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BERLINALE 2023 Panorama

Malene Choi • Réalisatrice de The Quiet Migration

“Cette question de sentiment d’appartenance est capitale, quand on a été adopté”

par 

- BERLINALE 2023 : Dans son nouveau film, qui puise dans sa propre expérience d’enfant adoptée, la réalisatrice danoise d’origine sud-coréenne sait rester subtile

Malene Choi • Réalisatrice de The Quiet Migration

Dans The Quiet Migration [+lire aussi :
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, présenté dans la section Panorama de cette édition de la Berlinale, Malene Choi évoque, avec beaucoup de subtilité, sa propre expérience d’enfant adopté. Née en Corée du Sud, elle a grandi au Danemark. C’est aujourd’hui le lot de Carl (Cornelius Won Riedel-Clausen). Il vit seul dans la ferme familiale avec ses parents (Bjarne Henriksen et Bodil Jørgensen), qui ont déjà décidé de son avenir.

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Certains éléments m’ont surpris sur le film. Tout d’abord, il y a peu d’explications. Tant qu’ils peuvent se garder de le faire, les gens ne parlent pas vraiment.
Malene Choi : Je crois que ça vient de moi. J’aime que les choses soient subtiles, parce que cela les rapproche de la réalité. Prenez Aftersun [+lire aussi :
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de Charlotte Wells, tout était très discret, et cela fait ressortir toutes les nuances.

La vie se contente de suivre son cours. Il est ici question du lien difficile qui se forme dans une famille adoptive. Parfois, parler des choses les plus importantes peut être difficile. Vous craignez de finir par entendre : "Moi, je ne vous aime pas en tant que parents et nous, nous ne t'aimons pas en tant qu'enfant". La plupart des gens savent que le racisme est abject. Mais que se passe-t-il lorsqu’il touche une famille adoptive ? Comment le gérer ? Cette question vient de mon propre vécu. Je ne savais pas comment le gérer et eux non plus. Et puis, les gens parlent peu à la campagne. Après avoir vu le film, certains m’ont dit que s’ils ne disaient pas grand-chose, c’est parce qu’ils se connaissaient déjà.

Lorsque vous êtes là, au milieu de nulle part, et que vous ne ressemblez à personne, la situation est presque comique.
C’est vraiment ce que j’ai essayé de traduire à l’écran, en espérant y parvenir. Le voir là, si fragile… cela semble absurde. Cornelius n’est pas un acteur professionnel, il se contente d’être lui-même. Je viens de l’univers documentaire, je voulais donc retrouver des éléments de cet univers dans le film. Il a l’air si petit debout à côté des vaches. Ou même à côté de Bjarne et Bodil, qui sont si danois. Je suppose que la comédie nait de la réunion de ce qui s’oppose. Cela fait rire, tout simplement.

Il imagine d’autres personnes assises à côté de lui ou de ses parents quelquefois. Pourquoi avoir voulu ajouter ces scènes, qui relèvent davantage du fantastique ?
Lorsque quelqu’un compte beaucoup pour vous, vous l’emmenez avec vous. Vous y pensez constamment. Lorsque je suis retournée en Corée, j’ai rencontré de nombreux enfants adoptés et leurs histoires ont eu un impact considérable sur moi. Pendant près de 10 ans, ils ne m’ont pas quittée, même si je savais que je ne les reverrais plus. Pour Carl, c’est la première fois qu’il rencontre une autre asiatique dans le coin. Elle comprend parfaitement son chagrin. Lorsque vous arrivez à établir un tel lien avec une autre personne, sans avoir à dire un seul mot, c’est quelque chose que vous ne voulez pas oublier.

Beaucoup de personnes adoptées, ou nées dans un autre pays, ont du mal avec la notion d’appartenance. Ils se demandent si les choses seraient plus simples s’ils repartaient dans leur pays d’origine.
Cette question de sentiment d’appartenance est capitale, quand on a été adopté. Il y a du chagrin, de la peine, mais ces sentiments sont indéfinissables. Je ne pense pas que Carl soit conscient d’être déraciné. Cela fait partie de ces choses sur lesquelles vous n’arrivez pas à mettre le doigt. Il y a tellement de sentiments mêlés. Mais je voulais l’intégrer dans ce film et dans son état d’esprit, parce que c’est ce que l’on ressent.

Le mystère au cinéma vous intéresse-t-il ? Il y a des secrets dans votre film aussi, et vous ne les révélez pas tout de suite.
C’est quelque chose qui m’intéresse énormément. Je suis une grande fan d’Apichatpong Weerasethakul et il laisse de nombreux vides dans ses récits. À ce jour, je ne sais toujours pas de quoi il est question dans Oncle Boonmee (celui qui se souvient de ses vies antérieures [+lire aussi :
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. Mais ça me donne juste envie de le revoir.

Dans la vie, certaines choses restent inexpliquées. Pour d’autres, il faut lentement retirer quelques couches pour accéder à l’essentiel. Parfois, on ne peut pas avoir toutes les réponses, et vous savez quoi ? Il faut faire avec. Ou bien il faut inventer vos propres histoires pour combler les lacunes.

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(Traduit de l'anglais par Karine Breysse)

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