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BLACK NIGHTS 2023 Compétition

Critique : Oxygen Station

par 

- Ivan Tymchenko raconte l'histoire du militant tatar de Crimée Mustafa Dzhemilev à travers une fiction criminelle doublée d'un thriller politique à haute tension

Critique : Oxygen Station

L’histoire des Tatars de Crimée est longue et compliquée, mais si on adopte le point de vue d'un Tatar, les événements qui ont affecté son peuple aux XXe et XXIe siècle ne peuvent être décrits que comme tragiques. Les Tatars ont subi la famine russe du début des années 1920 et les purges staliniennes des années 1930 pour se retrouver collectivement accusés de collaboration avec l’occupant nazi et déportés vers l’Asie centrale (principalement en Ouzbékistan) la décennie suivante. Chaque tentative de protestation ou de retour dans leur terre natale a été punie, via le système des colonies pénitentiaires en Sibérie. La résistance n’est cependant pas complètement morte, et certaines figures, comme celle de Mustafa Dzhemilev, aujourd'hui représentant du peuple au parlement ukrainien, ont conservé la flamme. Il est le héros du thriller dramatique historique Oxygen Station [+lire aussi :
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d'Ivan Tymchenko, qui a fait sa première en compétition au Festival Black Nights de Tallinn.

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On fait sa connaissance quand il est encore enfant (joué par Danylo Bondarev), dans une séquence de rêve étrange et stylisée impliquant un magicien à l'allure sinistre et une conversation politique à laquelle aucun enfant ne devrait participer. Plus tard, on se rend compte que Mustafa adulte (Borys Orlov, qui a joué le poète ukrainien Taras Shevchenko dans le biopic de 2019 Taras: Homecoming) vit dans la colonie pénitentiaire de Zyryanka en Sibérie, où il remplit les bonbonnes d'oxygène dans un bâtiment, à côté de criminels et d'anciens détenus. Bien qu’il soit travailleur et ne se plaigne pas beaucoup, le procureur Shalandin (Viktor Poltoratskyi, qui joue aussi le magicien dans les scènes de rêve) est déterminé à l'épingler pour le meurtre de Lunin, un reporter local et provocateur communiste. Mustafa a encore l'étiquette d'ennemi de l’État, bien que ses actions de protestation récentes ne soient documentées que dans des lettres et dans un journal de bord personnel.

Pendant ce temps-là, en Ouzbékistan, Safinar (Khrystyna Deilyk, aperçue dans Volcano [+lire aussi :
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de Roman Bondarchuk) craint que le héros national ait cessé de se battre pour la cause, alors elle monte dans le train qui va de Tashkent à Moscou, sans se rendre compte que des agents du KGB sont en train de la suivre. Quelle est sa destination finale ? Est-ce que c'est lié à l'intrigue criminelle et l’enquête menée sur l'affaire en Sibérie ? Et quel est le rôle du mystérieux Hani (Edem Ibadullaev) ?

Le scénario, écrit par Mykhailo Brynykh (qui a déjà collaboré avec le réalisateur sur Beshoot, 2019), suit deux pistes parallèles pour montrer que la vie libre en URSS n’était pas très différente de la vie au goulag. Jusqu’à la toute fin, ces deux intrigues sont très différentes par leur style et leur nature, et très lointaines, ce qui met une pression énorme sur Tymchenko pour trouver l’équilibre et bien les mélanger pour former un tout qui soit relativement fluide. L’ouverture est assez élégante, et montre une bonne capacité à contrôler les deux intrigues individuellement (celle qui se passe en Sibérie suit les règles du genre crime/thriller politique), mais un ralentissement du rythme dans le deuxième acte semble inévitable. Cela dit, l'intervention des scènes de rêve et séquences imaginaires sont une bonne solution à ce problème.

Tymchenko tire le meilleur des composantes qu’il a à sa disposition. Les interprétations de tous les membres de la troupe sont convaincantes, mais on note que seuls les acteurs les plus chanceux ont eu des personnages "épais". La photographie de Thomas Stokowski utilise des couleurs troubles pour souligner la décadence et les efforts futiles pour la masquer. Les décors et les costumes correspondent bien à la période de la Guerre froide. La musique composée par Jun Miyake offre de courts éclats de tension supplémentaire. En somme, Oxygen Station fonctionne assez bien et comme drame historique à thème, et comme thriller politique.

Oxygen Station est une coproduction qui a réuni les efforts de l'Ukraine, la République tchèque, la Suède et la Slovaquie à travers les sociétés Digital Platform, Svitlofor Film (Ukraine), Silk Films (République tchèque), HOBAB (Suède) et Flying Colors Pictures. 

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(Traduit de l'anglais)

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