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BERLINALE 2023 Generation

Sonja Heiss • Réalisatrice de When Will It Be Again Like It Never Was Before

“La vraie question est : c’est quoi, normal ?”

par 

- BERLINALE 2023 : Le film de la réalisatrice allemande, qui couvre plusieurs décennies, prouve que quand les choses se compliquent, autant… s’asseoir sur une machine à laver

Sonja Heiss • Réalisatrice de When Will It Be Again Like It Never Was Before

Joachim est probablement le seul enfant qui considère une clinique psychiatrique comme son chez lui. Son père y travaille, mais dans son foyer, les choses ne sont pas beaucoup plus calmes. Dans When Will It Be Again Like It Never Was Before [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Sonja Heiss
fiche film
]
, projeté dans la section Generation 14plus de la Berlinale, Sonja Heiss regarde en direction du passé et le montre tel qu'il a toujours été : imparfait.

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Cineuropa : Je ne pense pas avoir jamais vu un film destiné au jeune public qui se situe dans un tel endroit.
Sonja Heiss : Quand j’ai lu le roman, c’est en partie pour cette raison que j’ai voulu en faire un film. Est-ce que vous pouvez imaginer ça : grandir dans une clinique psychiatrique dans les années 1970 et 1980 ? Et ce n'est même pas le seul enfant qui ait vécu ça. Pendant mes recherches, j’ai rencontré une psychologue qui a grandi en RDA, dans un endroit très similaire. C’était normal, pour les gens qui tenaient ces cliniques, de vivre sur place.

Je me suis demandé si être entouré par tant de gens différents vous rend plus ouvert aux autres, ou plus tolérant.
La vraie question c’est : que veut dire "normal" ? Il y a des tas de problèmes au sein de cette famille aussi : ils ne sont pas plus "normaux" que les patients. Parfois, Joachim se sent plus en sécurité avec eux qu'avec ses frères ou ses parents.

À chaque fois que quelqu’un entreprend d'ancrer un récit dans une période historique antérieure, le risque existe d’être trop nostalgique. Était-il important pour vous de rester réaliste, par exemple sur la manière dont cette famille fonctionne ?
Visuellement, ça reste très atmosphérique. Il y a des chansons formidables, donc il y a de la beauté là-dedans, mais aussi beaucoup de douleur et de tristesse. C'est peut-être typiquement allemand pour moi de dire ça, mais nous craignons le kitsch. Nous ne sommes pas extrêmement nostalgiques. Et puis les années 1970 peuvent être très piège, avec les pattes d'eph et toutes ces nuances de marrons. Quand on a commencé, je me suis dit : "Mon dieu, on dirait une fête déguisée, je n’écoute même pas mes acteurs !". Je voulais être être certaine de ne pas exagérer, parce que dès qu'on le fait, personne ne peut plus prendre l'histoire au sérieux.

Vous êtes attentive aux petites choses. Elles ne font pas nécessairement avancer l'histoire, mais elles disent quelque chose sur cette famille, surtout la scène sur le bateau.
Le roman [de Joachim Meyerhoff] repose beaucoup sur les anecdotes, et le tout tient ensemble grâce à un fil rouge qui est plus intellectuel. J’ai dû trouver ces petits points d'accroche moi aussi. L’examen de voile est une scène amusante, mais je l’ai utilisée pour montrer que ce mariage est mal-en-point. Au début, le père se moque de sa femme parce qu'elle n'a pas assez révisé, puis il perd lui-même les pédales. Elle dit : "Tu peux être un exemple pour tes enfants, leur montrer que tu peux échouer et puis réessayer". Il dit qu’on peut aussi décider de ne pas échouer. "Mais tu as échoué, aujourd’hui", répond la mère.

L'histoire continue et continue, sur des années des années. Étiez-vous préoccupée par ces sauts dans le temps ?
J’ai beaucoup pensé aux transitions. Cette histoire n'est touchante que quand on voit la fin : elle vous fait penser à votre propre vie et à votre propre famille. Mais ce n'était pas évident : Joachim est incarné par trois acteurs différents, et ses frères aussi. Je savais que je ne pourrais pas trouver des garçons qui se ressemblent parfaitement, c’était une question de charisme.

Vous abordez aussi ici un sujet très actuel : la santé mentale. Quelle en a été votre approche ?
Je voulais montrer qu’ils vivent avec les patients. Ensuite cette fille rejoint l'établissement, et quand ils discutent du fait qu'elle a essayé de se suicider, Joachim semble le prendre de manière très "cool" : il accepte sa maladie, et tombe amoureux. Je voulais montrer qu’on ne peut être réduit à sa maladie. Lui, en tout cas, le voit.

Dans mon film précédent [Hedi Schneider Is Stuck [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Sonja Heiss
fiche film
]
], l'héroïne a des accès de panique et souffre de dépression. J’ai dit publiquement que j’avais aussi souffert de dépression. C'était assez nouveau, que quelqu’un en parle sans craindre d'être pris pour un fou/une folle. À présent, beaucoup de personnes en parlent ouvertement. Avant, les gens se seraient inquiétés : "Si elle est dépressive, peut-être n'est-elle pas capable de faire un film".

Je suppose qu’on se rend compte petit à petit que les gens peuvent être beaucoup de choses en même temps. Ça vaut aussi pour le père de Joachim. On pourrait facilement le percevoir comme un méchant, mais vous lui laissez sa chance.
C’est une autre époque aussi : les hommes étaient différents, à l'époque. Plus tard, quand le film prend un tour plus tragique, ça ne vous toucherait pas si on pouvait se contenter de se dire que c'est un idiot. Il fait des erreurs, beaucoup d'erreurs, mais il a aussi un bon côté. Comme nous tous.

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(Traduit de l'anglais)

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