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LOCARNO 2024 Compétition

Ramon et Silvan Zürcher • Réalisateur et producteur de The Sparrow in the Chimney

"On associe souvent la destruction à quelque chose de négatif, mais parfois c’est nécessaire pour que quelque chose de sain naisse"

par 

- Le duo suisse nous en dit plus sur leur univers artistique, leur passion pour les natures mortes et le cinéma comme moyen d’expérimentation de liens familiaux alternatifs

Ramon et Silvan Zürcher • Réalisateur et producteur de The Sparrow in the Chimney

Cette fois-ci dans des rôles différents : Ramon derrière la caméra et Silvan en production, les frères Zürcher présentent leur troisième long-métrage The Sparrow in the Chimney [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Ramon et Silvan Zürcher
fiche film
]
au Festival de Locarno où il concourt pour le Léopard d’or. Il s’agit d’un film mystérieux et cruel qui réfléchit au caractère artificiel des liens de sang et flirte sans complexes avec les genres cinématographiques.

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Cineuropa : À commencer par leurs titres, vos films semblent poursuivre un dialogue qui s’enrichit d’un film à l’autre. Est-ce que, dans ce sens, on peut parler d’une sorte de trilogie ?
Ramon
 Zürcher : Nous n’avions pas l’intention de faire une trilogie. C’est seulement à la fin des trois films que nous nous sommes aperçus des liens familiaux qui les unissaient, de leurs similitudes. Ce n’est pas tant la présence des animaux mais plutôt le fait qu’ils parlent d’espaces partagés par des familles, que ça soit des familles "de sang" ou des communautés. Ce qui est central dans ces trois narrations sont les aspects psychologiques. Tous parlent du désir de vivre une autre vie. Souvent, les protagonistes vivent dans la nostalgie en rêvant d’une autre vie, comme si cela était possible. C’est cette mélancolie qui remplit le royaume émotionnel des trois films. Nous avons une petite obsession qui traverse tous nos films, celle de ne pas bouger la caméra si ce n’est pas nécessaire et justifié, de ne jamais prendre la caméra à la main pour éviter l’effet d’authenticité, de documentaire. Nous voulons mettre en scène une vie, mais une vie recréée, artificielle.

En parlant de destruction, dans le film les personnages disent tout ce qu’on ne devrait jamais dire lorsqu’on se retrouve en famille. Les dialogues sont très durs, violents, comme si vous vouliez détruire l’image idyllique que la société nous vend de la famille hétéro-patriarcale. Les liens de sang, sont aussi mis à mal au profit d’autres types de rencontre…
R.Z.
: Oui, je partage cette analyse. Est-ce qu’on doit déconstruire le concept de famille pour que quelque chose de nouveau puisse naître ? Dans le film, la violence, les petites et grandes agressions verbales se transforment en marteaux invisibles qui détruisent tout, qui blessent, qui s’en fichent de la politesse pour que de nouvelles familles, dans le sens large du terme, puissent voir le jour. On associe souvent la destruction à quelque chose de négatif, mais parfois il faut déconstruire ce qui est toxiques pour que quelque chose de sain naisse, pour construire des nouveaux espaces. Les cendres, comme dans le cas du phénix, se transforment alors en terre fertile.

Silvan Zürcher : Concernant la violence des mots prononcés par les personnages, comme il ne s’agit pas d’une copie réaliste et fidèle d’une famille nous avons pu créer des dialogues ultra cruels. L’univers du film est très condensé, comme une pièce de théâtre où les micro agressions sont mises sous une loupe et "agrandies" pour que le spectateur les voie différemment. Les contrastes : entre le paradis naturel qui abrite la famille et la noirceur de leurs mots, le chaos et l’ordre, le statique et le mouvement, sont quelque chose de très important pour nous.

Dans vos films, les espaces intérieurs et surtout les objets sont très importants. D’où vient cette fétichisation d’objets inanimés qui, souvent, parlent de la vie intime des personnages ?
R.Z.
: les objets, comme le couteau manipulé par la mère ou le masque d’oiseau de la petite fille, sont présents mais ils ne sont pas mis au centre du film jusqu’au moment où ils réapparaissent et là on les remarque vraiment, de façon consciente, on les associe aux personnages, ce sont des traces de leur univers intime. Le film est divisé en trois chapitres : le matin, l’après-midi et le soir et les objets rythment ces moments, comme des phrases, comme des points et des virgules. Les objets et les animaux, au même titre que les humains, composent des natures mortes. Il s’agit véritablement de natures mortes composées par des objets vivants.

Par moments, nous avons l’impression que le film se transforme en film d’horreur, qu’il tombe dans le surnaturel. Quel rapport entretenez-vous avec les films de genre ?
R.Z. : L’horreur, le thriller psychologique, sont des genres qui se concentrent sur les abîmes, et cela me plait beaucoup. J’aime également les films policiers. En fait, The Sparrow in the Chimney flirte avec les genres, il est fluide, imprévisible. On revient à la question de la déconstruction et de la reconstruction et c’est surtout évident dans la dernière partie du film où l’aspect "film de genre" est le plus présent. Est-ce que Karen est une manipulatrice ou elle est manipulée ? La scène du feu rappelle un peu des films tels que Carrie ou les giallo, le sub-genre haunted house, ou les bunny boiler. Nous aimons jouer avec les éléments, avec les genres, créer des frictions.

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