email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

VENISE 2024 Compétition

Gianni Amelio • Réalisateur de Campo di battaglia

"Je n'ai pas fait un film de guerre, mais un film sur la guerre"

par 

- VENISE 2024: Le réalisateur italien encensé décrypte son film sur l'arrivée de la terrible "grippe espagnole" pendant la dernière année de la Première Guerre mondiale

Gianni Amelio  • Réalisateur de Campo di battaglia
(© Fabrizio de Gennaro/Cineuropa)

Gianni Amelio, en lice à la Mostra de Venise avec Campo di battaglia [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Gianni Amelio
fiche film
]
, nous aide à interpréter son film, dont l’action se déploie pendant la dernière année de la Première Guerre mondiale, dans un hôpital militaire italien proche du front où deux officiers médecins (Alessandro Borghi et Gabriel Montesi) ainsi qu'une infirmière qui est une amie des deux (Francesca Rosellini) se voient obligés de faire des choix moraux difficiles. Mais avec l’arrivée de la terrible "grippe espagnole", pour les docteurs s’ouvre un nouveau front.

Cineuropa : Dans Campo di battaglia, il n’y a pas de tranchées ni de batailles. Vous avez choisi de montrer la guerre sans jamais la montrer ?
Gianni Amelio
: Les images sont désormais usées, et paradoxalement irréelles parce qu’on en voit trop : tous les soirs, la télévision diffuse des images de bombardements, de blessés et de morts, qu'ils soient de Gaza ou d'Ukraine. La salle de cinéma est un temple où l'on entre attentif aux émotions qu'on y reçoit. Je crois qu'il y a plus de guerre ici que dans un film de guerre, parce que c’est un film sur la guerre, ce qui accroît sa force émotionnelle.

Le film, qui se passe en 1918, dialogue-t-il avec le présent ?
D’une certaine manière, tout regard qui se tourne vers le passé est tourné vers le futur. Le film aborde des sentiments qui vont au-delà du temps, des pensées que nous avons eues mille fois et des questions auxquelles nous ne savons toujours pas répondre. Mais un film ne suffit pas à arrêter les guerres, qui procèdent du désir de pouvoir. En guerre, nous le sommes déjà dans la réalité de tous les jours, quelle que soit la position morale de chacun par rapport à ce qui se passe, par exemple, au Moyen-Orient. Le pouvoir vous ordonne de tuer, de massacrer des pauvres gens. Les soldats de la Première Guerre mondiale étaient des gamins de 19 et 20 ans, ils mouraient dans des combats corps à corps et aujourd’hui, c’est la même chose. Dans Campo di battaglia, la guerre continue à l’hôpital et elle secoue les sentiments de deux personnes qui ont des réactions différentes : l'un accomplit son devoir, l’autre s’interroge sur la nécessité de ce devoir et sur la possibilité d’une solution différente.

Il s’agit donc de choix moraux personnels ? Un des médecins en vient à mutiler des soldats pour éviter qu’ils ne retournent mourir sur le front.
Ce film n’est pas une fable réaliste contre la guerre, mais un film utopiste. Tout va dans une seule direction : les guerres font du mal, les victimes sont surtout des innocents, alors de manière utopiste, pour les arrêter, il vaut mieux qu’ils n’aient plus de bras pour prendre des fusils. C’est un paradoxe, certes, mais c'est là-dessus que se fonde la morale du film.

Dans le film, on entend les différents dialectes régionaux parlés par les soldats, qui proviennent de toutes les régions de l’Italie.
J’ai eu trois acteurs merveilleux, Borghi, Montesi et Rosellini, et une foule d'acteurs qui parlent très peu dans le film, juste pour dire une boutade, mais tous me sont restés dans le cœur. Par exemple, le soldat calabrais qui écrit une lettre au prêtre de son village pour lui dire que s'il lui a appris à prier, lui voudrait jurer. J’ai voulu sonder les régions italiennes et j’ai découvert ces interprètes merveilleux, chacun s'exprimant dans sa langue.

(Traduit de l'italien)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Lire aussi

Privacy Policy