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VENISE 2024 Compétition

Athina Rachel Tsangari • Réalisatrice de Harvest

“Chaque étape de l'opération informait le scénario, c'était une manière de continuer de labourer, peu à peu, ce terrain”

par 

- VENISE 2024 : La cinéaste grecque détaille pour nous son nouveau film, qu'on attendait avec impatience depuis un certain temps ; il s'agit d'un récit historique profondément ancré dans le présent

Athina Rachel Tsangari  • Réalisatrice de Harvest
(© Fabrizio de Gennaro/Cineuropa)

Plus de dix ans après la première d’ Attenberg [+lire aussi :
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sur le Lido, la réalisatrice grecque Athina Rachel Tsangari fait son retour en compétition à Venise avec le film en costumes Harvest [+lire aussi :
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, tourné en anglais à partir du roman de l’auteur britannique Jim Crace. Juste après la première du film, Cineuropa a interrogé Tsangari sur le tournage, qui s’est effectué en Écosse, et sur son travail d'écriture, proche, selon elle, d'un travail de labour.

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Cineuropa : Comment vous y êtes-vous prise pour élaborer le scénario de Harvest, votre première adaptation littéraire ?
Athina Rachel Tsangari : Joslyn [Barnes] avait une première version du scénario, après avoir optionné les droits du livre. Nous nous sommes mises à en discuter au début de la pandémie, à travers un ping-pong d'idées, et après deux autres versions du scénario, il était clair qu’elle voulait vraiment que je me l’approprie. En tant que metteuse en scène, je ne peux pas entamer cette phase sans avoir travaillé le scénario, et pour faire cela, j’avais besoin de temps. Au début, ça s'est fait très silencieusement, comme si je l’avais caché quelque part dans l’ombre le temps qu'il mûrisse, qu’il germe, et puis tout est sorti.

Donc vous habitez l'univers du scénario ? Évidemment, en tant que spectateur, c’est facile d’habiter l’univers d’un film, parce qu’il est là pour ça, mais je trouve intéressante la manière dont vous construisez vos univers filmiques, parce que même s’ils sont un peu différents les uns des autres, ils sont toujours faciles d'accès.
C’est intéressant parce qu'on m'a énormément dit, par rapport à Harvest : "Oh, c’est tellement différent du reste de tes films, de Chevalier [+lire aussi :
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, par exemple".

Vous trouvez aussi  ?
Non.

Moi aussi, j'ai le sentiment qu'on vous reconnaît bien dans Harvest.
Pourquoi ?

Pour la facilité avec laquelle on glisse dans ses profondeurs pour bien s'y installer, par exemple.
Vous savez, j’ai eu beaucoup de chance. Rebecca [O’Brien], ma productrice, et moi sommes montées en voiture, pendant la pandémie, en direction de l’ouest de l’Écosse. Nous avons fait un périple intense en écoutant de la musique : je jouais des morceaux pour elle, pour qu’elle comprenne où j’allais avec Harvest, parce que je ne trouvais aucune façon de décrire mon projet avec des mots. Ça a été une étape très belle du travail, et un don du ciel de trouver l'endroit où tourner au bon moment, parce qu’il fallait que ça se passe pendant les moissons. J’ai gardé tous mes souvenirs sensoriels de ce voyage et je les ai ramenés avec moi pour écrire la version suivante du scénario. Chaque étape de l’opération informait le scénario, comme si on continuait de labourer, peu à peu, ce terrain. J’adore ça, je ne sais pas procéder autrement.

La photographie de Sean Price Williams est bien ancrée dans le réel et éthérée à la fois, à parts égales. Son attention à la relation entre les humains et la nature est frappante. Comment décririez-vous votre collaboration ?
Ce n’est pas un langage filmique qu’il a trouvé avec moi, mais je dois dire que nous sommes de formidables partenaires de danse ! En gros, on travaillait ensemble sur cette chorégraphie non-verbale, très intuitive. C’était plein d’amour. Nous nous adorons, et je pense qu’on peut voir l’amour qui est allé là-dedans.

Comment s’est passé le tournage en Écosse ?
Eh bien, la lumière en Écosse est toute de clairs-obscurs, n’est-ce pas ? On ne sait jamais s'il fait clair ou sombre, si le soleil est là ou s’il n’est pas là, s’il pleut ou pas. Il y a là-bas un mystère de l’entre-deux, du seuil, qui était important pour Sean et moi, et pour toute la troupe. Je travaille toujours sur les seuils. Ça peut prendre très longtemps pour qu’on se trouve, comme collaborateurs, que ce soit au casting, devant ou derrière la caméra, mais une fois que c’est fait, c’est magique.

Harvest rend compte d'une fin qui dure et fait allusion à l’arrivée de la modernité. Comment se fait-il que le film ne soit pas particulièrement empreint de nostalgie ?
Le contexte est volontairement large, parce que ça pourrait être la fin du XVIe siècle, mais ça dépend où on est. se place. Je ne voulais pas de préciosité dans le langage. Je voulais un éventail d'idiomes et d'accents, pour aller contre une certaine sorte de pureté. Il est fort probable que nous nous fassions crucifier par les Écossais et les Britanniques [rires], mais cette absence de pureté et cette absence de spécificité était clairement une décision politique.

Vous ne m’avez jamais fait l’effet d’une réalisatrice nostalgique.
Non, mais je n’avais jamais fait de film en costumes avant celui-là… Vous savez, j'ai une nostalgie du présent : c'est le présent qui peut me manquer, jamais le passé ni le futur. Comment être présent ? C’est de cela que parle ce film, et aussi, surtout, de la façon dont on est présent, quand on l'est.

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(Traduit de l'anglais)

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