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BRIFF 2024

Angie Obeid • Réalisatrice de Yalla, Baba!

"Le plus grand défi, c’était d’être à la fois réalisatrice et personnage de mon récit"

par 

- La réalisatrice parle de son documentaire, un road-trip entre Bruxelles et Beyrouth avec son père, voyageant dans l’histoire de leur famille, et de l’Europe et du Moyen-Orient

Angie Obeid  • Réalisatrice de Yalla, Baba!
Angie Obeid et son père Mansour Obeid, avec qui elle partage l’affiche de son film (© Vivien Ghiron/BRIFF)

Rencontre avec la réalisatrice libanaise installée en Belgique Angie Obeid, à propos de son long métrage documentaire Yalla, Baba! [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Angie Obeid
fiche film
]
, présenté en avant-première mondiale et en Compétition Nationale au 7e Brussels International Film Festival. Dans Yalla, Baba!, road-trip documentaire, Angie Obeid refait un voyage en voiture entre Bruxelles et Beyrouth avec son père, que ce dernier a déjà effectué 40 ans auparavant, voyageant dans l’histoire de leur famille, mais aussi de l’Europe et du Moyen-Orient.

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Cineuropa : Qu'est-ce qui vous a donné l'impulsion et l'envie de raconter cette histoire, d’entreprendre ce film et ce voyage ?
Angie Obeid : Ce projet est né presque quand je suis arrivée à Bruxelles pour mes études. Mon père m’avait souvent parlé de ce voyage fait en 1987, le seul grand voyage de sa vie. Il était venu jusqu'en Belgique, où il avait acheté une voiture, pour retourner par la route au Liban. Quand je suis arrivée ici, il a commencé à m'appeler presque tous les jours, ce qui n'était pas très normal entre nous, pour me reparler de ce voyage. J'ai réalisé que chacun de nous connaissions une Europe très différente. J'ai pensé à la carte du continent, aux pays, aux frontières, à tout ce qui avait changé depuis 1987. Comme j’avais besoin de me reconnecter un peu à ma famille, mes racines, je me suis dit que c’était l’occasion idéale.

C'est un voyage dans l'espace, mais aussi un voyage dans le temps ?
Oui, d’autant que ce voyage a eu lieu dans le passé, et que je l’ai vécu au présent, tout en pensant au futur, à ce que cela pourrait apporter à ma relation avec mon père, et à notre vision du monde à tous les deux.

Qu’est-ce que le dispositif du road trip a amené ?
Déjà, c’était très stressant de penser que je devais passer tout ce temps avec mon père, ce qui n’était jamais arrivé ! On a traversé 10 pays, ce qui est aussi stressant en soi. Mais surtout, ce huis clos a fait que l’on ne pouvait pas fuir les conversations. Je comptais également sur les rencontres pour faciliter un peu la discussion entre mon père et moi, et aborder des sujets vers lesquels nous ne serions pas aller naturellement. La confrontation générationnelle était bien sûr au coeur de ce que je voulais aborder.

A un moment, il vous dit "Tu nous aides beaucoup à évoluer" et vous lui répondez "Oui, mais ça me coûte beaucoup". Il y a une certaine violence dans cette confrontation ?
Même s’il y a de l'amour, il y a aussi quelque chose d'assez dur. Il y a des choses que j’ai voulu dire toute ma vie et que je n’avais pas dites jusque-là, pour ne pas le blesser. Je me suis éloignée pour ne pas blesser mes parents. Je ne voulais pas provoquer pour provoquer, je voulais laisser les choses se faire. Ce voyage, c’était aussi le départ d’autre chose, d’une autre relation.

Le film est très intime, mais en même temps, il traverse des territoires qui appartiennent à l'histoire de l'Europe et même du Moyen-Orient.
Toutes ces frontières, toutes les guerres que l'on a vécues depuis 42 ans, dans cette partie du monde, sont au coeur du film et du voyage. Il y a plein d’intersections entre nous Libanais, et de nombreux autres peuples. C’est aussi pour ça que je tenais beaucoup à garder dans le film la rencontre avec ce Zimbabwéen qui a perdu ses papiers quand la Slovénie a pris son indépendance. Ces histoires de papiers, de titres de séjour, de droits, de déplacements, c’est le quotidien de beaucoup de gens. Aujourd'hui, évidemment, il est techniquement plus facile de voyager. Mais obtenir un Visa Schengen, c’est peut-être plus compliqué que quand il fallait multiplier les visas à l’époque. Sans compter que c’est devenu plus dangereux politiquement de s’exprimer sur certains sujets.

Qu’est-ce qui vous tenait le plus à cœur de partager avec ce documentaire très personnel ?
Il s’est passé beaucoup de choses pendant cette année de montage du film. Dernièrement l'attaque sur Gaza, le génocide. Je suis du Sud Liban, où il y a des bombardements actuellement, un territoire qui a été occupé par Israël jusqu'en 2000. Tout ça, c'est aussi mon passé, ça fait partie de mon enfance, de mon adolescence. Au fur et à mesure de ce qui se passait, ça devenait plus urgent pour moi de dire d’où je suis, d’où je viens. C'est une histoire personnelle, sur une relation père/ fille, mais je ne voulais pas que ça en reste là. Ce qui m'intéressait, les conversations que j'ai décidé de garder, c'était les conversations qui pouvaient résonner avec d'autres personnes, d'autres vécus.

Et quel était le plus grand défi ?
Le plus grand défi, pendant le tournage, c’est surement d’être à la fois réalisatrice et personnage de mon récit ! Et puis pendant le montage, il y avait évidemment plein de moments chouettes, mais qui ne servaient pas le film. Il a fallu choisir des moments personnels mais qui résonnent avec un public plus vaste.

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