22/12/2011

Hier sortait en Belgique Mega Mindy en de snoepbaron. Combinaison classique pour une production flamande, Kinepolis diffuse le film dans 32 salles, avec en ligne de mire les vacances de Noël. Ce n'est pas un euphémisme de dire que Mega Mindy 3 ne révolutionnera pas l'histoire du cinéma belge. Ce n'est pas non plus beaucoup se mouiller que de prédire qu'avec son esthétique criarde et sa perpétuation des stéréotypes de genre, le film ne sera pas un chapitre notable de l'histoire des films pour enfants. Et pourtant, Mega Mindy est un beau conte de Noël, l'illustration de la véritable histoire d'une petite société belge qui devient aussi grosse et dodue qu'un beau conglomérat américain.

En 1996, Hans Bourlon et Gert Verhulst, alors associés à Danny Verbiest, produisent Samson & Gert, un programme télévisé pour enfants diffusé sur la VRT, et rencontrent un certain succès. Rapidement, ils choisissent d’assurer leurs arrières en appliquant une double stratégie de spécialisation et de diversification. Résultats de cette démarche, Studio 100 crée de nouvelles franchises qui rencontrent un grand succès, tout en élargissant sa cible : les enfants se passionnent pour Plop le nain, Piet le Pirate ou Mega Mindy la superhéroïne en collants roses, les tout petits fondent pour Bumba, le cousin clown des Teletubbies, tandis que les jeunes adolescents se passionnent pour les aventures de Het huis Anubis. Parallèlement à ces produits télévisés, Studio 100 développe une gamme complète de dérivés : livres, BDs et magazines, parcs d’attraction, comédies musicales, jouets en tous genres et partenariats commerciaux sous licence. Il se lance également dans la musique, en créant au Benelux la « toddler pop » avec le girl band K3, sorte d’empire musical flamand à la Hannah Montana, déclinant la poule aux œufs d’or sur tous les supports, disque, tournées, sitcom, films… Les K3 ont vendu au Benelux plus de 3.5 millions d’albums.

Cet empire d’abord limité aux frontières linguistiques (avec une solide incursion sur le marché belge francophone dès 2005), prend son envol en 2008 avec le rachat de la société allemande EM Entertainment, et surtout de son catalogue. Studio 100 attaque le marché allemand, et surtout, compte sur les pépites aux accents nostalgiques du catalogue pour toucher un public mondial : Fifi Brindacier, Vic le Viking, Maya l’Abeille ou encore Heidi. Par ailleurs, Studio 100 produit également des adaptations de ses séries. Ainsi, Het huis Anubis a une version allemande, mais aussi une version américaine, diffusé depuis 2011 sur la chaîne Nickelodeon USA.

Le cinéma est une part importante de la société. Mega Mindy en de snoepbaron est son 20ème film, et tous représentent de substantielles recettes aux box-offices flamands et hollandais. L’année dernière, le 2ème opus de Mega Mindy attirait quelques 135.000 spectateurs en Belgique. En 2008, les quatre films sortis par le Studio cumulaient plus de 380.000 entrées. Les deux films tirés de la série Het huis Anubis ont séduit 1.250.000 spectateurs, et le 2ème volet a même réalisé les meilleurs résultats du box-office hollandais en 2008 !

Le rachat de EM a fait tomber dans l’escarcelle de la société un studio d’animation australien, ce qui l’a poussée à créer son propre studio, basé à Paris. La création maison jusqu’ici essentiellement basée sur des productions de fiction en prises de vue réelles prend une nouvelle tournure plus internationale. Son grand projet, outre la modernisation des titres de son catalogue dans des versions animées en 3D, est la production de son premier long métrage d’animation basé sur le personnage de Maya l’Abeille. L’effet madeleine de Proust devrait agir en plein sur une génération de parents trentenaires dépassés par l’hystérie de certaines productions actuelles. Avec la version cinéma de Maya, Studio 100, déjà géant en ses contrées, pourrait bien devenir un acteur majeur de l’animation mondiale.