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CANNES 2024 Semaine de la Critique

Ava Cahen • Déléguée générale, Semaine de la Critique

"Regarder le monde avec des yeux neufs"

par 

- La déléguée générale de la section parallèle du Festival de Cannes commente sa sélection de cette année

Ava Cahen • Déléguée générale, Semaine de la Critique

Ava Cahen, déléguée générale de la Semaine de la Critique depuis l’an dernier, décrypte pour Cineuropa la sélection 2024 (lire l’article) de la section parallèle dont la 63e édition se déroulera du 15 au 24 mai dans le cadre du 77e Festival de Cannes.

Cineuropa : Comment s’est déroulé le processus de sélection ?
Ava Cahen :
Nous avons dû relever les mêmes défis que lors des éditions précédentes. Le but du jeu est d’explorer le cinéma partout où il se trouve dans le monde. Nous avons donc beaucoup prospecté, en nous rendant dans énormément d’ateliers et de festivals à la rencontre de producteurs, des vendeurs, des distributeurs, mais aussi évidemment des cinéastes. Nous avons reçu davantage de longs métrages que d’habitude, un volume conséquent de 1050. Nous avons constaté comme l’an dernier que l’Asie est très en forme, ce qu’on voit du côté de la Sélection Officielle et de la Quinzaine avec l’Inde alors que chez nous, c’est Taïwan qui est à l’honneur. L’Amérique du Sud est également en forme, notamment avec le Brésil qui fait son retour à la Semaine en compétition. On peut aussi noter que le cinéma du Maghreb se développe et nous avons une attention toute particulière pour le continent africain avec cette année un documentaire égyptien en compétition. Et bien sûr, il y a le cinéma français avec beaucoup de premiers et surtout de deuxièmes longs, un cinéma dont nous voulons montrer toutes les couleurs. Il a fallu équilibrer, jouer avec les cartes qui étaient les nôtres et avec toujours ces défis de représentation, de diversité et une parité à laquelle malheureusement je ne suis pas arrivée cette année. Mon combat à ce niveau continue, mais je suis très contente d’avoir trois réalisatrices dans la sélection, une française, une égyptienne et une américaine.

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Avez-vous relevé des tendances thématiques ?
Par rapport à l’année dernière, elles sont peut-être plus sociales ou sociétales et notre sélection tourne globalement autour des thèmes de l’immigration, de l’intégration, de la discrimination, du sexisme, mais aussi de l’émancipation de femmes. Cependant, c’est par le cinéma qu’on arrive à ces sujets. Nous avons sélectionné des films qui essayent toujours de trouver un peu d’espoir et de lumière dans ce monde d’ultra brutes.

Qu’est-ce qui a motivé vos choix des sept longs en compétition ?
La plupart d’entre eux sont des drames, mais avec des tonalités et des traits de caractères différents. Par la force et les outils du cinéma, ils nous amènent à regarder le monde avec des yeux neufs. Ils représentent des personnages ou des personnes que la société a tendance à invisibiliser. À l’heure où le cinéma argentin est gravement menacé par les restrictions du gouvernement populiste, nous avons un film argentin très singulier, déroutant et profondément humain avec Simon de la montaña de Federico Luis, un film d’apprentissage expérience de cinéma qui nous grandit en interrogeant notre regard sur le handicap. Et il le fait de manière très charnelle et authentique ce qui est un point commun entre tous les films de la compétition, chacun dans sa couleur, du néo-noir taïwanais à la mise en scène virtuose Locust [+lire aussi :
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de Keff au très beau documentaire militant Les Filles du Nil [+lire aussi :
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interview : Nada Riyadh et Ayman El Amir
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de Nada Riyadh et Ayman El Amir sur un groupe de femmes artistes qui veulent vivre leurs vies et leurs rêves sans le consentement des hommes. Je me réjouis aussi qu’il y ait deux films avec une dynamique LGBT en compétition : le mélodrame ultra romanesque brésilien Baby [+lire aussi :
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de Marcelo Caetano et La Pampa [+lire aussi :
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interview : Antoine Chevrollier
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du Français Antoine Chevrollier qui nous a enchanté. D’ailleurs, et c’est le moteur de la Semaine de la Critique, nous mettons cette année non seulement la lumière sur de jeunes cinéastes émergents, mais aussi sur toute une nouvelle génération d’acteurs et d’actrices comme dans La Pampa, mais également dans Les Reines du drame [+lire aussi :
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d’Alexis Langlois qui est en séance spéciale. On découvre aussi un acteur formidable, Ayoub Gretaa, dans La mer au loin [+lire aussi :
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interview : Saïd Hamich Benlarbi
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de Saïd Hamich Benlarbi et dans Les Fantômes [+lire aussi :
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interview : Jonathan Millet
interview : Pauline Seigland
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de Jonathan Millet, on a la confirmation du talent d’Adam Bessa.

Selon le délégué général de la Quinzaine des Cinéastes, un climat de crispation règne, lié à l’influence de plus en plus forte d’une présence à l’affiche cannoise sur la carrière des films. Qu’en pensez-vous ?
Crispation peut-être pas, mais cette année a été plus compétitive car, et Thierry Frémaux l’a dit, il y avait moins de grands auteurs ayant pignon sur rue dont le travail pouvait être exposé en compétition officielle et à Un Certain Regard. Donc cela a musclé l’attention des différentes sélections sur les premiers et les deuxièmes films. Nous avons reçu 1050 longs métrages et l’Officielle, la Quinzaine et l’ACID ont évidemment vu les mêmes films que nous. Il y a forcément des appétits communs, mais en réalité, c’est ensuite plus une question de négociations que de lutte. La question qu’il faut se poser, c’est quelle est la meilleure place pour un film, comment on l’expose de façon lumineuse et tranquille, comment on le couvre aussi d’amour car un premier film, c’est ultra fragile. La maison historique des premiers et des deuxièmes films à Cannes, c’est la Semaine de la Critique. Je compose donc avec tout un tas de contraintes liés d’abord aux 11 places à la Semaine et au désir d’exigence morale et vertueuse de représenter la diversité. Certes, le jeu s’est tendu, mais chaque année est très différente. Ce que je constate, c’est que la sélection reste le fruit de choix. Nous, à la Semaine, nous faisons des paris sur l’avenir, c’est le coeur de notre mission et je crois que nous faisons du bien aux films quand je voie le parcours de réalisatrices comme Charlotte Wells, Emmanuelle Nicot ou Iris Kaltenbäck, ou celui de Vincent doit mourir [+lire aussi :
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interview : Stéphan Castang
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de Stéphan Castang. L’identité du Festival de Cannes est plurielle et le but, c’est d’être à la hauteur de ce qu’est le Festival de Cannes, ce qui n’est pas toujours facile car c’est le plus grand festival du monde. La Semaine n’essaye pas de jouer dans la même cour que l’Officielle et la Quinzaine, mais d’être complémentaire, d’avoir une identité propre et d’être dans la cohérence. Mais s’il y avait un esprit un peu plus collectif, je m’en réjouirais.

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