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CANNES 2024 Quinzaine des Cinéastes

Paulo Carneiro • Réalisateur de Covas do Barroso, chronique d'une lutte collective

“Comme je ne crois de toutes façons pas aux documentaires conventionnels, j'ai commencé à écrire l'histoire comme une fiction”

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- CANNES 2024 : Le cinéaste portugais nous parle de son approche esthétique et de la manière dont il a travaillé avec les personnages de ce travail hybride entre documentaire et fiction

Paulo Carneiro • Réalisateur de Covas do Barroso, chronique d'une lutte collective

Le réalisateur portugais Paulo Carneiro a présenté son nouveau film, un titre hybride à mi-chemin entre documentaire et fiction, à la Quinzaine des Cinéastes de Cannes. Après son premier long-métrage, Bostofrio [+lire aussi :
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, il est retourné dans un village isolé de la même région. Nous l'avons interrogé sur son approche esthétique et la manière dont il a travaillé avec les personnages du film.

Cineuropa : Comment le projet a-t-il commencé ?
Paulo Carneiro : Je connaissais des gens du village, et j’avais déjà entendu des choses sur ce qui se passait là-bas, mais pas beaucoup, à l’époque. En 2020, pendant le confinement, quand tout était fermé, une vidéo sur les derniers développements est devenu virale sur les réseaux sociaux. À cause de sa position isolée et du peu d’habitants qui vivent là, entouré par la nature et les montagnes, l'endroit faisait l’effet d’un espace particulièrement protégé pendant la pandémie. Avec une caméra et mon ingé-son, je suis allé sur place, principalement pour bien tout comprendre, sans avoir une idée précise quant à la réalisation d’un film. J’ai parlé aux gens, dont le maire. Il m’a aidé à comprendre le contexte politique, et j’en ai appris davantage sur les dynamiques de cette communauté.

Comment avez-vous développé le film à partir de là ?
Nous avons commencé à faire des vidéos de ce qui se passait et sur les manifestations, que les gens ont pu partager sur différents réseaux. Pendant que nous filmions ce qui se passait vraiment, j’ai vu combien les gens étaient fragiles. Souvent, ils étaient très tristes et déprimés, mais je voulais avant tout montrer leur force, et comment ils se sont lancés dans ce combat à la David contre Goliath, alors comme je ne crois pas aux documentaires conventionnels de toute façon, j’ai commencé à écrire l’histoire comme une fiction. La caméra représentait une manière d'asseoir leur position, de traduire leur force en images. Il était important de réfléchir à la position que la caméra adoptait ici.

Vous avez évité de présenter des têtes parlantes ou des interviews d'experts ; vous vous êtes vraiment appuyé sur les gens eux-mêmes. Pourriez-vous nous en dire plus sur ce choix ?
Il convient mieux à mon intention de montrer le combat de David contre Goliath. Il est difficile d’avoir une idée précise de ce contre quoi les gens se battent. Ils ne voient jamais les gens qui contrôlent tout cela. Pour moi, faire du cinéma ne consiste pas à aborder les choses comme toutes noires ou blanches, mais plutôt à montrer les zones grises. L’intention était de montrer les gens qui représentent la bureaucratie, mais ceux qui sont au bas de l'échelle, qui font partie du peuple. Tout le monde n'est qu'un petit rouage de la machine.

Il y a quelques éléments, comme la musique et certains aspects visuels, qui donnent au film le caractère d'un conte de fées. Était-ce votre intention ?
Il y a une expression sur la région Covas do Barroso qui la décrit comme un royaume merveilleux. Elle est du célèbre auteur portugais Miguel Torga. Pour moi, ses romans ont fait partie de la création de cet univers, parce que je ne voulais pas faire un film de type National Geographic. La nature et l’émerveillement que suscite cet endroit lui ont donné une sorte de côté conte de fée, mais je ne voulais pas expliquer ce qui est menacé, ou que la nature et les animaux qui vivent là risquent de disparaître. Je voulais me concentrer sur les gens. Par ailleurs, même si je vis autour de Lisbonne, j’ai grandi à la campagne, de sorte que je ne vois pas ce décor comme exotique. Je voulais éviter de le présenter comme exotique dans le film.

Comment avez-vous travaillé avec ces gens, qui n’avaient pas d’expérience devant la caméra ?
Le problème est qu’ils n’avaient pas de temps. Ils devaient travailler. Quand on fait un métier agricole, on ne peut pas s'arrêter – même si je leur avais proposé de les rémunérer pour le temps passé sur le film, ils n'auraient pas pu. Ils se fichent de l'argent. Et ce n’est pas l’idée que j’ai de la réalisation de films. Ainsi, il était fondamental de se préparer vite et bien. Pendant le tournage, ils n’avaient jamais plus d’une heure ou deux à m’accorder d’un seul trait. Ils devaient comprendre la chorégraphie et le cadrage. Je leur ai donné les dialogues juste avant de tourner, pas avant, pour qu’ils ne soient pas anxieux. Les dialogues étaient principalement des textes sur lesquels nous avons travaillé tous ensemble, mais il restait de la place pour l’improvisation.

Quid des financements que vous avez obtenus pour ce film ?
Nous avons juste candidaté pour un soutien à la post-production, mais nous n’avons pas été reçus. Nous avons soumis notre dossier trois ans de suite pour un accès aux financements publics portugais. J’ai été déçu de constater que nous avons été classés très bas. Finalement, nous avons obtenu un peu d'argent des deux conseils régionaux, mais le film a principalement été possible grâce à l’aide que nous avons reçu des amis et de notre communauté.

(Traduit de l'anglais)

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