VENISE 2023 Giornate degli Autori
Critique : Los océanos son los verdaderos continentes
par Vittoria Scarpa
- VENISE 2023 : Dans son premier long-métrage, qui a fait l'ouverture de la compétition des 20es Giornate degli Autori, Tommaso Santambrogio une réflexion poétique sur la notion de séparation

Il y a des images qui, interceptées par un enfant, restent imprimées dans sa mémoire pour toujours. Parfois, à partir d’une de ces images peut même naître un film. C’est ce qui s'est passé pour Tommaso Santambrogio : témoin, à l'âge de huit ans, d'une étreinte bouleversante entre un père et une fille dans un aéroport cubain (la petite partait probablement sans billet retour), il s'en est inspiré pour son premier long-métrage, Los océanos son los verdaderos continentes [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Tommaso Santambrogio
fiche film], qui a fait cette année l'ouverture de la compétition des 20es Giornate degli Autori de la 80e Mostra de Venise.
Ce travail du prometteur réalisateur de 31 ans (qui a vécu entre l’Italie et La Havane, et qui a à son actif des collaborations avec des cinéastes importants, comme Lav Diaz et Werner Herzog), prolongement d'un court-métrage qui portait le même titre et qui a été primé en 2019 à la SIC de Venise avant d'être projeté dans différents festivals internationaux, est une réflexion poétique sur le thème de la séparation, tournée dans un élégant noir et blanc et articulée autour de trois histoires qui se rattachent, d’une manière ou d’une autre, à un problème qui est devenu une plaie de la société cubaine actuelle : l'exode migratoire.
Ne serait-ce que ces 18 derniers mois, près de 8 % de Cubains ont quitté l'île pour aller chercher ailleurs une vie meilleure. Dans le film, c'est ce que s'apprête à faire Edith (Edith Ybarra Clara), une habile marionnettiste trentenaire qui, avec son compagnon Alex (Alexander Diego), forme un duo théâtral très apprécié des habitants de San Antonio de los Baños (le film s'ouvre justement sur un de leurs spectacles). Edith attend les documents nécessaire pour partir en Europe, tandis qu'Alex est décidé à rester. De leur côté, les petits Franck (Frank Ernesto Lam) et Alain (Alain Alfonso González), auxquels on enseigne à l’école que "la liberté est l'essence de la vie", rêvent d'émigrer vers les États-Unis et de devenir champions de baseball. Ailleurs encore, une vieille dame nommée Milagros (Milagros Llanes Martinez) représente la mémoire historique du lieu : elle époussette de vieilles photos, écoute de la musique traditionnelle, relit de vieilles lettres envoyées par son mari depuis l’Angola (où les Cubains sont intervenus contre l'invasion sud-africaine épaulée par les États-Unis). Son mari n'est jamais rentré d’Afrique, mais elle continue à aller tous les jours à la gare, dans l'espoir, peut-être, de le voir descendre du train.
Sur les deux heures que dure le film, Santambrogio dépeint ses personnages (tous incarnés par des acteurs du cru) dans leurs interactions et petits gestes quotidiens, souvent en grand angle avec une caméra fixe, composant des tableaux vivants raffinés et pleins de nostalgie dans un noir et blanc qui va droit à l'essence des choses. L'émotion monte progressivement, et atteint son acmé dans une scène d'un grand lyrisme (un spectacle de marionnettes qui parle, lui aussi, d'une déchirante séparation : celle d'un père et de son fils), révélant la sensibilité de ce jeune réalisateur, sur le travail duquel il conviendra de garder un oeil par la suite.
Los océanos son los verdaderos continentes a été produit par Rosamont avec Rai Cinema, en coproduction avec Cacha Films (Cuba). Les ventes internationales du film sont assurées par Fandango Sales.
(Traduit de l'italien)
Galerie de photo 30/08/2023 : Venise 2023 - Oceans Are the Real Continents
17 photos disponibles ici. Faire glisser vers la gauche ou la droite pour toutes les voir.



© 2023 Isabeau de Gennaro for Cineuropa - fadege.it
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