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BERLINALE 2023 Forum

Critique : Mammalia

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- BERLINALE 2023 : ce premier long-métrage de fiction par Sebastian Mihăilescu est un des très rares drames surréalistes jamais réalisés en Roumanie

Critique : Mammalia

Après avoir réalisé une belle quantité de courts-métrages depuis 2012, le Roumain Sebastian Mihăilescu a livré en 2021 un long-métrage documentaire hybride, You Are Ceauşescu to Me [+lire aussi :
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, qui a été très bien accueilli. Il présente maintenant son premier long-métrage de fiction, Mammalia [+lire aussi :
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, dans la section Forum de la Berlinale. Ce film est un drame surréaliste extrêmement personnel qui explore les angoisses du réalisateur (et d’autres hommes) par rapport à ce que la masculinité continue de signifier, à un moment où le rôle des hommes dans la société est remis en cause.

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Le film, scénarisé par Andrei Epure (qui a également co-écrit Man and Dog [+lire aussi :
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interview : Ştefan Constantinescu
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de Ştefan Constantinescu, sur un mari obsédé par l’infidélité de sa femme), a pour personnage central Camil (István Téglás), un homme qui a l’impression que sa petite amie Andreea (Mălina Manovici) s'éloigne de plus en plus de lui après avoir rejoint une commune de femmes. Un jour, Andreea disparaît, et Camil fait tout pour la retrouver, mais si, dans certains films, les hommes sauvent les femmes, ici qui a besoin d’être sauvé et de quoi n'est pas si clair.

Le film trouve des manières inventives d'interroger l’identité et la masculinité, et à mesure que différents événements de plus en plus imprévisibles s'enchaînent, le spectateur pourrait bien se trouver abasourdi en constatant combien sa propre vision de ce que la société attend des hommes est brutalement ancrée dans sa pensée. Tout ce qui se passe dans ce film contredit, ou du moins remet en question, toutes ces attentes, forçant progressivement le spectateur à accepter sa partialité. Et tandis qu’on voit Camil essayer frénétiquement (souvent pour des effets comiques) de retrouver Andreea (sans la présence apaisante de laquelle sa vie tombe de plus en plus en lambeaux), on est également invité à songer à ce qu'on tient pour acquis dans nos relations.

Bien sûr, on remarque tous les efforts qui ont été déployés pour rendre le scénario décalé et imprévisible, mais éviter les figures obligées du cinéma d’auteur ne suffit pas à lui seul à composer une bonne histoire. Mammalia est un film tellement personnel qu'il ne tient la route que comme note de bas de page par rapport aux films dramatiques roumains habituels ou comme commentaire sur ledit cinéma roumain, très masculin, où les héroïnes intéressantes sont significativement plus rares que les héros.

Dans le film de Mihăilescu, les hommes hétérosexuels échouent systématiquement à tout. Camil est timide et maladroit et semble toujours frôler l'accès de panique. On pourrait dire que sa quête farouche pour retrouver Andreea le sort de sa zone de confort, mais on se tromperait : il n’y a pas de zone de confort pour lui. Il fait l’effet d’un homme qui s'est toujours demandé ce qu’on attendait de lui sans se rendre compte que la réponse était : rien du tout. Mammalia contient même une scène qui fait l’effet d'être l’équivalent visuel d'une citation très connue (du moins en Roumanie) et souvent mentionnée (généralement dans le contexte de déceptions masculines) du poète moldave Eugen Cioclea : "l’homme est un appendice inutile de sa queue".

Il est intéressant de noter que seuls quelques rôles principaux sont joués par des acteurs professionnels. Ils sont entourés par des amateurs qui, selon le réalisateur, ont apporté leurs propres petits fragments de réalité à l’histoire, ce qui explique peut-être pourquoi Mammalia est si imprévisible, comme si Mihăilescu avait filmé des petites scènes se déroulant devant lui, réunissant des "personnages" qu'il ne pouvait (ni ne voulait) contrôler de quelque manière que ce soit.

Mammalia a été produit par microFilm (Roumanie) en coproduction avec Pandora Film (Allemagne) et Extreme Emotions (Pologne). Les ventes internationales du film sont assurées par Lights On.

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(Traduit de l'anglais)

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