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CANNES 2023 Un Certain Regard

Critique : Los delincuentes

par 

- CANNES 2023 : Le polar criminellement savoureux en trois actes, par Rodrigo Moreno, montre que "le cinéma n'est pas vraiment mort"

Critique : Los delincuentes
Daniel Eliás dans Los delincuentes

Dans Los delincuentes [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Rodrigo Moreno
fiche film
]
, le nouveau film de l’Argentin Rodrigo Moreno, projeté dans la section Un Certain Regard du Festival de Cannes, Morán (Daniel Eliás), un banquier désenchanté de Buenos Aires, conçoit un plan sophistiqué pour cambrioler la banque où il travaille, mais juste pour voler assez d’argent pour prendre sa retraite confortablement, et il entraîne avec lui son ami et collègue Román (Esteban Bigliardi).

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C'est Morán qui se charge du cambriolage en tant que tel, puis se dénonce à la police, sachant qu’il passera trois ans en prison puis sera de nouveau libre pour le restant de ses jours. Román, qui est marié à Flor (Gabriela Saidon), accepte la mission de cacher l’argent jusqu’à la libération de Morán et de ne pas se faire prendre lui-même. Los delincuentes commence par un crime, mais ce crime n’est pas le centre de l’histoire. Le cœur du récit, c’est la crise de la quarantaine de ces deux employés de banque qui frémissent d'envie de liberté, d’aventure et de créativité.

Cette comédie dramatique en trois actes dure près de trois heures. C’était un choix risqué pour Moreno. En effet, ce n’est pas une tâche facile que de continuer de captiver le public sur une telle durée, mais son projet a fonctionné. L’intrigue avance lentement mais sûrement, de manière équilibrée. Dans beaucoup des moments plus tranquilles et lents, les jeux d'ombres et de lumière dans des plans statiques, mais cadrés de manière intéressante, sont superbes (les chefs opérateurs Inés Duacastella et Alejo Maglio ont fait un excellent travail à ce niveau-là). L’éclairage semble refléter les caractères très distincts entre eux de  Morán et Román, et les manières très différentes qu'ils ont de gérer la situation. Ça rappelle le travail sur la lumière dans Lola de Rainer Werner Fassbinder.

À différents moments dans l’histoire, Román et Morán tombent amoureux de la même femme, Norma (Margarita Molfino), qui vit une vie tranquille à la campagne et fait des films avec un groupe d’amis. Les deux héros tombent aussi amoureux du mode de vie de Norma et sont attirés par l’artisanat du cinéma. Dans une scène, les amis de Norma causent cinéma et concluent : "Le cinéma tel qu'il était jadis est mort". Los delincuentes est une ode à l'art de faire des films, et Moreno prouve bien qu’il est encore vivant. Cette partie du film trahit le fait que Moreno s'est probablement inspiré du Nouveau Cinéma allemand (Fassbinder, Herzog, Schlöndorff…), dont le leitmotiv était : "Le vieux cinéma est mort. Nous croyons au nouveau cinéma".

La lumière n'est pas la seule à être riche en contrastes : la disparité est, de manière générale, un élément important du film. On a le contraste entre la ville de Buenos Aires et les sierras de Córdoba, entre les banquiers et les artistes, entre Morán et Román. Au-delà de ça, l’acteur Germán De Silva joue deux rôles : celui du directeur de la banque et celui du gangster Garrincha, qui terrorise Morán en prison, et le fait si bien qu’on oublie que c'est le même acteur.

En réalisant un film artistiquement ambitieux et critique de la société, Moreno ressuscite le cinéma d'antan tout en lui donnant son inflexion personnelle. Il y a quelques trous dans l'intrigue au fil du chemin, et la fin reste assez ouverte (Vont-ils se battre pour la même femme ? Y aura-t-il une confrontation entre les deux héros dans les montagnes d’Argentine, à présent que Morán a été relâché ? Comment Morán arrive-t-il à n'écoper que d'une peine de trois ans ?), mais si vous vous sentez capable de rester assis trois heures, ça vaut la peine de regarder Los delincuentes sur un grand écran.

Los delincuentes est une coproduction entre l’Argentine, le Brésil, le Chili et le Luxembourg qui a réuni les efforts de Wanka Cine, Rizoma Films et Jaque Content, en coproduction avec Les Films Fauves, Jirafa Films et Punta Colorada de Cinema. Les droits du film sont gérés par Magnolia International.

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(Traduit de l'anglais)

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