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KARLOVY VARY 2023 Compétition

Critique : Sous hypnose

par 

- Ernst De Geer veut que son premier long-métrage vous mette mal à l'aise. Très mal à l'aise

Critique : Sous hypnose
Asta Kamma August et Herbert Nordrum dans Sous hypnose

Ernst De Geer, qui a présenté son premier long-métrage, Sous hypnose [+lire aussi :
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, en compétition à Karlovy Vary, y établit d'emblée un fait simple : son objectif est que les gens se sentent mal à l'aise. Embarrassés. Embarrassés d'être embarrassés.

Il ne le fait pas toujours totalement subtilement. Son héroïne, Vera (Asta Kamma August), ouvre même le film en parlant des règles ("il y avait beaucoup de sang"), mais elle a une bonne raison de le faire : son partenaire André (Herbert Nordrum, de Julie en 12 chapitres [+lire aussi :
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) et elle sont en train de développer une appli dédiée au système reproducteur des femmes. Et son histoire traumatisante n'est même pas vraie.

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Dans The Hypnosis, mentir n'est pas un problème. C’est tout simplement ce que font les adultes. Ils sont en outre omnubilés par la perception qu'ont d'eux les autres : ils veulent donner l’impression d’être plus riches, d'avoir plus de succès qu'il n'en ont. Ou ils racontent aux autres que leurs parents ont un bateau. Vera aussi veut être comme les autres, du moins jusqu’à ce qu’elle décide d’essayer l'hypnose, dans l'espoir d'abandonner cette mauvaise habitude qu'on appelle fumer. Elle veut arrêter, dit-elle. C'est du moins ce qu'elle croit – après tout, cela fait un moment qu'elle obéit aux ordres des autres –, mais au lieu de ça, c'est quelque chose d'autre qui lui arrive.

Cette modeste satire pourrait être perçu comme le parcours de dévoiement progressif d’une femme à laquelle on n'a jamais permis grand chose, comme à beaucoup d'autres. Les femmes et les filles sont polies et gentilles, elles doivent savoir rester à leur place. Et pourtant, il suffit d'une petite impulsion : une fois que Vera se met à croire que sa thérapie atypique lui a permis de changer, c'est comme si toutes ces années à être réprimée n'avaient servi à rien.

Ça commence progressivement : elle veut danser en voiture et se met en colère quand on l'accuse d'être nulle en technologie. Au bout d'un moment, elle réagit vraiment, au lieu de sourire en silence et elle attaque, au lieu d’être d’accord avec tout le monde. Tout cela terrifie son partenaire, parce que ça tombe vraiment au mauvais moment : ils sont en train de chercher un investisseur important à un week-end de retraite pour jeunes start-ups.

Ce qui rend Sous hypnose intéressant, malgré quelques lenteurs, c'est que De Geer ne simplifie pas trop les choses. Vera s'amuse peut-être plus, elle est peut-être plus authentique, mais son comportement est effarant et méchant. Les gens ne sont pas fanas de sa totale franchise  : ils veulent qu'elle parte, ce qui amène à s'interroger sur la facilité avec laquelle on peut se sentir mal à l'aise dans les situations sociales. Il n'y a aucune raison logique de se sentir embarrassé pour quelqu'un d'autre, alors qu'on n'est pas celui qui crie sur quelqu'un parce qu'il vient de marcher sur un chien imaginaire, par exemple. Le film de De Geer ne parle pas que de Vera : c'est aussi un film sur le fait de former un couple, et sur l'idée qu'un des partenaires représente non seulement votre idée de business, comme dans le cas de nos personnages, mais vous représente aussi vous.

Franchement, le film pourrait se permettre d'être encore plus déplaisant, compte tenu de l’environnement singulier dans lequel se trouvent André et Vera, un univers qui parle à tout bout de champ des "gens ordinaires" et se gargarise avec l'idée de changer le monde, un enfoiré privilégié après l'autre. De Geer pourrait pousser encore plus loin ; on a l’impression qu’il se retient un peu, privant le public de moments comme la scène du singe dans The Square [+lire aussi :
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. Et puis d'un coup, comme ça, il livre un dénouement qui vous file une grande claque. On espère que ce réalisateur reviendra bientôt pour nous amuser de manière encore plus douloureuse. Planquez juste tous les tapis d’abord.

Sous hypnose a été produit par Garagefilm International en coproduction avec Film i Väst AB, Mer Film AS et Totem Atelier. Les ventes internationales du film sont assurées par Totem Films.

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(Traduit de l'anglais)

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