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SOUTH SERIES 2023

Xavier Giannoli • Co-réalisateur de D’argent et de sang

“Ce ne sont pas les faits qui m'intéressent, mais leurs ombres”

par 

- L'auteur des Illusions perdues co-signe avec Frédéric Planchon cette série interprétée pa avec Vincent Lindon et tirée du livre éponyme du journaliste Fabrice Arfi

Xavier Giannoli  • Co-réalisateur de D’argent et de sang

Le cinéaste français Xavier Giannoli était cette semaine à Cadix pour présenter à son nouvel événement, le South International Series Festival, après sa première mondiale à Venise, la série D’argent et de sang [+lire aussi :
interview : Xavier Giannoli
fiche série
]
, inspirée d’un livre d’enquête du journaliste Fabrice Arfi, coréalisée avec Frédéric Planchon et interprétée notamment par Vincent Lindon, Niels Schneider, Ramzy Bedia et Olga Kurylenko.

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Cineuropa : Que présente le premier épisode, projeté ici à Cadix ?
Xavier Giannoli :
La série, qui comprend 12 chapitres, débute sur un détail à partir duquel commence une enquête, comme dans un thriller, qui fait le jour sur une histoire colossale : celle de quelques petits escrocs qui ont volé 5000 millions d’euros en six mois.

Qu’est-ce qui vous a attiré dans cette affaire réelle ?
C’est la plus grosse escroquerie de tous les temps. Personne ne savait ni ne veut savoir aujourd’hui, surtout le gouvernement, combien d’argent a été volé. Il y avait un mystère : comment des escrocs à la petite semaine sont-ils parvenus à voler autant d’argent et pourquoi ça nous interpelle ? Qu’est-ce que ça nous dit sur une certaine situation dans le monde de la politique, sur le combat contre la pollution, sur la cupidité, sur le capitalisme et, surtout, sur la nature humaine.

Ces petits voleurs se sont donc insinués à travers les brèches du système ?
Ce n’était pas des brèches, mais tout un ravin. Le gouvernement, après cette fraude, a demandé un rapport pour comprendre ce qui s’était passé, mais c'est comme si le marché de la taxe carbone avait été un champ financier libre de toute forme de surveillance.

L’écologie, qu’on considère désormais comme quelque chose de sacré, est ici utilisée à des fins matérielles. Quelle terrible contradiction !
Ça me plaît que vous utilisiez le mot "sacré" parce que même si c'est un policier qui mène l’enquête et qu'il ne s’appuie pas pour ce faire sur la Torah ou la Bible, mais sur le code pénal, c’est un homme paré d'une certaine dignité qui s'interroge sur les valeurs qui nous restent encore et auxquelles on peut encore croire. C’est quelqu’un qui est en quête du bien et du mal, y compris de la dimension sociale et religieuse de ces idées.

Ce tableau social n'est pas sans lien avec votre film précédent, Les Illusions perdues [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Xavier Giannoli
fiche film
]
?
Oui, une phrase du film se retrouve dans le premier épisode de D’argent et de sang : "le libéralisme économique, c'est la liberté du renard libre dans un poulailler libre". Quand j’ai lu des articles sur cette affaire de fraude à la taxe carbone dans les journaux, ils parlaient de mafia du carbone, or Le Parrain, tiré du livre de Mario Puzo, est le film par excellence sur la mafia. En étudiant l’obsession de la cupidité et de l'argent, on découvre quelque chose sur l'âme humaine, car elle met à l’épreuve les plus belles valeurs familiales, sociales, politiques et écologiques... face à une obsession mortifère pour le profit.

Donc dans le contexte de ce néolibéralisme/capitalisme rampant, il ne reste rien de sacré ?
Rien, seul compte le profit, mais attention, je ne suis pas du tout antilibéral : ce qui m'angoisse, c’est que quelque chose dans la nature humaine finit souvent par abîmer les choses les plus belles, comme les forêts. Comme on le voit au début du chef-d’œuvre de Martin Scorsese Casino, quand Robert De Niro parle de Las Vegas, il dit qu'on nous a offert le paradis et qu'on l'a brisé. Ça me préoccupe. J'éprouve une certaine fascination pour cette décadence et en même temps, je me sens indigné en tant que citoyen.

Vous n’avez pas voulu faire un documentaire sur ces faits réels, mais une fiction. Êtes-vous resté fidèle au livre ou avez-vous changé des choses ?
Les faits en tant que tels ne m'intéressent pas, c'est l'ombre des faits qui m'intéresse. Mon travail comme scénariste et réalisateur est de filmer les effets de ce que pose le livre.

Pourquoi avez-vous choisi de coréaliser cette série et comment vous êtes-vous partagé le travail avec Frédéric Planchon ?
Au début, j’étais seul et je me suis rendu compte que c’était un travail de titan, parce que le tournage allait durer un an. Je n'aurais pu imaginer un autre coréalisateur que lui et de plus, il a un regard extraordinaire.

Tourner une série est-il un travail très différent de celui de faire un film ?
Grâce à StudioCanal, j’ai pu tourner cette série comme si c'était un film, avec mon équipe habituelle, la même que celle des Illusions perdues. Pour moi, ça a été comme tourner un film très long, mais avec des chapitres. De plus, le livre originel était tellement bon qu'il avait naturellement le rythme d’une série. Je l’ai tourné avec le même esprit que quand je fais un film. C’est une série avec une âme.

Est-ce que vous allez continuer à faire des séries ?
Si celle-ci a du succès, peut-être.

(Traduit de l'espagnol)

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