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VENISE 2023 Semaine internationale de la critique

Moin Hussain • Réalisateur de Sky Peals

“Je voyais ça comme un road movie où personne n'allait nulle part”

par 

- VENISE 2023 : Le scénariste-réalisateur londonien nous parle de l'association du banal et du fantastique qu'il opère dans son film

Moin Hussain • Réalisateur de Sky Peals

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interview : Moin Hussain
fiche film
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, présenté à la Semaine internationale de la critique de Venise, Adam (Faraz Ayub) travaille de nuit dans une station-service. Il est solitaire et déjà habitué à cela, jusqu’à ce qu’il apprenne que son père démissionnaire (un homme convaincu qu’il n’était pas humain) vient de mourir. Nous avons interrogé le réalisateur Moin Hussain sur ce film.

Cineuropa : Vous semblez faire primer la gentillesse, du moins chez vos personnages, alors que la tendance générale est plutôt de faire l'inverse – il y a beaucoup de films sur des tueurs en série à Venise cette année.
Moin Hussain : Tout a commencé avec ce personnage. D’une certaine manière, c’est un enfant. Je vois le film comme un récit d'apprentissage, même si c’est a priori un peu tard pour lui. Il y a quelque chose d’innocent chez lui, je trouve. On a souvent l’impression que le cinéma ne s’intéresse qu’à des personnages moralement ambigus, et je suppose qu’on l'est tous, mais je voulais faire un film sur la connexion et la solitude.

Il y a des scènes où au niveau sonore, on a l’impression que le personnage est sous l'eau. Il se noie. Pourquoi avez-vous voulu jouer sur le son comme ça ?
Je m'intéresse particulièrement au son et à la musique, et en soi, cet homme ne laisse pas vraiment transparaître ses émotions. Il n’est pas particulièrement émotif, alors il fallait trouver une autre manière de faire en sorte que le public entre dans sa tête. Je veux dire, c'est l'histoire d'un type qui croit qu'il est extraterrestre : c’est absurde, et je ne cherchais pas à m'en cacher. Au public de décider ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas, mais je voulais que ce soit vrai pour lui, d'une certaine manière.

Il est en deuil, mais il a aussi besoin de surmonter cela pour grandir. À un moment, il n'est pas loin d'abandonner.
Il y a des moments où l'on se met à réfléchir à qui on est vraiment. La décision qu’il doit prendre, tout au long du film, c'est s'il veut être avec les autres ou tout seul, ce qui semble beaucoup plus facile, évidemment. Pendant le casting, ça parlait beaucoup d'un personnage dans le début de sa vingtaine, mais je savais qu’il fallait qu'il soit plus vieux, qu'il ait une trentaine d'années, parce que je connais des gens comme ça. Ça me paraissait plus authentique.

Est-ce que vous vous intéressez à ce qu’on appelle les gens "invisibles", même si je n’aime pas cette expression, c'est-à-dire aux gens à qui on a dit que ce n’était pas la peine de rêver ?
Je suis attiré par la banalité vérifier je suppose : dans les décors, les environnements... J'aime les gens qui donnent l'impression, du moins pour le monde extérieur, de mener des vies "ordinaires". Je ne me verrais pas faire un film sur un célèbre écrivain ou un cinéaste. J’aime les histoires qui s'articulent autour de la disparité entre le banal et le fantastique, j'aime quand l'un déteint sur l'autre. Dans mes courts-métrages, je jouais beaucoup de ça aussi. Parfois, quand on essaie de mettre des choses ensemble, comme ça pour voir, ça ne marche pas, mais pour moi, ce long-métrage est un film de science-fiction et un film dramatique.

Et cette station-service ? Elle dégage quelque chose de magique. J'ai travaillé dans une station-essence, et ce n'était pas toujours magique, mais le lieu me faisait vraiment l’effet d’un vaisseau spatial. Toute cette obscurité au-dehors, cet isolement, et ces lumières très blanches à l'intérieur. On se met à rêvasser, on imagine qu’on est ailleurs. C’est ce qui m’est venu en premier : ce lieu. Pendant longtemps, j'avais déjà en tête cet univers, il était prêt, mais je n’avais pas de personnage. Je regardais ma montre toutes les deux secondes, comme impatient qu'il arrive.

Adam se met finalement à interagir avec d’autres personnes. C’est comme un road movie composé de petites rencontres.
Je suis ravi que le film ait évoqué ça pour vous. Je le voyais moi-même comme un road movie où personne ne va nulle part, en réalité. D’autres gens passent devant lui, mais il reste dans cet endroit, il est toujours dans un entre-deux. Ce n’est pas qu’il ne veut pas se connecter, mais c’est difficile, et il est sur le point de renoncer. La mort de son père déclenche pour lui une série d’événements, et il se met à sortir de la petite boîte dans laquelle il vit. On pourrait dire que ces rencontres sont insignifiantes et géographiquement, il reste où il était, mais tout a changé.

(Traduit de l'anglais)

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