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Belgique

Boris Tilquin et Christophe Hermans • Réalisateurs de Merckx

"On s'attaque aux idoles en allant chercher leur ambivalence comme avec n'importe quel personnage de fiction"

par 

- Rencontre avec les auteurs et réalisateurs du documentaire sur le cycliste belge Eddy Merckx, l’étude d’un héros hors normes

Boris Tilquin et Christophe Hermans • Réalisateurs de Merckx

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, documentaire tout en images d’archives, se présente comme un biopic du cycliste belge Eddy Merckx, axé sur le génie, mais aussi la capacité de résilience d’un champion, l’étude d’un héros hors normes, qui offre aussi un regard sur son pays et son sport. Le film sort aujourd’hui 26 février en Belgique avec O’Brother.

Cineuropa : Merckx est entièrement réalisé à partir d’images d’archives, pouvez-vous revenir sur la façon dont vous avez procédé ?
Boris Tilquin :
Notre idée était de réaliser un film avec des perspectives et des points de vue différents, pour dessiner un portrait qui croise des impressions, des sensations, des souvenirs, porté par une multiplicité de voix et une multiplicité de sources d'images. On a visionné des centaines d’heures, et utilisé des archives qui viennent de 30 pays différents. On les a choisies de façon à pouvoir raconter l’histoire que l’on avait en tête, on voulait faire de Merckx notre "Rocky", un boxeur qui affronte de nombreux coups, qui chute et qui se relève pour devenir une icône.

Que représentait-il pour vous avant de commencer à raconter son histoire ?
Christophe Hermans :
C’est le héros de l'enfance. Petits, on jouait à être Eddy Merckx. Merckx est une figure puissamment populaire, qui parlait à tous les milieux. Il suffisait d'aller au bord de la route lors d'une course, on pouvait pratiquement le toucher, le palper. Il était accessible, en quelque sorte. Il est devenu une légende pour toute la Belgique, un héros trans-générationnel.

Comment s’empare-t-on du héros d'une nation ? C’est une responsabilité particulière ?
C.H. :
Je pense qu'on s'attaque aux idoles en les contrastant, en allant chercher leur ambivalence comme avec n'importe quel personnage de fiction. On a dû creuser la trajectoire de Merckx pour trouver ce qui résonnait avec nous, notamment dans le rapport au père. Ils avaient une relation particulière, Eddy était vraisemblablement TDAH, son père a été assez rude avec lui, il voulait absolument lui prouver qu’il pouvait être fier de lui. Cette intimité universalise le propos. Et comme c’est une légende, on essaie de comprendre comment il a grandi, comment il a évolué, comment il est devenu ce champion et comment aussi il a chuté.

B.T. : Ce sont les événements sportifs qui finalement dessinent en creux ou dans l'ombre le portrait de l'homme. Ce qu’on ne voulait pas, c'était faire un film sur le sport. En fait, on voulait faire un film sur un corps social, donc le corps d'Eddy, qui traverse en effet des événements sportifs, mais qui raconte quelque chose sur qui il est, d'où il vient, qui raconte aussi la Belgique. Derrière l'histoire d'Eddy, on parle de la place des femmes dans les années 70, des problèmes communautaires en Belgique, du rôle des médias aussi, qui ont contribué à créer une icône, mais aussi amené à ce qu’on puisse la détester.

Justement, le film parle d’une époque où le cyclisme était très différent.
B.T. :
Ce qui nous a intéressés dans le cyclisme de l’époque, c'est son aspect rugueux, dangereux, on roulait sans casque, on voit Eddy descendre à 80 kilomètres heure dans des cols. Il a fait des chutes spectaculaires. Ça nous ramène à une époque où le vélo était quasiment un sport extrême. D'ailleurs, Eddy Merckx est passé à côté de la mort.

Comment avez-vous organisé la narration, tissé les images d’archives et les interviews en off ?
C.H. :
On avait pour référence Senna [+lire aussi :
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, de Asif Kapadia, qui a aussi fait Amy [+lire aussi :
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et Diego Maradona [+lire aussi :
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. On voulait un film immersif. On avait écrit au préalable un scénario, on a cherché des images en fonction, puis on a réécrit, et on a voulu créer un liant, en interrogeant des gens qui ont connu Merckx tout au long de sa carrière, surtout pendant la période phare des premiers Tours de France. Ensuite, on a décidé d’enlever tout le son de nos images d’origine, pour tout reconstruire. Le but était de rentrer dans la chair, on a engagé un comédien pour refaire le souffle, les respirations, sonoriser le corps en quelque sorte.

B.T. : Eddy Merckx est un incroyable personnage. Tout dans sa vie fait fiction. Tout était là comme un véritable scénario de film, avec des climax, des chutes, des rebondissements. On se demande même pourquoi il n'y a pas eu de documentaire avant sur lui ou même une fiction. Cet homme raconte énormément de la Belgique, de notre histoire, de notre mémoire. Ce qui s'est passé dans sa vie relève autant de la comédie que du drame, comme toute vie humaine.

Quel était le plus grand défi avec ce projet ?
C.H. :
C’était surtout d'arriver à condenser la vie et la carrière d'Eddy Merckx en 1h30, parce qu'il a gagné 525 courses. Un vrai défi d’écriture. Et puis il était important pour nous que le film soit juste pour les fans de cyclisme, mais qu’il soit aussi accessible pour ceux qui n’y connaissent rien. Il fallait également que ce soit un vrai film de cinéma, tout en sachant que ce serait aussi un film montré à la télévision, à un très grand public.

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