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LECCE 2018

Critique : Broken

par 

- Edmond Budina revient, six ans après Balkan Bazar, avec un tableau impitoyable de l'Albanie d'aujourd'hui, dévastée par la corruption, les déchets toxiques et la perte des liens affectifs

Critique : Broken

De la dictature au libéralisme le plus effréné, l'Albanie a subi ces vingt dernières années une transformation radicale qui a favorisé une perte progressive des valeurs et de l'identité albanaise. C'est à présent un pays méconnaissable pour les gens de la vieille génération, un pays dominé par une corruption féroce est un effritement des liens affectifs entre les gens. C'est ce que raconte sur le ton du drame Broken [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film
]
, le nouveau film d'Edmond Budina, présenté en séance spéciale au 19e Festival du cinéma européen de Lecce. Ce troisième long-métrage du réalisateur albanais (qui réside depuis longtemps en Italie), tourné en à peine trois semaines et demie entre l'Italie, l'Albanie et la Macédoine, est un cri d'alarme sur l'état d'un pays déliquescent où les hommes politiques ne pensent qu'à leur profit, où les travailleurs n'ont pas de droits et où l'environnement est pollué par les déchets toxiques.

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Les deux Albanies, l'ancienne et la nouvelle, sont incarnées ici par un père et son fils. Le premier, Jani, sexagénaire, est interprété par le réalisateur lui-même et Andi, son fils, a les traits de Laert Vasili. Après une longue peine de prison purgée en Italie, à Ancona, Jani prend le bateau et revient dans son pays d'origine, l'Albanie. Après des années d'absence, quand il arrive à Tirana, il est complètement désorienté : sa femme est morte, sa maison a été vendue et son fils, qui ne l'a jamais cherché pendant qu'il était en prison, est devenu un homme politique influent dépourvu de toute émotion. Il ne reste à Jani de son ancienne vie que son ami Marko (Nikolla Llambro). Après avoir refusé la "charité" d'Andi, qui se hâte de lui procurer une maison et de l'argent pour se nourrir (tant que son ancien détenu de père ne lui crée pas de problèmes d'image), Jani décide de quitter la ville et de retourner avec Marko dans son village natal. Ce qu'il va trouver sur place n'est pas mieux : la campagne est détruite, couverte de décharges à ciel ouvert, et les enfants locaux sont obligés de respirer un air empoisonné.

“En Albanie, on ne parle presque jamais des problèmes du pays. À travers ce film, modestement, nous avons essayé de hausser le ton" explique Budina qui, en plus d'être metteur en scène et acteur, fait partie des co-fondateurs du Parti démocrate albanais ("notre rêve était d'abattre la dictature et de créer un monde démocratique et beau où tout le monde puisse être heureux", se souvient-il). Un des moments les plus amers du film est justement celui où Jani, résolu à dénoncer les pratiques illégales qui affectent son village, rencontre un groupe de journalistes qui fait d'abord semblant de l'écouter puis se moque de lui sans pitié. Jani est seul dans sa lutte contre l'immoralité de ses vieux amis et de son fils-même, qui est le principal responsable de la déchetterie. Le tableau que propose le film, sans espoir, est allégé de temps en temps par l'ironie avec laquelle il observe un groupe de vieux messieurs qui se changent les idées en regardant un chaste numéro de striptease offert par Gladiola Harizaj, qui joue dans le film une mère célibataire au passé obscur que Jani accueille dans sa vieille bicoque. Un drame intense, tourné entièrement en lumière naturelle, rehaussé par des interprétations efficaces (celle, douloureuse, de Budina et celle, glaciale, de Vasili) et des cadrages qui cherchent à ne jamais être banals.

Broken est une coproduction entre l'Albanie, l'Italie et la Macédoine qui a réuni les efforts d'A.B.Film, Revolver et KTFilm&Media, avec le soutien des ministères de la Culture des trois pays. Le film, déjà projeté à Tirana, va sortir en Italie en mai.

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(Traduit de l'italien)

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