Tous les films de De Hadeln
par Giovanni Bogani
- Prévisions du Festival: Bertolucci, Campion, Weir, Coen, Bergman, Allen, Scott, Gitai. Le meilleur du cinéma mondial avec des surprises et des absents
Plus fort que Cannes? C'est fait! Cette année, le menu de Venise semble plus alléchant que celui assez indigeste servi sur la Croisette en mai. Quant à Berlin, il n'est pas sorti de l'ordinaire. Voici donc la seconde Mostra orchestrée par Moritz de Hadeln, (quasiment) film par film. Même si la conférence de presse n'est prévue que le 31 juillet, les rumeurs se font toujours plus insistantes et nous pouvons déjà dire que...
BERTOLUCCI.
Avant tout, parlons de lui. Il a été dit et écrit que Bernardo
Bertolucci, recevra un Lion d'or pour l'ensemble de sa carrière à la
Mostra qui se déroulera au Lido du 27 août au 6 septembre. Et bien,
c'est faux. Ce qui est vrai par contre, c'est que Bernardo Bertolucci -
qui recevra lundi 7 juillet le Prix Fiesole attribué aux grands maîtres
du cinéma - viendra à Venise avec son dernier opus, le très attendu
The Dreamers. Tourné à Paris, ce film retrace les rêves des
utopies de 68, cette révolution que Bertolucci avait d'une certaine
façon anticipé avec son film des années 60, Avant la révolution , une oeuvre d'une beauté stupéfiante. Interprété par Michael Pitt,
Louis Garrel, Eva Green et Jean-Pierre Léaud (l'acteur fétiche de
Truffaut, dans son propre rôle), The Dreamers avait comme titre
provisoire "Paris '68". Quelques extraits seront projetés durant la
cérémonie de remise du Prix Fiesole ce soir. Ensuite, rendez-vous à
Venise. Etant donné le charisme du cinéaste - Bertolucci a remporté
trois Nastri d'Argent, un Léopardo d'Or, un David di Donatello, un
César, deux Oscar, un Golden Globe -, le film sera vraisemblablement
présenté hors compétition. Trente ans après, Bertolucci est donc
retourné tourner à Paris. La dernière fois, c'était au temps du "Dernier
tango", de son érotisme anonyme et tragique et de la condamnation du
réalisateur pour obscénité par les tribunaux italiens. Poursuivi pour
blasphème, il perdit son droit de vote pendant cinq ans tandis que les
spectateurs du monde entier découvraient un nouvel usage du beurre. "The
Dreamers" promet d'être d'une force égale. "Le film a un contenu
érotique" a admis Bertolucci. "C'est un aspect de cette révolution, de
cette époque: la trangression, et pas uniquement sur le plan politique".
ITALIENS/1.
Beaucoup de noms au chapitre des réalisateurs italiens à Venise. Si
Ermanno Olmi a déclaré qu'il ne serait pas prêt pour la
Mostra avec son Cantando dietro i paraventi, un autre grand
cinéaste, né dans la plaine du Pô à très peu de kilomètres et d'années
de différence de Bertolucci, lutte contre le temps pour finir son film.
Il s'agit de Marco Bellocchio qui raconte dans
Buongiorno notte l'histoire de l'enlèvement d'Aldo Moro et
mieux encore, l'enlèvement de Moro vu par les yeux de ses propres
ravisseurs. Interprété par Luigi Lo Cascio et
Maya Sansa, le film de Bellocchio - qui a obtenu l'an
dernier un succès d'estime à Cannes avec Le sourire de ma mère,
l'ora di religione - pourrait entrer directement en compétition
officielle. Quatre autres réalisateurs italiens pourraient l'accompagner
en sélection ou au moins au programme. Le premier est le cinéaste
livournais Paolo Virzì qui a déjà gagné le Grand Prix
du Jury à Venise avec Ovosodo. Il présentera cette fois
Caterina va in città, tourné dans un lycée de Rome avec Claudio
Amendola, Margherita Buy, Sergio Castellitto et un groupe de jeunes
adolescentes . Le cinéaste toscan Paolo Benvenuti
(primé à Locarno pour Gostanza da Libbiano), un auteur à part,
marginal, intelligent et intellectuel, va également présenter son
nouveau film que les sélectionneurs vénitiens auraient grandement
apprécié. Et deux autres réalisateurs difficiles qui vont à
contre-courant, courageux à l'extrême et que l'on peut qualifier
d'auteurs au sens noble du terme se rapprochent du Lido:Daniele
Ciprì et Franco Maresco qui ont mis en scène
Le retour de Cagliostro après leur dernière production Totò
che visse due volte (un film qui avait soulevé des controverses
sans fin). Les deux réalisateurs racontent l'histoire de deux frères
scélérats passionnés de cinéma et fondateurs dans les années 50 d'une
société de production cinématographique très peu solide. Engageant une
vieille star hollywoodienne déclinante et impliqués dans des traffics
louches de la Maffia, ils cherchent à terminer leur 'Retour de
Cagliostro'. Le film pourrait être sélectionné en compétition officielle
comme le surprenant long-métrage de l'italo-anglais Edoardo Winspeare,
"Le miracle".
ITALIANI/2.
D'autres réalisateurs italiens se rapprochent de Venise. Probablement
pas en compétition officielle, mais à Venise la presse vient en force et
s'intéresse aussi aux sections parallèles. Ces auteurs sont ceux dont
les oeuvres ont beaucoup plu aux sélectionneurs ou qui courent encore
contre le temps pour finir leur film: Pasquale Pozzessere, Antonietta De
Lillo, Pasquale Scimeca (un silicien d'Aliminusa, près de Palerme qui a
réalisé "Les indésirables").
CINEASTES ETRANGERS.
Les noms parlent d'eux-mêmes: Jane Campion, Peter Weir, les frères Coen,
Ingmar Bergman, Woody Allen, George Ridley Scott, Amos Gitai. Le
meilleur du cinéma mondial.
Jane Campion présentera In the Cut avec Meg Ryan, Kevin Bacon
et Jennifer Jason-Leigh. Il semble aussi quasi certain que Peter Weir
sera présent avec Master and Commander, interprété par Russell
Crowe. Quelques séquences du second chapitre de
The Tulse Luper Suitcase de Peter Greenaway, qui a prouvé à
Cannes de quoi était capable un manipulateur d'images génial comme lui
dans l'ère numérique, pourraient également être montrées au Lido. Amos
Gitai, le citoyen du monde israélien présentera à la Mostra
Alila et les frères Coen (déjà vainqueurs à Cannes)
Intolerable Cruelty avec des stars du calibre de George
Clooney, Catherine Zeta-Jones et Billy Bob Thornton. Très attendus
aussi, les film de Ridley Scott Matchstick Men avec Nicolas
Cage, et de Woody Allen, Anything Else dans lequel le
new-yorkais (qui avait snobé Venise l'an dernier au profit de Cannes)
joue avec Glenn
Close et Danny De Vito.
LE RETOUR DU MAITRE?
Il semblerait que Venise ait réussi le joli coup de présenter aux yeux
de tous le retour à la réalisation du solitaire Ingmar
Bergman qui avait annoncé sa retraite du cinéma il y a 20 ans,
mais qui sur un coup de tête est revenu derrière la caméra à l'âge de 80
ans. Son film se nomme Sarabande et permettra de retrouver dans
les rôles principaux Liv Ullman et Erland Josephsson, un duo déjà vu
dans Scènes d'un mariage.
LIONS.
Une nouveauté pour le Lion d'Or puisque deux prix seront remis cette
année (au lieu d'un auparavant) pour l'ensemble de la carrière d'un
réalisateur et probablement d'un acteur. En revanche, le Prix Bianchi,
décerné par la presse cinématographique italienne sera certainement
attribué à un acteur qui a marqué l'histoire de la comédie italienne:
Nino Manfredi. A cette occasion, "La fin d'un mystère"
sera présenté en avant-première à Venise, un film dont le tournage vient
à peine de se terminer et dans lequel Manfredi interprète le poète
espagnol Federico Garcia Lorca. Mais alors Garcia Lorca n'a donc pas été
fusillé par la police franquiste en 1936? Non, car le film imagine que
le poète a survécu et qu'il vit comme un clochard à Grenade.
HOMMAGES.
Une vaste rétrospective sera consacrée aux grands producteurs du cinéma
italien de 1945 à 1975: de Ponti à Rizzoli, en passant par Amato et
Cristaldi, sans oublier De Laurentiis et Lombardo. Au cours de ce
programme, une soirée sera certainement dédiée à Alberto Sordi.
HEPBURN.
Un hommage sera rendu à Katharine Hepburn, la plus indépendante, la plus
contemporaine et intelligente des divas d'Hollywood avec une projection
de la copie restaurée de Temps d'été.
ABSENTS.
Manqueront à l'appel de la Mostra, Quentin
Tarantino,déjà attendu à Cannes avec son ultra-violent
Kill Bill! interprété par Uma Thurman, et Wong
Kar-Wai, le cinéaste d'In the Mood for Love,
qui travaille depuis trois ans sur 2046 avec Maggie Cheung mais
qui n'a pas encore terminé son travail (avec un arrêt provoqué par le
virus de la pneumopathie atypique). Envolées également les espoirs de
voir à Venise Theo Angelopoulos avec Il primo
prato (première partie d'une trilogie sur le Xxème siècle),
Gianni Amelio avec Le chiavi di casa
(interprété par Kim Rossi Stuart et Charlotte Rampling), Silvio
Soldini avec Agata e la tempesta, Mario
Martone avec L'odore del sangue et Dario
Argento avec Il cartaio. Mais, si vous me permettez ce
commentaire personnel, avec ce qui est au menu, il y a dejà de quoi
largement se satisfaire.
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