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IFFR 2025 Bright Future

Mateo Ybarra • Regista di Camp d’été

"J’adore observer les conversations, les échanges entre les gens"

par 

- Le réalisateur nous explique pourquoi il est fasciné par les groupes, par les utopies qui se créent à l’intérieur de communautés éphémères où membres s’éduquent mutuellement

Mateo Ybarra • Regista di Camp d’été

Présenté en première mondiale à l’International Film Festival Rotterdam, dans la section Bright Future, Camp d’été [+lire aussi :
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, premier long métrage du réalisateur suisse Mateo Ybarra nous amène au cœur d’un immense camp scout qui a lieu en Suisse tous les quatorze ans. Nous l’avons rencontré pour discuter de son expérience et de son envie de filmer des échanges en apparence anodins qui se transforment en cinéma du réel.

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Mateo Ybarra :
Je n’ai jamais été scout. Ce n’est pas du tout un univers que je connais ou qui m’est familier, je l’ai découvert à travers le film. L’idée à la base de mon film était celle de découvrir cet univers, de rencontrer ces gens et de retranscrire cela à travers le cinéma. J’aime bien ce processus à double dynamique, de découverte et de retranscription. Cela dit, je voulais aussi poursuivre la réflexion commencée avec mon premier film, sur l’armée suisse, coréalisé avec Raphaël Dubach. Ce film se focalisait autant au niveau de la forme que du contenu sur quelque chose d’assez similaire au camp scout filmé en 2022. Le côté "militaire" du scoutisme se retrouve également dans la biographie du fondateur du mouvement, Robert Baden-Powell, un général qui, fatigué de son expérience au sein de l’armée, décide d’orienter son mouvement naissant vers des valeurs comme la paix et le respect de la nature, tout en gardant un format "militaire", avec des routines, l’uniforme etc. L’univers de l’armée m’avait un peu fatigué mais je voulais quand même poursuivre la réflexion sur ces groupes organisés. De plus, après la période Covid, j’avais envie de filmer quelque chose de solaire, des jeunes qui se rencontrent, des corps qui cohabitent. Il faut aussi savoir que c’est un camp qui se déroule tous les 14 ans donc je ne pouvais pas attendre.

Qu’est-ce qui vous attire dans ces collectifs qui, il faut l’avouer, vus de l’extérieur peuvent être perçus comme inquiétants ?
Personnellement, j’adore observer les gens, leurs conversations, leurs échanges. C’est ça qui me fascine. Que ce soit dans les films que j’ai tournés sur l’armée ou ici je voulais filmer l’éducation de jeunes par les jeunes. Il s’agit en effet d’adolescents qui éduquent les plus jeunes sur comment se comporter et évoluer en société. J’aime beaucoup cet aspect parce qu’à travers leurs échanges on sent comment ils se réapproprient ou s’adaptent au monde qui est le leur, que ce soit pour des raisons écologiques ou sociétales. Cela dit, dans le fim je montre également les moments où les codes sociaux qui sont peut-être imposés par le mouvement scout ou que certains jeunes suivent tout simplement par mimétisme, comme par exemple le groupe des garçons qui chantent une chanson ultra sexiste bannie en Allemagne, s’unissent à ces réflexions plus profondes. Je trouve intéressant de montrer comment ces jeunes suivent ou ne suivent pas les règles de société.

Justement, est-ce que vous aimez brouiller les pistes en jouant avec ces ambiguïtés propres au scoutisme ?
En effet, sans doute il y a cette image un peu démodée et d’une certaine façon naïve que les gens ont du scoutisme. Je ne voulais ni m’appuyer là-dessus ni redorer l’image du mouvement. Je voulais plutôt montrer ce qui transformait ce mouvement très traditionnel en quelque chose de plus contemporain, comment il s’adapte à la société actuelle. Je voulais faire un film riche de tous ces témoignages et expériences. En filmant j’ai découvert une multitude d’interprétations du mouvement scout en tant que tel. Je regrette qu’on n’ait pas filmé tous ces groupes mais c’était très difficile au niveau des autorisations. Au camp il y avait les scouts évangéliste, très religieux, les scouts queer qui étaient à fond sur les questions de genre, les scouts black block tous vêtus de noir et politiquement anticapitalistes etc. Il y avait vraiment une multitude d’interprétations du mouvement qui cohabitaient.

Qu’est-ce que ça signifie pour vous de filmer ces jeunes ?
C’est toujours fascinant de filmer les jeunes, une expérience unique que j’ai adorée. Au même temps c’est aussi très délicat parce que même si les thématiques qu’ils abordent peuvent être très crues ou critiquables il faut toujours être bienveillants à l’égard des personnes filmées. Il ne faut jamais pointer quelqu’un du doigt et encore moins quand il s’agit de jeunes. C’était un exercice particulier de filmer la jeunesse. Dans mon film, il s’agit d’une expérience très générique liée à un camp que beaucoup de personnes, en tout cas en Suisse, ont fréquenté. Au début il y a l’excitation d’aller retrouver tout le monde, après survient la fatigue et ensuite la tristesse de savoir que ça va bientôt se terminer. Je voulais capter ces émotions, que le public en fasse une expérience sensorielle.

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