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VENISE 2023 Orizzonti

Selman Nacar • Réalisateur de Hesitation Wound

“Je trouve intéressants les personnages qui sont coincés entre différentes émotions, car je pense que la Turquie est dans une situation similaire”

par 

- VENISE 2023 : Le réalisateur turc montant détaille pour nous son nouveau film, qui est à parts égales un drame judiciaire et une étude de personnage

Selman Nacar  • Réalisateur de Hesitation Wound

Musa (Oğulcan Arman Uslu) est accusé d’avoir tué son ancien patron à l'usine : des images captées par les caméras de surveillance où on le voit quitter les lieux en sont présentées comme la preuve indirecte. Canan (Tülin Ozen) est la seule avocate disposée à le défendre. Dans les temps morts du procès, elle dorlote sa mère mourante à l’hôpital.

Le deuxième long-métrage de Selman Nacar, Hesitation Wound [+lire aussi :
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]
, qui a fait sa première mondiale à Venise dans la section Orizzonti, a pour pivot ce précipice qui sépare vie privée et vie publique. Le film dessine un univers très authentique, puis dévoile progressivement l’âme de ses personnages. Nacar, qui a lui-même fait des études de droit, nous en dit plus.

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Cineuropa : D’où est venue l’idée de départ de Hesitation Wound ?
Selman Nacar : J’ai étudié le droit – j'ai toujours trouvé intéressantes les questions de moralité et d’éthique. Cela dit, quand j’écris une histoire, je pars toujours du personnage. En l'espèce, nous avons un personnage central d'avocate prise en sandwich entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle, ses besoins et ses attentes. Je voulais la mettre au centre et ensuite la montrer dans ses relations avec plusieurs hommes différents, et ce dans le contexte d’une petite ville. Je me posais des questions sur la justice ; je me demandais à quel point on peut défendre quelqu’un.

Comment avez-vous choisi les acteurs qui jouent Canan et Musa et comment avez-vous développé ces personnages avec les acteurs ?
J’ai fait passer beaucoup d'auditions, surtout pour le personnage de Canan, mais quand j’ai rencontré Tülin [Özen], sa perspective m’a vraiment touché. Nous avons travaillé presque toute une année à observer ce qui se passe dans un tribunal, comment un avocat se conduit, comment il ou elle marche et parle, mais comme l'accent est sur la vie personnelle de Canan, il fallait que nous lui créions une personnalité cohérente.

Pour Musa, l’accusé, Oğulcan Arman Uslu avait clairement très bien compris le personnage. Bien sûr, il est en prison, mais quand on pense à ce genre de personne, on a à l'esprit des stéréotypes que nous voulions éviter. Il y a un quartier où nous avons tourné où vivent des gens de ce type, disons. Arman a passé du temps là-bas en immersion.

En plus de parler de crime et de châtiment, vos deux films [celui-ci et Between Two Dawns [+lire aussi :
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]
] usent également tous deux d'une usine comme lieu clef de l'intrigue, et s'articulent autour des dangers et des morts qui peuvent survenir dans cet espace.
Quand on parle de justice, la différence de classe compte beaucoup. Dans les deux films, je voulais choisir des personnages de milieux économiques et culturels différents et essayer de réfléchir sur la manière dont ça les rend différents, dans leur comportement, leurs réactions, enfin tout. Et je ne voulais pas le faire de manière cliché. L'usine est vraiment un lieu important pour montrer cette différence, visuellement.

On est aussi frappé par la symétrie visuelle et structurelle des deux films, jusque dans le choix des plans.
Quand j'écris une histoire, elle ne vient pas toujours de ma pensée analytique : c’est intuitif. Ceci étant dit, je trouve intéressants les personnages qui sont coincés entre différentes émotions parce que je crois que la Turquie est dans une situation similaire. Ce n’est pas l'Europe, et ce n’est pas non plus le Moyen-Orient : elle est vraiment au milieu. Dans Between Two Dawns, je voulais commencer le film à l'usine pour souligner son rôle dans l'intrigue. Les images blanches de l'usine montrent un endroit qui fournit des emplois à de nombreux travailleurs, mais à la fin, je voulais terminer sur des gros plans les présentant presque, visuellement, comme des monstres.

Les machines continuent de tourner sans jamais s'arrêter. La vie continue, même quand on meurt. Pour Hesitation Wound, j’ai choisi le dernier plan très soigneusement : on voit la ville, tout comme au début quand Musa est amené au tribunal. Ça parle aussi du système lui-même ; il y a des détails et des nuances dans le film qui montrent que ce système est en fait en train de s’écrouler.

On est en train de vivre une renaissance du drame judiciaire traditionnel – on peut citer ne serait-ce qu'Anatomie d'une chute [+lire aussi :
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]
, qui a gagné la Palme d’or cette année. Qu’est-ce qui vous a attiré dans le cadre du tribunal et les conventions cinématographiques qui vont avec ?
Pour être honnête, je ne me suis jamais dit que je cherchais à faire un drame judiciaire ou à travailler spécifiquement sur ce genre. Je n’avais même pas entendu parler de certains de ces films récents. Dans un pays comme la Turquie, les tribunaux et la procédure judiciaire font partie du quotidien. Dans d’autres pays, les gens n'ont pas besoin de penser autant à l’économie ou à la justice ou ce genre de choses, et en tant que personne qui a conscience de ce qui se passe autour de moi, j’ai été affecté par d'autres choses qui se sont produites ces dernières années.

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(Traduit de l'anglais)

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