16/06/2020 - Dans le documentaire de Francesco Cannavà, en lice à Biografilm, une jeune handicapée qui découvre sa sexualité se met courageusement à nu

“Ils doivent être courageux, les spectateurs, pour voir ce film. C’est un film fort, parce que je l’ai vécu dans ma chair" : c'est par ces mots que Claudia Muffi a introduit la première mondiale du documentaire dont elle est le personnage central, Because of My Body [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film] de Francesco Cannavà, en compétition au Festival Biografilm, dans le cadre de son édition 2020 en ligne. Claudia souffre d'une malformation congénitale (la spina bifida) qui l'empêche de se déplacer sur ses jambes et, dans ce travail du réalisateur de 39 ans, originaire de Messina, elle se met littéralement à nu, dévoilant son corps, sa sexualité et ses désirs les plus intimes.

“En 2009, l’OMS a reconnu le plaisir comme un droit inaliénable de la personne" : c’est la prémisse de Cannavà. Et pourtant Claudia, 21 ans, n’a encore jamais senti la caresse d’un homme. Elle ne connaît pas son propre corps ni celui des autres, et ne sait pas ce qu’est le plaisir sexuel, et c’est pour cela qu’elle a décidé de participer à un programme expérimental, supervisé par des psychologues et des experts en sexologie, qui va lui permettre, en huit étapes, de se découvrir physiquement et émotionnellement et d’être en mesure, à l'avenir, de se construire une relation sentimentale. L'expérience est menée par un "love giver", ou mieux un OEAS (opérateur d’émotivité, d’affection et de sexualité pour les personnes handicapées) qui, dans le cas de Claudia, est Marco, 40 ans.

Il s’agit d’un programme expérimental parce qu'en Italie, il n’existe pas encore de loi en la matière. Pour les opérateurs, qui perçoivent une compensation, il est absolument interdit d’avoir des contacts physiques avec les patients (autrement leur travail serait considéré comme de la prostitution) et, évidemment, il est totalement interdit de tomber amoureux : c'est pourquoi au terme des huit rencontres, l’opérateur et le patient doivent impérativement couper les ponts et ne plus jamais se voir ou se parler. Une clôture brutale mais nécessaire de leurs rapports que Claudia aura beaucoup de mal à accepter.

L’enthousiasme, l’envie d’expérimenter, la sincérité et le sourire ouvert de Claudia sont l'âme de ce film qui n'hésite pas à documenter des moments particulièrement intimes de son quotidien et de son parcours de découverte : l'observation de ses parties génitales dans un miroir, l'acte de se déshabiller devant un homme pour la première fois, l'exploration du corps avec des sex toys, le tout non seulement sans embarras, mais avec le même naturel que celui avec lequel un enfant explore son corps. On est ému par la séance de peinture sur corps où Marco et Claudia se peignent mutuellement, les deux étant nus. "Je suis heureuse", répète la jeune fille tandis que le pinceau lui caresse la peau.

Because of My Body rappelle fortement et clairement que la sexualité est un besoin primaire, et que chaque être humain a le besoin et le droit d'être touché, caressé, de recevoir un baiser ou d'être pris dans les bras de quelqu'un. Le film témoigne qu’il existe une voie possible, que Claudia emprunte avec courage, dépassant toutes ses limites, dans une tempête émotionnelle continue. Une voie qui peut être, aussi, très douloureuse et ne préserve pas la jeune fille de ses côtés les plus obscurs, mais qui est une importante injonction de ne pas laisser ces personnes seules alors qu'elles ne demandent que de ressentir des émotions, comme tout le monde.

Because of My Body a été produit par B&B Film.

(Traduit de l'italien)