Téléfilm Canada lance son nouveau système pour mesurer la réussite des films canadiens
par Guy Dixon
- Telefilm Canada teste un nouveau système pour mesurer le succès des films canadiens. Durant des années, la Crown Corporation mesurait le succès des films qu'elle finançait uniquement sur base des résultats du box office domestique. Un nouvel index tient maintenant compte des ventes internationales, attribue des points aux prix et aux sélections dans les festivals et à l'importance des soutiens privés dans le financement d'un film.
L’ancien système de Téléfilm ne prenait pas en compte le classement au box-office international ni les ventes de DVD, sans parler des produits dérivés commercialisés en fonction du succès du film. « Ce type de consécration a lancé bon nombre de carrières et a généré des emplois pour les acteurs et les techniciens, même si ces éléments n’étaient pas officiellement évalués », déclare la directrice générale de Téléfilm, Carolle Brabant.
Par exemple, en se basant sur les anciens critères d’évaluation, la comédie québécoise De père en flic, sortie en 2009 et qui a remporté un franc succès au box-office national (près de 11 millions de dollars de recettes), représente un véritable exploit. Par contre, le film Incendies (2010) n’est pas considéré comme un triomphe avec ses 5 millions de dollars de recettes seulement sur le plan national. Il a pourtant été nominé aux Oscars et a remporté pas moins de huit prix Génie, y compris celui du meilleur film.
En fait, l’ancien système de classement sous-estime la plupart des films canadiens.
Il y a environ dix ans, l’ancienne ministre de Patrimoine Canada, Sheila Copps, a fixé comme objectif pour les films canadiens d’atteindre 5 % des recettes du box-office national, et ce, afin de mobiliser l’industrie cinématographique canadienne qui était alors en déclin. Toutefois, étant donné le nombre important de multiplexes qui ne diffusent que des productions hollywoodiennes dans le pays, les films canadiens de langue anglaise n’obtiennent pas plus de 1 % du marché. Les films québécois font légèrement mieux en atteignant en général les 3 %.
Alors que les films canadiens comme Blindness (2008) connaissent la consécration à l’étranger ou se vendent bien en DVD et en vidéo à la demande, ces éléments ne sont pas pris en compte pour mesurer le véritable succès du film.
Téléfilm Canada a donc annoncé mercredi le lancement de son nouvel Indice de réussite. Dorénavant, 60 % de la note d’un film s’appuiera sur les chiffres des ventes réalisées; les prix décernés et les apparitions publiques dans les festivals de films compteront pour 30 %; et les derniers 10 % de la note dépendront du financement privé par rapport au financement public.
« Le fait d’englober les aspects culturel et commercial dans un même indice est assez inédit », a déclaré Mme Brabant.
Pour illustrer l’utilité de cet indice, Carolle Brabant a pris l’exemple du réalisateur Guy Maddin : « Sa réputation n’est plus à faire sur le plan international. Son travail a été salué aux quatre coins de la planète. Pourtant, ses films ne réalisent pas un excellent classement au box-office canadiens. »
Pour les films qui réussissent mieux à l’étranger et qui vendent beaucoup de DVD, Mme Brabant explique que le nouvel indice permettra de mieux refléter la situation actuelle de l’industrie cinématographique, et de mieux définir ce que représente véritablement 5 % du box-office. Aujourd’hui, les films ont une dimension internationale. La plupart des grosses productions peuvent désormais compter sur la participation de sociétés étrangères et prévoient par conséquent d'être diffusées dans les salles à l'étranger, en plus d'y vendre des DVD.
« Nous pensons que cet indice est un outil qui permettra à de nombreux films de finalement atteindre ces fameux 5 % du box-office », nous confie Mme Brabant. « Le fait d’axer l’évaluation uniquement sur les résultats au box-office comportait des lacunes. »
Ce nouvel Indice de réussite ne change pas seulement la façon dont le succès d’un film est mesuré, mais aussi la façon de mesurer les résultats de Téléfilm. Font-ils du bon travail en matière de financement public de films?
« J’ai toujours été étonnée de constater – et cela provient probablement de mon passé de comptable agréé – que la réussite d’un film était uniquement mesurée à l’aune de son succès national », révèle Carolle Brabant. « Si vous prenez des entreprises d’autres secteurs, comme Bombardier ou le Cirque du Soleil, vous réalisez qu’elles sont connues dans le monde entier et pas seulement au Canada. Il me semble que cet aspect de la réussite n’était pas pris en compte [dans la façon d’évaluer de Téléfilm]. »
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