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SAN SEBASTIAN 2024 Compétition

Pedro Martín-Calero et Isabel Peña • Réalisateur et scénariste de Les Maudites

“Le genre épouvante est un médium très intéressant pour raconter, à travers ce type d'histoires, quelque chose de plus profond”

par 

- Le duo espagnol détaille pour nous l'élaboration du film et évoque comment il entend le genre horreur et sa manière de l'utiliser

Pedro Martín-Calero et Isabel Peña • Réalisateur et scénariste de Les Maudites
(© Dario Caruso/Cineuropa)

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fiche film
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est le premier long-métrage de Pedro Martín-Calero, qu'il a coscénarisé avec Isabel Peña. Le duo nous parle de l’élaboration de ce film, qui a été présenté en compétition au Festival de San Sebastian, ainsi que de leur manière de comprendre et d’utiliser le genre cinéma d'épouvante.

Cineuropa : Le film raconte l’histoire d’une malédiction. Comment a-t-elle surgi et de quoi vouliez-vous parler à travers elle ?
Pedro Martín-Calero :
Il y a un fond que nous avons mis du temps à formuler. Cette malédiction, que je ne sais pas bien comment appeler, renvoie à l'idée que la violence engendre une souffrance qui n’affecte pas seulement les victimes, mais aussi ceux qui les entourent, et que cette souffrance se transmet de génération en génération, si on ne l’arrête pas.

Isabel Peña : Quand nous nous sommes rendu compte de ce que nous voulions dire sur ce sujet, nous avons manié cette notion de malédiction avec beaucoup de respect et de pudeur, parce qu'elle était utile pour raconter notre histoire, mais nous ne voulions pas qu'elle fasse l'effet d'une malédiction de conte de fées (qui se produit de manière magique ou externe), car cette malédiction-là a clairement un responsable.

Le film se divise en trois parties. Comment avez-vous construit le récit ?
P. M.-C. :
Nous voulons fuir certains lieux communs du genre, les renverser et les actualiser, et l'un d'eux était le déroulement du récit, généralement linéaire dans ce type de film.

I.P. : Jouer avec le temps et l’espace nous permettait d’ajouter une strate thématique de plus à cette souffrance et à cette malédiction, et comme, pour nous, c’est plus un film de personnages que d'épouvante, nous avons par ailleurs voulu que chaque personnage ait son chapitre (cela coïncidait avec le langage plus littéraire que nous recherchions), mais tout cela s'est mis en place chemin faisant, au fil de notre travail.

Le film ressemble à un film d’épouvante, mais peut-être plus d'ordre psychologique. En quoi cela vous intéressait-il, d'user des codes du genre, pour raconter une histoire qui va au-delà ?
I.P.
: Nous considérons que le genre horreur est un biais très intéressant justement pour raconter, à travers ce genre d’histoire, quelque chose de plus profond. De la même manière qu'il permet de passer vite, il permet à la fois de projeter et de cacher des choses. Une grande partie des films que nous avons le plus revisités sont des films d’horreur qui parlent de quelque chose qui ne figurait pas dans le synopsis.

Le film évoque la manière dont la violence à l'encontre des femmes se transmet de génération en génération et affecte tout leur entourage. Il parle aussi de la présence de la mort dans la vie. À quelles autres idées souhaitiez-vous arriver ?
P. M.-C. :
Le film parle aussi du regard : jusqu'où on est prêt à regarder, combien on est disposé à voir, où le regard se concentre, quand on regarde d'un côté en particulier ou pas.

I.P. :  Nous avions aussi envie d'évoquer le fait que personne ne croit nos personnages féminins, ce qui génère une immense souffrance supplémentaire. encore encore. Et d'utiliser le monde des technologies et des réseaux sociaux comme canal pour continuer de creuser la solitude et le sentiment d'être des anomalies de ces femmes.

Dans la deuxième partie, vous faites un clin d’œil à Rouge de Kieślowski, et il y a de fait des parallèles entre les deux histoires. Était-ce une référence consciente ?
P. M.-C. :
Au début, nous nous sommes tenus à l'écart des références visuelles pour que le film porte son propre regard, mais quand nous avons commencé à chercher le langage qui correspondait le mieux à ce que nous voulions raconter, la cheffe opératrice Constanza Sandoval est arrivée et, oui, nous en avons parlé et nous avons intégré ce film de Kieślowski. C'est comme une référence inconsciente qui a ensuite jailli d’elle-même.

Le scénario a été écrit à quatre mains, le film est une coproduction entre l’Espagne, la France et l’Argentine. Comment s’est passé ce travail de collaboration ?
I.P. :
Le travail d’écriture a été très long et exigeant. Le scénario a eu beaucoup de versions et nécessité de beaucoup en débattre avec nos associés, car comme nous souhaitions que le sujet reste caché, il y avait une tension constante entre la volonté qu'il constitue un second niveau de lecture (jamais le premier) et le risque qu'il se perde en chemin... Ça a été un scénario complexe et ambitieux.

P. M.-C. : Travailler en coproduction aussi a été difficile, parce qu’on avait là deux continents, deux équipes, et pas assez de budget… Ça a été comme faire deux films en un. Travailler à deux endroits a été un rude challenge, mais il a payé : le niveau d'entente auquel nous sommes parvenus a été merveilleux, ainsi que la manière dont on nous a reçus en Argentine et dont nous nous sommes parfaitement entendus, et le fait de voir à quel point nous sommes tous un peu argentins et espagnols à la fois.

(Traduit de l'espagnol)

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