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SUNDANCE 2023 Premieres

Critique : Cat Person

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- Dans ce film parfois drôle, parfois très inconfortable, Susanna Fogel touche à quelque chose de vrai

Critique : Cat Person
Emilia Jones et Nicholas Braun dans Cat Person

Aussi injuste que cela puisse paraître, les femmes sont tout simplement habituées à avoir peur. Ça se met à faire partie de votre vie, franchement, de vérifier discrètement si quelqu’un vous suit la nuit, de vous demander si un type à qui on vient juste d’envoyer un texto ne serait pas en réalité un psychopathe équipé d'une chambre de torture. Cette sensation (qui n’influe même pas spécialement sur votre routine quotidienne, puisqu'elle est toujours présente, putain), Susanna Fogel la rend vraiment très, très bien dans Cat Person, projeté dans la section Premieres de Sundance.

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Margot (Emilia Jones de CODA, qui représente deux films à Sundance cette année, l’autre étant Fairyland), étudiante en université, fait tout cela elle aussi. Elle s'assure d'avoir quelqu’un au téléphone quand elle marche dans une rue sombre, probablement juste pour savoir que quelqu’un l’attend, et elle a peur de tous les bruits. Plus tard, elle va imaginer des scénarios violents et terrifiants alors même qu’elle se tient juste à côté de la personne avec qui elle a un rendez-vous galant. Mais ça ne va pas l'empêcher de le voir de nouveau.

À ce moment précis, on pourrait s'interroger sur la logique du personnage : si quelque chose ne semble pas net et si, en fait, on ne se sent pas en sécurité, pourquoi continuer ? Sauf qu'encore une fois : on parle de quelque chose qui est toujours là. L'inconnu (très) grand et ténébreux qu’elle rencontre dans le petit cinéma où elle travaille (Nicholas Braun, le cousin Greg de Succession) s'en rend bien un peu compte, et ira même jusqu'à tenter maladroitement de la rassurer en lui disant : "Je ne vais pas te tuer". Leur échec à communiquer sincèrement l’un avec l’autre (dans la vraie vie s'entend, parce qu’ils sont super par textos) et les effets de plus en plus inconfortables de cette lacune sont durs à regarder, parfois. Principalement parce qu’ils sont très réalistes.

Fogel livre un film peu commun, où des peurs banales côtoient des scènes d'un maniérisme surprenant : on a par exemple Isabella Rossellini annonçant que "les gens choisissent d'avoir peur" tout en s'occupant d'une colonie de fourmis (longue histoire). Il y a de l’amour (et de la haine) pour le cinéma dans Cat Person, et même Harrison Ford se fait troller pour le comportement de ses personnages vis-à-vis des femmes. Il y a des players permettant de regarder des contenus OTT qui chantent "Promenons-nous dans les bois". On a du mal à croire que l'histoire ne se passe pas au moment d'Halloween, car le dispositif, la terreur et l’exagération sont toujours déjà là. À tel point que quand quelque chose de terrible finit par se produire, c’est presque un soulagement, d’une manière un peu tordue. Au moins, Margot n'a pas perdu tout ce temps à l’imaginer pour rien.

Il est très possible que Cat Person – tiré d’une populaire nouvelle de Kristen Roupenian, publiée dans The New Yorker – mette en colère certains spectateurs. En effet, à aucun moment, Fogel ne nous rend les choses faciles. Elle ne choisit pas les méchants les plus évidents, par exemple, contrairement au film-révélation de l’année dernière, Fresh, pour n'en citer qu'un, et ce bien qu'elle parte également d'un petit flirt charmant et innocent qui va mal tourner. On peut parler de consentement tant qu’on veut (ou même de la fameuse "dick pic" que toute femme redoute), mais les choses ne risquent pas de beaucoup changer tant les femmes, surtout les jeunes femmes, auront à coeur de faire plaisir à tout le monde au lieu de faire passer leur bonheur en premier. "Dis-lui que tu as changé d’avis", plaide une moitié de Margot à l'autre au moment où notre héroïne se met littéralement à se dissocier de ce qui est en train de lui arriver, de ce qui est en train d'arriver à son corps. mais la pression d’être vue comme une fille cool voire (compte tenu de la différence d'âge avec le type) comme une vraie femme adulte est plus forte qu'elle. Et elle est si reconnaissable que c'en est à vous briser le cœur. La seule chose dont on ait envie, après ça, c'est de prendre une longue douche.

Cat Person est une production entre la France et les États-Unis qui a réuni les efforts de StudioCanal, 30WEST, Echelon Productions Inc, Imperative Entertainment et The New Yorker Studios. Les ventes internationales du film sont assurées par StudioCanal.

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(Traduit de l'anglais)

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