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BERLINALE 2022 Compétition

Critique : Nos soleils

par 

- BERLINALE 2022 : Carla Simón présente un tout petit film qui mérite les plus gros trophées

Critique : Nos soleils
Joel Rovira, Ainet Jounou et Isaac Rovira dans Nos soleils

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, et en même temps, tout se passe, car l'univers d’une famille est sur le point de changer pour toujours. Au dehors, personne ne s'en soucie, personne ne remarque quoi que ce soit. Et pourtant, dans ce film projeté en compétition à Berlin, Simón fait un cinéma "de l’intérieur" : elle va au plus près des choses, observe à travers le feuillage et semble faire tout son possible pour se retenir de serrer ses personnages dans ses bras. Ce n’est rien de moins qu'un miracle qu'ils aient tous droit ici à leurs moments à eux, et aux petites choses auxquelles chacun tient, qu'il s'agisse d'une chorégraphie sur une chanson "girl power" ou même d'un petit buisson d’herbe. Pour tout vous dire, Simón est peut-être une des cinéastes les plus tendres qui exercent en ce moment.

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Le changement très progressif qui va affecter leur existence quotidienne, inondée de soleil, commence lentement, au moment où les enfants assistent, impuissants, à la destruction d’un de leurs terrains de jeu préféré. Rien ne nous est expliqué, mais on comprend vite ce qu'il se passe : la famille Solé va bientôt être expulsée. Au bon vieux temps, les gens ne signaient pas de contrats, proteste le grand-père, mais le bon vieux temps n'est plus, pas plus que le propriétaire qui lui avait "donné sa parole" après la guerre civile d’Espagne, et si on a pas de papiers pour prouver l'accord, il faut aller de l'avant et évoluer. Même si ça signifie qu'il va falloir dire adieu à quelque chose qu’on aimait et dont on s’occupait si bien.

Il y a quelque chose d'un peu ironique dans le fait que ce soit des panneaux solaires qui font figure de "méchants" dans ce film : dans la campagne catalane, ils envahissent les vergers et changent la vie des gens. Cueillir des pêches n’est plus considéré une occupation viable et pourtant, encore longtemps après, ce groupe humain continue comme si de rien n’était, comme si le problème allait disparaître tout seul. Ce qui est intéressant, dans cette maisonnée soiidaire, c'est que personne ne semble capable de partager sa douleur ou ses soucis avec les autres ; les seules réactions sont de rage ou de déni : un personnage apporte des figues en signe de paix, l'autre menace de couper tout l'arbre. Quant aux enfants, ils se contentent de batifoler, d'observer les adultes et d'écouter aux portes quand ils chuchotent. Ce n'est pas juste la fin du monde, c’est aussi la fin de leur enfance, peut-être, car dès que ces arbres auront disparus, il sera sans doute temps de grandir.

Simón est une réalisatrice extrêmement subtile. Ici, pas de grandes conversations qui disent tout explicitement : on garde les choses enfermées en soi jusqu’à n'en plus pouvoir, ce qui signifie aussi que l’éclatement, inévitable, est encore plus douloureux à voir. On a toutefois le droit de fredonner des ritournelles, dont certaines parlent du temps où tout était plus facile. Simón pose très clairement, cela dit, le fait que ce récit qui parle d'une famille est tout sauf limité à cette famille : elles sont nombreuses à faire face au même problème, exactement : sa propre famille tient un verger de pêches, alors pour ce qui est de faire des films sur des sujets qu'on connaît... Ils vont descendre dans la rue, pour protester, mais on voit bien qu'ils ne croient plus qu'il soit possible de faire marche arrière : ce sera la dernière fois qu'ils se dresseront contre l'état de fait. Cette histoire modeste, racontée doucement, pourrait avoir du mal à percer (à moins que des prix ne l'y aident), car le mot d'"agriculture" suffit généralement à faire peur aux spectateurs et à les détourner, et pourtant quoi que fassent ces gens, quelle que soit la façon dont ils essaient de se battre, Simón a une telle manière de raconter leur histoire qu'il est incroyablement facile de prendre fait et cause pour eux, profondément.

Nos soleils est une coproduction entre l'Espagne et l'Italie pilotée par Elastica Films, Avalon Productora Cinematográfica et Vilaüt Film, en coproduction avec Kino Produzioni. Les ventes internationales du film ont été confiées à mk2 Films.

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(Traduit de l'anglais)


Galerie de photo 15/02/2022 : Berlinale 2022 - Alcarràs

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Carla Simón, Ainet Jounou, Albert Bosch, Anna Otin, Berta Pipó, María Zamora, Montse Oró, Xènia Roset, Jordi Pujol Dolcet
© 2022 Fabrizio de Gennaro & Dario Caruso for Cineuropa - fadege.it, @fadege.it, dario-caruso.fr, @studio.photo.dar, Dario Caruso

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