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IFFR 2024 Harbour

Damien Hauser • Réalisateur de After the Long Rains

“Mes films sont meilleurs quand je n'ai pas le contrôle de tout”

par 

- Le réalisateur suisse-kenyan détaille pour nous son troisième long-métrage, dont les personnages sont obligés d'aborder leurs rêves sous l'angle pratique

Damien Hauser • Réalisateur de After the Long Rains
(© V. Cornel)

Aisha veut devenir actrice. À Watamu, au Kenya, ce rêve semble absolument fou – à tout le monde, mais pas à elle. Elle est tellement déterminée qu’elle demande à un pêcheur local de lui apprendre à naviguer en bateau pour être prête, un jour, à se lancer à l'aventure. Nous avons interrogé le réalisateur suisso-kenyan Damien Hauser sur ce film, After the Long Rains [+lire aussi :
critique
interview : Damien Hauser
fiche film
]
, présenté à Rotterdam dans la section Harbour.

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Cineuropa : After the Long Rains fait l'effet d'un film pour enfants mêlé à quelque chose qui fait plus cinéma d'auteur. Pourquoi avez-vous voulu faire ça ?
Damien Hauser : Les films Ghibli m'ont beaucoup inspiré. Ils fonctionnent pour les enfants, et aussi pour les adultes : c’est ce que j’essayais de faire ici. Le retour qu'on m'a fait au début, c'est que cette histoire n’arrivait pas à décider à qui elle se destinait, mais tous ces éléments très cinéma d'auteur viennent tout simplement de moi, je suppose. J’essayais de faire un film pour les enfants, mais qui me plairait aussi. Je ne voulais pas trop simplifier les choses non plus. Les enfants sont futés.

C'est le cas d'Aisha : c’est elle qui raconte sa propre histoire.
La voix off était déjà présente dans la toute première version que j’ai écrite. Peut-être que c’est ça qui trouble certains enfants, parce que je ne montre pas tout, mais les adultes comprennent parfaitement cet élément.

Quand on a des personnages aussi jeunes, c’est difficile de ne pas faire dans le mignon, mais vous évoquez aussi des choses plus tristes. Aisha se demande pourquoi personne ne dit "je t’aime" dans sa famille. Après tout, ils le font dans les films !
Cette réplique est un copié-collé de ma propre vie. Je disais toujours "je t'aime" à mon père, et lui me le disait, mais avec ma mère, c’était différent. Je l’aime tout autant, mais la première fois que je le lui ai dit, elle m'a regardé et elle a répondu : "Qu’est-ce que tu veux ?. [rires]

Elle a grandi au Kenya. Elle est née dans les années 1970, or les parents étaient différents à l'époque. Les enfants étaient censés apprendre à survivre, et vite. Personne ne disait "je t’aime" tout le temps, donc c'est devenu normal, pour elle. Et puis je sentais son affection quand même. Ça ne passe pas par des mots, mais on se le signifie autrement.

Un autre aspect qui fait que le film fait assez adulte, c’est la musique. Elle fait presque penser au mélo.
C’est juste que c'est mon style de musique. C’est ce que j’écoute. Je n’avais pas de budget musique, mais mon compositeur, Simon Joss, a pu trouver plus de 50 artistes disposés à participer. Dingue ! J’ai été vraiment ému quand j’ai vu ça. C’est un si petit film : nous avons tourné à Watamu avec nos voisins. Au début, quand je suis allé là-bas, je ne connaissais personne à part ma tante. J'ai l'impression que mes films sont bien meilleurs quand je n'en ai pas énormément le contrôle. J’ai grandi en Suisse : si j’étais arrivé au Kenya avec une vision spécifique, je n’aurais rien découvert de nouveau. J’ai écouté, j’ai parlé aux gens. Et le film final en est beaucoup plus authentique. Dans le scénario, la fille attirait toujours l'attention sur elle, elle était gamine. Et puis j’ai rencontré Electricer Kache Hamisi, et ça a tout changé. Encore une fois, j'ai bien fait de ne pas avoir d’idées préconçues.

Est-ce que c’est utile pour vous, d’avoir ces deux perspectives ? La Suisse est si souvent vue comme une terre de privilèges.
En grandissant en Suisse, j’ai en vu de nombreuses facettes différentes. J’ai vu la richesse, mais aussi les difficultés. Quand je suis allé au Kenya en 2020, pour y vivre six mois, les difficultés n'étaient juste pas les mêmes. Là-bas, les enfants sont forcés de grandir un peu plus vite. Cette fille va à l’école puis rentre chez elle et cuisine, et fait sa lessive, et elle ne se plaint pas. Ce n’est pas un choix : ça fait partie de la vie. J'ai vu ça de près, et je respecte vraiment ça.

Elle veut devenir actrice, à la grande consternation de sa mère. Vos parents ont-ils essayé de vous dissuader de devenir réalisateur ?
J’ai toujours été réalisateur, il n’y avait même pas débat [rires]. Quand j’étais petit, je faisais déjà des films avec mes voisins, comme là, et le style était très similaire. Ça reposait beaucoup sur l’improvisation. Plus tard, à l’école de cinéma, j’ai commencé à travailler de manière normale, plus "professionnelle", pour me rendre compte que je n’aimais pas vraiment ça. Je préfère travailler avec moins de gens. Quand on a un tournage énorme, ce n’est plus aussi personnel.

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(Traduit de l'anglais)

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