importance à certains détails, mais mon producteur me demandait constamment les raisons pour lesquelles je voulais montrer telle ou telle chose. Nous avons beaucoup discuté.

Convaincre votre famille de participer au projet a-t-il été difficile ?
Ils me connaissent et ont l’habitude mes idées (quelquefois) farfelues. J’ai bénéficié de beaucoup "d’indulgence", après avoir survécu à mon accident. Ce qui comptait c’est que ma mère lise le scénario, parce que celle qui l’incarne ne dit pas que des choses gentilles. Mais ma mère est quelqu’un de réaliste et elle m’a donné toute la liberté dont j’avais besoin.

Selon vous, quelle est la raison qui vous a poussé à faire le film ?
Dès le départ, la musique est la forme artistique qui m’a le plus touché. Même si mon père était plutôt dans l’art visuel, cela n’avait pas le même effet sur moi. Mais ensuite, j’ai essayé le cinéma et je me suis rendu compte qu’il pouvait être la forme qui me correspondait. Le cinéma est une solution à ce que je veux faire : toucher les gens.

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(Traduit de l'anglais par Karine Breysse)

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