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CANNES 2023 Cannes Première

Amat Escalante • Réalisateur de Perdidos en la noche

“L'idée de ce film est qu'on fait tous partie du problème”

par 

- CANNES 2023 : Le réalisateur mexicain encensé revient avec une histoire sombre pleine de secrets enfouis

Amat Escalante  • Réalisateur de Perdidos en la noche
(© Óscar Fernández Orengo)

De retour au Festival de Cannes dix ans après avoir y remporté le prix de mise en scène pour Heli [+lire aussi :
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, Amat Escalante présente cette année Perdidos en la noche [+lire aussi :
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interview : Amat Escalante
fiche film
]
dans la section Cannes Première. Il s’agit d’une histoire sombre de personnes disparues, autour d’une riche famille d'artistes avec des secrets inconfortables, confortablement enfouis. Le cinéaste mexicain encensé nous a rencontrés et il a généreusement formulé pour nous quelques pensées sur différents sujets, y compris sur les amitiés créatives entre les cinéastes de son pays et sur des maîtres absolus, comme Dostoïevski et Fassbinder.

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Cineuropa : Vous abordez ici différents thèmes : la violence, les arts, mais aussi peut-être la politique ?
Amat Escalante :
J’aimerais appeler le film social, mais je suppose qu’on peut l’appeler politique pour la critique qu'il contient sur certains systèmes qui fonctionnent très bien pour une partie des gens, mais pas pour d’autres, du moins dans un pays comme le Mexique. Je voulais montrer ceci à travers cette famille de célébrités dont on ne penserait pas qu’elle fait partie du problème. L’idée de ce film est qu’on fait tous partie du problème, en fait. Tout espoir de changement est mince, malgré le fait que le président actuel ait promis de mettre fin à toute corruption au Mexique dès qu’il serait élu. À l'évidence, pour le moment, il ne l’a pas fait.

Vous intégrez aussi à l'intrigue les réseaux sociaux : le père artiste et sa fille adulte, elle-même influenceuse, montrent tous deux leur travail à travers ces canaux – l'exploitent, même ?
Je voulais aborder certains thèmes nouveaux qui m'attiraient et les interactions qui se font désormais via les réseaux sociaux. Le lieu précis où se passe cette histoire, Guanajuato, au milieu du Mexique, est violent et souvent affecté par des tragédies. J’ai été attiré par cette idée de quelqu’un qui se sert de la tragédie comme source d'inspiration pour ses créations artistiques et qui, ayant de son côté l’argent et le temps, devient aussi celui qui a l'opportunité de raconter l’histoire de la victime. Je ne juge pas, je dis juste que c’est comme ça. Dostoïevski, que je cite au début du film, a écrit sur des gens dans des situations très difficiles, des gens qu'il connaissait, j'en suis convaincu, mais c'est lui qui est devenu célèbre. C’est une question complexe.

Parmi les personnages complexes qu’on a l’occasion de rencontrer dans le film figure aussi la maison de la famille centrale, qui joue un rôle extrêmement concret dans l'histoire. C’est un sacré spécimen d’architecture. Pouvez-vous nous parler de sa création ?
Ce fut certainement tout un projet. C’est un décor qui a été financé grâce à une bourse qu’on a obtenue de l’état de Guanajuato, qu’on devait utiliser en un an. La maison n'a pas l'électricité, ni de plomberie, mais nous avons été en mesure de la concevoir de manière à ce que la caméra puisse évoluer librement grâce des murs et fenêtres amovibles. Nous avons été inspirés par l’expressionnisme allemand et Rainer Werner Fassbinder – la cheffe décoratrice Daniela Schneider sommes de grands fans. Nous pensons souvent à lui quand nous dessinons nos décors. Le genre de mélodrame qu'il pratique me plaît aussi tout spécialement pour son immédiateté, sa crudité et son humour.

Suivez-vous et interagissez-vous avec vos collègues, dans votre pays ? Le cinéma mexicain est assez célèbre, aujourd’hui, pour le soutien mutuel qui y existe entre réalisateurs, notamment Guillermo del Toro, Alejandro Iñárritu et Alfonso Cuarón, dits "les trois amis". Faites-vous partie de ce genre de cercle ?
Oui. Avec Michel Franco, Alejandra Marquez, Alonso Ruizpalacios, Natalia López…, nous échangeons régulièrement, en essayant de nous aider entre nous. Plutôt que de chercher à régner seuls, nous sommes unis. J'ai moi-même bénéficié de grandes générosités, à commencer par celle de Carlos Reygadas. Quand je venais de commencer, il était à Cannes avec Japón, et je lui ai écrit, comme ça, sans le connaître, et il a répondu et m’a proposé sa caméra ! Il a aussi fini par produire mon premier film. Nous sommes dans une nouvelle ère, ici au Mexique. Avant, il était difficile d’entrer dans cette industrie sans avoir un parent, un oncle ou quelqu'un pour vous y introduire. Mais ces deux dernières décennies, les choses se sont mises à changer, et je suis convaincu que "les trois amis" y sont pour quelque chose.

Travaillez-vous déjà sur un prochain projet ?
Pas encore. J'ai peut-être envie de faire un film international, en anglais, ou en Europe, ce serait bien. Peut-être un film dans le style de Fassbinder, en allemand...

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(Traduit de l'anglais)

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