29/03/2022 - Maria Ripoll essaie de brosser le portrait d’une génération perdue, mais n’y parvient pas vraiment

Elena Martín et Ingrid García-Jonsson dans Nosaltres no ens matarem amb pistoles

Un été, un groupe de cinq amis retournent dans le village où ils ont grandi pour se retrouver. Cela fait un certain temps qu’ils ne se voient pas, chacun a fait sa vie. Ils sont tous dans leur trentaine et sentent qu’ils sont déjà arrivés à cet âge où les dés sont jetés. Ils évoluent entre instabilité professionnelle et sentimentale. L'idée est de célébrer leurs retrouvailles et le fait qu'en dépit de tout, ils ont encore des raisons pour vouloir aller de l’avant. Voilà le sujet de Nosaltres no ens matarem amb pistoles [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film], le nouveau film de la réalisatrice catalane Maria Ripoll, adapté de la pièce de théâtre du même nom par Víctor Sanchez, présenté en compétition au Festival de Malaga.

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Comme proposition, c’est intéressant, la prémisse ouvre beaucoup de possibilités. Parler de la précarité, de l’incertitude, de la frustration, du désenchantement, du sentiment de perte, du vide, des relations humaines, du passage du temps et des traces qu’il laisse en nous, des choses enthousiasmantes et des regrets de la vie. Aller du personnel au collectif, du portrait d'une génération à un tableau universel. Le problème du film de Ripoll est qu’il se contente de son idée de départ. L’intention de rendre compte des conflits de quelques personnages, de leur passé et de leur présent, à travers leurs retrouvailles est une idée aussi simple que classique, mais ce n'est pas pour autant qu'elle en est moins bonne. Il y a des moments du film qui transmettent une certaine émotion, qui parviennent à rendre compte d'une certaine vérité, d'attitudes, de sentiments et d'émotions qu'on a tous connus à un moment ou un autre. Cette sensation de reconnaître certains mouvements du film peut aider à vouloir continuer à le regarder.

Le grand problème de ce travail, c'est que tout reste intentionnel, limité à des moments, des éclats, mais sans mener à rien. Le long-métrage se perd dans les lieux communs, dans les clichés et simplismes, dans des choses puériles. Les personnages archétypiques ne sont pas toujours un défaut, parfois ils représentent bien la vie réelle, mais ici, ce n’est pas le cas : ici, ils restent de simples caricatures faciles, on dirait même un exercice de style paresseux. Il y a aussi une certaine paresse dans la manière dont les conflits se résolvent, comme si la réalisatrice avait voulu les résoudre sans se compliquer la vie outre mesure, comme elle aurait fait un exercice de calcul rapide et commode : mélanger certains ingrédients pouvant permettre d'arriver le facilement possible à l'endroit souhaité. Les histoires nécessitent du temps, un espace et un rythme précis pour être racontées. Ici, la majorité des conflits des personnages sont narrés sans qu'aucun soit approfondi : on reste en surface, dans le lieu commun, tout est trop anecdotique pour être crédible. On détecte aussi un effort pour tout expliquer, pour atteindre une complexité que le film n’a pas (en lui ajoutant des réflexions prétendument profondes ou belles), qui finit par entraver le récit de ces histoires qui auraient pu être intéressantes. Il n'est pas nécessaire de lâcher tout un discours sur la mort des illusions et la résignation pour parler de ces choses. Un des avantages de la fiction est qu'on peut recourir à la subtilité, mais bien sûr, c'est plus risqué, il faut savoir ce qui est de trop ou pas. Ici, on a trop de mots et de messages moralisateurs. De fait, les quelques bons moments du film sont ceux qui sont amusants et parviennent à faire rire.

Nosaltres no ens matarem amb pistoles a été produit par Turanga Films, À Punt Media, Un Capricho de Producciones et TV3. Le film arrivera dans les salles espagnoles le 17 juin, distribué par Filmax.

(Traduit de l'espagnol)