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NAMUR 2025

Bérangère McNeese • Réalisatrice des Filles du Ciel

"Je voulais aborder les limites du groupe, comment parfois, il peut représenter une maison, mais dont les portes seraient fermées à clé"

par 

- L’actrice belge nous parle de son premier long métrage de réalisatrice, qui suit une jeune fille qui trouve refuge auprès d’une bande de filles

Bérangère McNeese • Réalisatrice des Filles du Ciel
(© Fabrice Mertens/FIFF)

Comédienne bien connue, Bérangère McNeese présentait en première mondiale et en compétition au Festival International du Film Francophone de Namur son premier long métrage de réalisatrice, Les Filles du Ciel [+lire aussi :
critique
interview : Bérangère McNeese
fiche film
]
. Le film, qui suit une jeune fille qui trouve refuge auprès d’une bande de filles avec laquelle elle va négocier son passage précipité à l’âge adulte, vient aussi de remporter trois prix au Festival International du Film de Saint-Jean-de-Luz.

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Cineuropa : Quelles sont les origines de ce projet ?
Bérangère McNeese :
Je savais que j’avais envie de parler de plusieurs choses, des sujets qui sont à l’origine même de mon désir d’écriture, que j’avais déjà abordés dans mes films précédents, de façon éparse, et que j’ai voulu réunir ici, les violences faites aux femmes, la façon dont leurs corps sont mis en jeu, et aussi la question de la cohabitation au féminin, en soulignant la sororité à l’oeuvre, mais d’une façon qui ne serait pas fantasmée, mais plutôt très réaliste. Comment fait-on pour vivre ensemble quand on est toutes un peu cabossées ? Peut-on aider à réparer les autres quand on est soi-même blessée, et par armée pour ? Ce qui est passionnant, c’est que ces sujets évoluent à une allure folle depuis quelques années, moi-même, j’ai évolué sur ma façon de les aborder au fil de l’écriture.

Comment sont apparus les personnages qui allaient incarner ces dynamiques de groupe ?
J’avais très envie de retravailler avec Héloïse Volle. Je ne me lasse pas de la regarder jouer, je voulais la voir évoluer, avec mon regard de cinéaste. Héloïse est un personnage qui observe, il fallait donc qu’elle ait des choses à voir, c’est comme ça que j’ai pensé les filles autour d’elle, il fallait qu’elles soient intéressantes à regarder. Mallory, c’est un personnage qui existe dans ma tête depuis toujours, qui a une sorte de feu intérieur qui brûle tout sur son passage, ce qui est à la fois fascinant, inspirant, et effrayant. Evidemment, il fallait trouver la comédienne qui allait pouvoir incarner ça, et Shirel Nataf a été comme une évidence, dès que je l’ai vue. Ça m’a d’ailleurs beaucoup rassurée quand je l’ai vue, parce que j’avais bien conscience qu’il ne fallait pas se rater sur ce casting, que ça allait déterminer le succès de l’histoire. Face à elles, il fallait aussi que Jenna et Mona s’imposent, chacune à sa façon.

Le film parle de sororité, de la puissance du groupe, mais aussi, de l’importance de pouvoir en sortir.
Oui, de l’importance de trouver un endroit où l’on se sente en sécurité à des moments charnières de sa vie. Ça parle aussi de nos modèles, les gens qui nous guident et nous inspirent. D’autres femmes que nous que l’on observe réagir dans des situations bien particulières. Mais évidemment, il fallait aussi aborder les limites du groupe, comment parfois, il peut représenter une maison, mais dont les portes seraient fermées à clé. Et comment certaines personnes, mues par les meilleures intentions, peuvent aussi faire du mal.

Le rapport au corps, objet de désir, de convoitise, de contrôle, mais aussi d’émancipation est également traité.
Cela m’intéressait de montrer comment à cet âge-là, on voit le regard des autres sur notre corps changer, et à quel point cela peut être déstabilisant. Et comment ce corps peut être à la fois un point faible, et une arme. A partir du moment où l’on décide d’en faire une force, d’y trouver une forme de pouvoir sur les autres, comment agit-on ? L’idée n’était évidemment pas de traduire ça de manière manichéenne, les hommes mauvais et les filles victimes, mais plutôt d’en étudier les dynamiques. Théoriquement, Héloïse comprend très bien comment on peut s’approprier ce pouvoir, elle y adhère même. Mais pratiquement, elle a beaucoup plus de mal à passer d’un état d’esprit à un autre, cette double personnalité lui coûte beaucoup.

Le film montre également une forme de précarité que l’on voit peu au féminin.
Oui, leur crédo, c’est la débrouille. Elles vivent dans cet appartement un peu délabré, avec un enfant d’un an et demi, et elles pensent sincèrement que l’amour suffit à colmater les brèches. Mais elles subissent une grande instabilité, elles n’ont aucun filet de sécurité. De fait, elles ont un rapport très particulier à l’argent, dès qu’elle en a, Mallory le flambe. Elle tient à sa liberté plus que tout, elle est prête à beaucoup pour ça. J’aimais bien l’idée que cet appartement soit quand même un refuge pour elle. Elles s’abritent dans le ciel, alors que la boîte où elles travaillent par exemple est au sous-sol. Mais de plus en plus, ce nid se met à ressembler à une prison. On a aussi voulu faire évoluer le décor en ce sens. Avec mon chef opérateur, on a beaucoup discuté, notamment sur la façon de faire un film de filles qui ne ressemble pas à un film de filles, qui ne soit pas automatiquement doux, rond. Ces filles, ce sont des battantes, des petits soldats presque, et elles sont aussi très créatives dans leur façon d’habiter le monde. On voulait créer un univers où l’on sent que des femmes habitent, sans pour autant verser dans les clichés. Et je dois dire que cela m’a moi-même beaucoup questionnée, à plein d’endroits de ma féminité !

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